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Relectures intimistes

Aix-en-Provence
Grand Théâtre de Provence
10/10/2009 -  et 11 octobre 2009 (Paris)
Ludwig van Beethoven: Sonates pour violon et piano n° 1, opus 12 n° 1, n° 2, opus 12 n° 2, n° 3, opus 12 n° 3, et n° 10, opus 96

Isabelle Faust (violon), Alexandre Melnikov (piano)


I. Faust (© Felix Broede)



Après les symphonies de Beethoven revues par les iconoclastes d’Anima Eterna et Jos van Immerseel (lire ici), la programmation du Grand Théâtre de Provence a le chic de transfigurer une affiche d’apparence on ne peut plus classique, en invitant des artistes parmi les plus novateurs du moment. Isabelle Faust et Alexandre Melnikov viennent de sortir chez Harmonia Mundi une intégrale des dix Sonates pour violon et piano de Beethoven très remarquée par la critique pour son originalité. D’où ce programme un peu austère regroupant quatre de ces sonates, sans y inclure les deux « tubes » que sont Le Printemps et l’A Kreutzer, et qu’ils joueront en divers endroits, notamment à Paris.


Dans les trois Sonates de l’Opus 12, on est d’emblée frappé par le parti pris de ramener ces œuvres vers le modèle mozartien de sonate pour clavier avec accompagnement de violon. Le violon d’Isabelle Faust s’avère très peu dominateur, avant tout discret et subtil : il laisse le piano mener le discours, et se contente de le ponctuer de quelques traits spirituels. On est loin du contresens esthétique d’une Anne-Sophie Mutter à la sonorité plantureuse écrasant son falot partenaire en conférant une importance démesurée au moindre pizzicato ! Evidemment, ce respect du texte n’est pas toujours des plus valorisants pour l’interprète, et souligne la problématique de l’écriture beethovénienne en cette période de transition. Le violon ne s’épanche pas comme il le fera dans les sonates romantiques, mais multiplie les petits motifs furtifs. Isabelle Faust ne cultive donc pas la belle sonorité comme une fin en soi, et les joue sans insistance, avec un timbre maigre, presque d’une voix blanche, comme un parlando. Heureusement que les mouvements lents contiennent quelques belles mélodies, parfois d’une mélancolie déchirante, où elle peut déployer un ample chant lyrique.


Le piano d’Alexandre Melnikov séduit à chaque instant par son cantabile raffiné, mais il étonne aussi par son refus de la puissance, surtout pour qui garde dans l’oreille la manière virile et grandiose dont Perlman et Ashkenazy ou Ferras et Barbizet abordaient le cycle de l’Opus 12, comme annonciateur du Beethoven à venir. Il vaut mieux oublier ces grandes références pour pouvoir apprécier ce qui nous est à présent offert, et goûter ce discours avant tout galant et charmeur.


Leur interprétation de la Dixième et dernière sonate, contient d’admirables moments de poésie lunaire. Comme dans l’Opus 12, les artistes épousent admirablement les moindres inflexions des états d’âmes distillés par Beethoven, même si l’on peut regretter que cette succession d’instants délicieux manque parfois un peu de continuité. Néanmoins, avec leurs partis pris qui tranchent radicalement avec l’image traditionnelle d’un Beethoven tapageur et tempétueux, Isabelle Faust et Alexandre Melnikov nous donnent une remarquable leçon de dialogue chambriste.



Philippe van den Bosch

 

 

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