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Mozart à l’heure du thé

Baden-Baden
Festspielhaus
11/22/2009 -  et 12 (Glasgow), 13 (Birmingham), 14 (Cardiff), 17 (London), 21 (Frankfurt), 23 (Luzern), 25 (Freiburg), 29 (Paris) novembre, 1er décembre (Manchester) 2009
Johann Christian Bach : Sinfonia concertante (Notturno) C40
Wolfgang Amadeus Mozart : Concerto pour piano N° 17 K. 453 – Symphonie N° 38 K. 504 «Prague»
Johann Sebastian Bach: Concerto pour piano N° 3 BWV 1054

Academy of St Martin in the Fields, Murray Perahia (piano et direction)


M. Perahia (© Marcus Gernsbeck)


L’Academy of St Martin in the Fields vient de fêter ses cinquante ans, un jubilé qui souligne aussi que l’époque où cette formation jouait un rôle essentiel dans le paysage discographique baroque et classique s’est désormais bien éloignée de nous. Emblématique de ces « formations Mozart » innovantes qui allégeaient alors l’interprétation du répertoire symphonique de la seconde moitié du XVIIIe siècle, l’Academy d’aujourd’hui, si elle garde une patine et un confort sonores bien britanniques, semble avoir perdu un peu de son lustre. Les violons manquent d’homogénéité, avec même ici ou là quelques rares aigreurs désagréables, et les chefs d’attaque des cordes semblent relativement modestes, ou du moins peu assurés quand il s’agit d’affronter les parties solistes de la Sinfonia concertante de Jean Chrétien Bach qui ouvre ce concert. Des interventions peu marquantes, qui manquent d’aisance voire de solidité, alors que l’écriture galante du dernier fils de Bach ne paraît ni techniquement dangereuse ni, à vrai dire, musicalement consistante.


Après cette brève mise en condition, exécutée sans chef, Murray Perahia entre en scène pour un Dix-septième Concerto de Mozart dirigé depuis le piano. Une configuration qui garde sa légitimité historique et a suscité de beaux fleurons discographiques (on pense à l’intégrale Perahia chez CBS, justement) mais qui reste risquée, voire peu propice à une perfection suffisante. Il est patent que Perahia se sert de certains éléments de sa partie pianistique... pour diriger. Des accords marqués de la main gauche sont envoyés comme des signaux de stabilité rythmique, les traits paraissent surarticulés pour bien garder leur carrure, sans parler de nombreuses fins de phrases accélérées pour rejoindre un orchestre qui, lui, n’attendra pas forcément. Si le caractère très vivant de la performance peut séduire, la stricte restitution du texte en souffre un peu, surtout dans ce type de concerto médian où Mozart ne s’affranchit pas encore du style galant ambiant, tout en essayant continuellement de chercher autre chose, mais par petits bouts, par échappées brèves... une fragmentation qui ne gagne pas à être soulignée. Des moments de plaisir pianistique un peu partout (le toucher de Perahia reste magique, même sur un instrument mal accordé) mais pour juger ce beau concerto à sa juste valeur cette exécution empirique n’est pas idéale.


Après l’entracte, le Concerto BWV 1054nous fait entrevoir un autre monde : un équilibre idéal, un délié aérien des doigts, un orchestre moins partenaire que faire-valoir mais manifestement à l’écoute, bref une sorte de rêve éveillé dont il nous semble que la musique de Bach sort grandie. Maintenant, quant à l’authenticité stylistique d’une telle approche elle reste évidemment sujette à de multiples interrogations. Le Bach concertant de Perahia, avec ses longues plages étales et ses moments qui paraissent suspendus ne ressemble à rien d’autre (et ce n’est pas une question de tempi, qui restent vifs, mais bien d’architecture générale). Somme toute cette re-création constitue telle qu’en elle-même une catégorie stylistique à part, et c’est très bien ainsi.


Retour à des pratiques plus habituelles pour une Trente-huitième Symphonie « Prague » qui nous révèle en la personne de Murray Perahia un chef d’orchestre convaincant, aux prises avec une œuvre limpide et pourtant difficile où l’on a entendu sombrer nombre de prétendues stars actuelles de la baguette. Le développement du premier mouvement, souvent fatal, ne laisse apparaître aucune chute de tension, et la gestique de Perahia, efficace à défaut d’être bien rodée, s’avère lisible quant à des intentions qui paraissent excellentes. Là encore le manque d’étoffe des cordes de l’actuelle Academy gêne un peu, source de déséquilibres avec des vents fiables mais qui collectivement sonnent parfois trop fort. D’où quelques coups de boutoir involontaires dans cette interprétation d’une réserve expressive très britannique. On relève aussi au passage deux curieux bassons, dont le son reste encore bien plus terne que celui de l’habituel système allemand, s’en tenant invariablement aux mêmes couleurs pastel... une sous-particularité organologique d’Outre-Manche, sans doute !


A noter encore un bis agréable et bien enlevé : le dernier mouvement de la Symphonie « Oxford » de Haydn, qui conclut avec élégance ce joli concert de fin d’après-midi.



Laurent Barthel

 

 

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