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Inspirations littéraires

Paris
Opéra Comique
11/05/2009 -  et 7 novembre 2009 (Venezia)
Hector Berlioz : Grande ouverture de Waverley, H. 26, opus 1 – Les Nuits d’été, opus 7, H. 81B – Harold en Italie, opus 16, H. 68

Sophie Koch (mezzo), Sabine Toutain (alto)
Orchestre national de France, Colin Davis (direction)


C. Davis (© Radio France/Christophe Abramowitz)


Parvenu à mi-chemin de son schéma quinquennal et estival de rénovation, l’Opéra Comique fait tardivement sa rentrée – et encore les choses «sérieuses» ne commenceront-elles que le 9 décembre avec Fortunio de Messager, qui sera suivi de The Fairy Queen de Purcell, L’Amant jaloux de Grétry, Mignon d’A. Thomas, Les Boulingrin d’Aperghis et Pelléas et Mélisande de Debussy. En sorte d’avant-première de Béatrice et Bénédict, qu’Emmanuel Krivine dirigera du 12 février au 6 mars dans une mise en scène de Dan Jemmett, le concert inaugural était entièrement consacré à Berlioz. Même si le nom du compositeur français n’est guère associé à la salle Favart, sinon au travers d’un souvenir cuisant (la désastreuse création de La Damnation de Faust), Jérôme Deschamps se plaît ainsi à placer en exergue de la programmation 2009-2010 «son credo: seule l’émotion permet d’atteindre la vérité».


Cette soirée coïncidait avec la visite – traditionnelle, mais toujours très attendue – que Colin Davis ne manque pas de rendre régulièrement à l’Orchestre national, avec lequel il édifie patiemment, saison après saison, un hommage à l’œuvre de son cher Berlioz: Symphonie fantastique en janvier 2005, Nuits d’été en mars 2006 (voir ici), Roméo et Juliette en novembre 2006 (voir ici), Requiem en juin 2008 à Saint-Denis, Béatrice et Bénédict en février dernier (voir ici).


Cette fois-ci, le programme aborde trois de ses nombreuses sources littéraires: Walter Scott, d’abord, au travers de l’ouverture Waverley (1828), d’après le roman éponyme (1814) de l’écrivain écossais. La réserve innée – britannique? – de sir Colin n’est pas de trop dans cet étrange et composite «opus 1» d’un jeune homme de vingt-cinq ans, où se mêlent relents rossiniens et, déjà, des traits typiques de son écriture, telle cette importante cohorte de bassons. Mais réserve ne signifie nullement fadeur ou même tiédeur, ainsi qu’en témoignent la générosité du chant des dix violoncelles dans le larghetto et la vigueur de l’allegro vivace, d’autant que le National, servi par une acoustique précise et naturelle, est dans un bon soir – comme à chaque fois qu’il rencontre une grande baguette.


Théophile Gautier, ensuite, avec des poèmes tirés de La Comédie et la Mort (1838): en 2006, c’est avec Anna Caterina Antonacci que Davis avait donné les Nuits d’été (1841/1856). On attendait peut-être trop de Sophie Koch, forte de ses succès sur les grandes scènes du monde: vêtue d’une sculpturale robe jaune safran, la mezzo française n’est pas mise en difficulté par les exigences techniques de ces six mélodies – attaque impeccable des «Ah!» de «Sur les lagunes» – et n’a pas à forcer la voix, à la faveur des dimensions de la salle et de l’orchestre (trente et une cordes). Mais le timbre fluctue, l’émission et l’intonation, tantôt somptueuses, tantôt fragiles, déroutent et la posture de tragédienne tour à tour altière et passionnée manque de naturel. L’ensemble est en outre lesté par un tempo très ralenti – d’emblée une «Villanelle» bien trop placide – et, surtout, par une diction laissant sérieusement à désirer, inconvénient donc quasi rédhibitoire dans ce répertoire. Cela n’ôtera évidemment rien au plaisir et à l’intérêt de l’entendre chanter dans un autre temple de l’opéra les Sea Pictures d’Elgar à Garnier le 26 mars prochain.


Lord Byron, enfin, dont le long poème Childe Harold’s Pilgrimage (1818) inspira à Berlioz Harold en Italie (1834). Avec Sabine Toutain, soliste au National depuis 1990, la partition est, moins que jamais, un concerto, mais bien une «symphonie avec alto principal»: sans avoir jamais le souci de se mettre excessivement en avant, elle fait preuve d’une élégance tout à fait au diapason de l’approche de Davis. Car s’il demeure l’un des meilleurs interprètes de cette musique, ce n’est pas en exagérant son caractère novateur et spectaculaire: le chef anglais prouve qu’on peut la servir dignement, en excluant tapage et trivialité aussi bien que pittoresque et démesure. Pour autant, la seconde partie de «Harold aux montagnes» se déploie avec fougue – il en laisse même échapper sa baguette – et la «Sérénade» ne manque nullement de verve. Mais ce juste équilibre aura sans doute laissé froids les amateurs d’un Berlioz romantique et flamboyant, à l’image d’une «Orgie de brigands» plus débonnaire qu’hallucinée.



Simon Corley

 

 

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