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Un Don Giovanni sans souffle

Geneva
Grand Théâtre
12/11/2009 -  et 13*, 14, 15, 17, 19, 20 décembre
Wolfgang Amadeus Mozart : Don Giovanni
Pietro Spagnoli*/Ildebrando d’Arcangelo (Don Giovanni), José Fardilha*/Burak Bilgili (Leporello), Diana Damrau*/Svetlana Doneva (Donna Anna), Serena Farnocchia (Donna Elvira), Christoph Strehl (Don Ottavio), Raffaella Milanesi (Zerlina), Nicolas Testé (Masetto), Fjodor Kuznetsov (Il Commendatore)
Orchestre de la Suisse Romande, Chœur du Grand Théâtre, Kenneth Montgomery (direction)
Marthe Keller (mise en scène )


(© GTG/Carole Parodi)


Que faire, aujourd’hui, du Don Juan mozartien, alors que tout semble avoir été dit ? Marthe Keller, elle, ne fait pas grand-chose, sinon accompagner classiquement, voire platement, le héros jusqu’à son engloutissement dans les flammes de l’enfer. D’une grande humilité, qu’elle revendique elle-même, sa production ne risque pas laisser de grand souvenir. Retour à la tradition, mais sans le souffle de certaines mises en scène plus stimulantes. Don Juan ? Un séducteur cynique. Leporello ? Un valet volontiers singe du maître. Elvire ? Une plaquée enquiquineuse. Anna, heureusement, garde son ambiguïté : troublée par Don Juan, ne lui cédant pas pour autant, amoureuse d’Ottavio au fond. Direction d’acteurs minimale, convenue, à la limite de l’ennui. Les personnages semblent perdus au milieu des grands murs ocres d’un palais ou d’une église rappelant l’Italie, qui se décomposent et se recomposent au gré des tableaux, beau décor à la fois immuable et changeant ; y passent parfois des premières communiantes chaperonnées par une religieuse, sans doute futures victimes du burlador porté sur la giovin principiante. Le spectacle vient du Met, témoin d’une époque – celle de Joseph Volpe (lire ici) – et des goûts d’un certain public. Il offre cependant un moment assez fort : l’ultime rencontre, sous un éclairage blafard, avec le Commandeur figé dans une vitrine, où Don Juan, raidi, violent, affronte crânement son destin.



Musicalement, cela attire davantage. Pietro Spagnoli a fière allure, belle voix impeccablement maîtrisée, qui ne s’essouffle pas dans « Fin ch’han dal vino » et ne détimbre pas dans la sérénade. Que le Leporello de José Fardilha possède un timbre pas si éloigné de celui de son maître ne gêne pas, bien au contraire, valet stylé jusque dans le buffa le plus appuyé, parfois heureusement distancié. Christoph Strehl, en revanche, fait pâle figure en Don Ottavio propret, lui qu’on a connu plus assuré. Les dames chantent bien, même si la Zerline charmante de Raffaella Milanesi, mariée à un Masetto trop discret, manque parfois de piquant et n’a pas assez de corps dans la voix pour la tessiture somme toute assez centrale de la paysanne. On lui préfère le timbre charnu de Serena Farnocchia, Elvire moins vengeresse qu’amoureuse, jamais hystérique. Elle doit pourtant s’incliner devant l’Anna de Diana Damrau, fille d’un Commandeur un peu charbonneux, aussi à l’aise dans le furore de « Or sai chi l’onore » que dans les volutes de « Non mi dir », pas si modeste pour le médium ; on l’aurait crue Zerline, la voici patricienne, digne dans la vengeance, jeune surtout, et rien moins que frigide.



Kenneth Montgomery a choisi la version de Prague : pas de « Dalla sua pace » pour Ottavio, pas de « Mi tradi » pour Elvire. Le chef a placé ses musiciens de profil, comme dans Ariodante, ce qui permet peut-être de mieux distinguer les plans sonores et les couleurs, qu’il veille scrupuleusement à mettre en valeur. Direction fluide, légère, élégante, installant dès l’Ouverture un climat sans verser dans un dramatisme forcené, victime ensuite de sa méticulosité, oubliant finalement le théâtre, d’un classicisme, là encore, beaucoup trop sage.



Didier van Moere

 

 

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