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Une Salomé peu straussienne

Paris
Opéra Bastille
11/07/2009 -  et 10, 13, 16, 19, 22, 25 novembre, 1er décembre 2009
Richard Strauss : Salomé
Thomas Moser (Herodes), Julia Juon (Herodias), Camilla Nylund (Salome), Vincent le Texier (Jochanaan), Xavier Mas (Narraboth), Varduhi Abrahamyan (Page der Herodias), Wolfgang Ablinger-Sperrhacke (Erster Jude), Eric Huchet (Zweiter Jude), Vincent Delhoume (Dritter Jude), Andreas Jäggi (Vierter Jude), Gregory Reinhart (Fünfter Jude), Nahuel Di Pierro (Erster Nazarener), Ugo Rabec (Zweiter Nazarener), Nicolas Courjal (Erster Soldat), Scott Wilde (Zweiter Soldat), Antoine Garcin (Ein Cappadocier), Grzegorz Staskiewicz (Ein Sklave)
Orchestre national de l’Opéra de Paris, Alain Altinoglu (direction)
Lev Dodin (mise en scène)


V. Le Texier & C. Nylund
(© Opéra national de Paris/Christian Leiber)



Lev Dodin, dont l’iconoclaste Dame de pique en avait irrité plus d’un (lire ici), s’est fait classique dans Salomé, à tel point qu’on finirait presque par trouver trop sage cette mise en scène vue pour la troisième fois. Que le prophète soit enfermé dans une cage et non plus dans une citerne, que Salomé meure non plus écrasée sous les boucliers des soldats mais dans une transe orgastique, voilà qui n’innove pas beaucoup et se situe en deçà de la lecture d’un Luc Bondy, moins statique et plus tendue. Le metteur en scène russe, visiblement, veut se tenir sobrement à distance de la violence hystérique de l’œuvre, qui fait du palais d’Hérode un asile de fous. On n’en reste pas moins sensible à la justesse de la direction d’acteurs, finalement fidèle à la lettre, à ce huis-clos dans un décor à peine éclairé par les très subtiles lumières de Jean Kalman, où Appia rejoint Böcklin.


Camilla Nylund doit succéder à Karita Mattila (lire ici) et à Catherine Naglestad (lire ici). Elle n’y réussit pas vraiment, dépassée par un rôle trop lourd pour elle, devant forcer ses moyens pour assumer une tessiture sollicitant beaucoup les extrêmes, manquant de couleurs dans le timbre pour incarner vraiment l’ambiguïté de l’innocence perverse de la petite princesse, n’inspirant qu’un certain respect par sa probité et la sincérité de son engagement. Vincent le Texier, en revanche, confirme, après son Wozzeck (lire ici), ses affinités avec le répertoire allemand, prophète ténébreux, à la fois vibrant et hiératique, moins éprouvé qu’elle, malgré d’évidentes tensions, par une tessiture tout aussi située dans les extrêmes – la projection de la voix s’est décidément améliorée. A plus de soixante ans, Thomas Moser n’a rien perdu de son style, lui qui chante le rôle d’Hérode là où tant d’autres le parlent, refusant l’hystérie névrotique pour conserver au tétrarque une certaine tenue ; les années ont néanmoins usé la voix et il peine malheureusement à se faire entendre dans la grande nef de Bastille, submergé par la masse de l’orchestre. Rien à redire du reste de la distribution, tout à fait adéquat, avec un intéressant Narraboth de Xavier Mas.


La masse de l’orchestre… Alain Altinoglu, excellent chef au demeurant, ne facilite pas la tâche de chanteurs qui, justement, auraient besoin d’être ménagés, faute d’un bon équilibre entre la fosse et la scène. Sans doute veut-il aussi bousculer une tradition et exacerber la modernité de l’écriture de Strauss, qu’il rapproche parfois de l’école de Vienne, comme si Salomé anticipait sur Wozzeck. Cela se peut défendre, du moins jusqu’à un certain point : la musique s’assèche, perd de sa générosité, de son opulence, de sa sensualité vénéneuse. Quand manque tout cela, est-on encore chez Strauss ?



Didier van Moere

 

 

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