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Merveilleuse folie organisée

Vienna
Wiener Staatsoper
06/02/1999 -  
Gioachino Rossini : L’Italienne à Alger
Michele Pertusi (Mustafà), Simina Ivan (Elvira), Liliana Ciuca (Zulma), Istvan Gati (Haly), Juan Diego Florez (Lindoro), Jennifer Larmore (Isabelle), Alfred Sramek (Taddeo)
Choeurs et orchestre de l’Opéra de Vienne, Marcello Viotti (direction)
Jean-Pierre Ponnelle (mise en scène)

Ecrite en moins d’un mois par un jeune compositeur de 21 ans déjà fort de nombreux succès, l’Italienne à Alger est un chef-d’oeuvre de musique et de comédie. En dépit des délais extrêmement courts qui lui sont imposés par le Teatro San Benedetto de Venise où l’oeuvre sera représentée pour la première fois le 22 mai 1813, Rossini ne fait pas appel à la technique de " l’auto-emprunt " – à laquelle il souscrit pourtant bien souvent- et compose une partition totalement nouvelle, jusqu’à l’ouverture. Peut-on y voir le signe que le sujet l’a particulièrement inspiré ? Sous des dehors de " turquerie " conventionnelle, Rossini et le librettiste Angelo Anelli rompent, par ce " dramma giocoso ", avec l’héritage de l’opéra comique du settecento et exploitent de nouvelles ressources farcesques jusqu’aux limites de l’absurde, comme le finale du premier acte avec ses onomatopées délirantes. L’accueil des vénitiens est triomphal, Stendhal relate dans sa Vie de Rossini "  à la fin de ce finale (finale I) chanté par Paccini, Galli et la Marcolini, les spectateurs ne pouvaient plus respirer et s’essuyaient les yeux ". L’Italienne à Alger est revenue à la conquête de Vienne dans l’élégante mise en scène de Jean-Pierre Ponnelle créée en 1987, et a entraîné les spectateurs, pour quelques heures, dans cette merveilleuse folie organisée.

Il est vrai qu’aucun des protagonistes n’a ménagé son ardeur pour accroître le comique des situations, parfois au détriment du chant. C’est le cas d’Alfred Skramek, Taddeo d’une tradition aujourd’hui révolue d’acteurs-chanteurs pour lesquels les rôles de basse bouffe légitiment une technique approximative. Michele Pertusi, qui s’est illustré maintes fois par ses interprétations rossiniennes, n’était visiblement pas dans sa meilleure forme. Le baryton-basse italien a endossé un peu vite le costume de "Papatacci ", privilégiant dès le premier acte le comique de son personnage et sacrifiant sensiblement la vocalise rapide de son ‘Già d’insolence ardore’, pour lequel la direction de Marcello Viotti ne l’aidait guère. Mais ses duos avec Isabelle ont constitué des moments jubilatoires, au même titre que les ensembles. L’Isabelle de Jennifer Larmore n’est plus à présenter. La mezzo américaine a promené sa malicieuse Isabelle sur toutes les scènes internationales. L’actrice est fine : regard enjôleur mais derrière lequel on sent une femme impétueuse et décidée, la " bella italiana " mène très vite tous ces messieurs par le bout du nez. Passé un instant de désarrroi (‘Cruda sorte’), elle retrouve tous ses esprits et terrasse l’imprudent Mustafà par un fulgurant abattage vocal que Jennifer Larmore, virtuose de la vocalise, exécute avec aisance. Mais les problèmes d’émission de la mezzo sont bien là : sons tubés, grave opaque ; l’actrice et la musicienne ne parviennent pas à masquer ces défauts. Véritable triomphateur de la soirée, le ténor Juan Diego Florez a fait ses débuts au Wiener Staatsoper en déclenchant une ovation à la suite de la cavatine ‘Languir per una bella ‘. La voix se projette avec aisance et le registre suraigu, sollicité par ce rôle, très bien maîtrisé. Juan Diego Florez possède toutes les qualités de Lindoro, à la fois langueur et agilité, et sa jeunesse lui confère un atout supplémentaire pour la mise en scène ; voilà un bel espoir pour le chant rossinien qui se confirme.



Laurence Varga

 

 

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