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Révolutions et contre-révolutions

Gijón
Théâtre de l’Universidad Laboral
08/14/2009 -  
José Peris Lacasa : Música grave « Homenaje a Severo Ochoa »
Edvard Grieg: Concerto pour piano en la mineur , opus 16
Dimitri Chostakovitch: Symphonie n° 11 en sol mineur « L'Année 1905 », opus 103

Martín García García (piano)
Orquesta Sinfónica del Principado de Asturias, Maximiano Valdés Soublette (direction)


M. Valdés (© Manuel Velez)



Après des années d’abandon, on utilise enfin intelligemment l’Universidad Laboral et l’on prend conscience de l’intérêt de son cadre à défaut de ses origines franquistes. Si l’an dernier avait permis d’assister, dans la cour centrale, à une représentation de Cavalleria Rusticana (voir ici ), cette année était l’occasion de découvrir le théâtre de l’Universidad Laboral, après sa rénovation, soit pour un concert orchestral, soit pour une représentation de Madame Butterfly (le 22 août), soit pour celles de West Side Story (les 26 et 27 août).


Si le théâtre affichait complet pour Madame Butterfly depuis plusieurs semaines, ce n’était malheureusement pas le cas pour le concert orchestral du 14 août. Le public qui comprenait bon nombre d’amis et ou de membres des familles des musiciens était en effet anormalement clairsemé alors que le programme aurait dû, dans ce cadre, clairement contre-révolutionnaire mais passionnant, attirer beaucoup plus de mélomanes.


En première partie, était présentée une nouvelle version pour orchestre à cordes datant de cette année de la pièce écrite en hommage au prix Nobel de médecine espagnol (1959) Severo Ochoa composée par José Peris Lacasa, élève de Carl Orff et de Nadia Boulanger né en 1924. Il s’agissait d’une sorte d’adagio de onze minutes pouvant faire penser à La Nuit transfigurée de Schönberg ou au début de la Musique pour cordes, percussion et célesta de Bartók mais comme revus par Krzysztof Penderecki, curieusement principal chef invité de l’Orchestre symphonique de la Principauté des Asturies qui l’interprétait. Glissandi et clusters frappés sur les violoncelles et contrebasses étaient impressionnants sans que l’ensemble ait pu marquer par son originalité ou une quelconque tension digne d’intérêt. Le compositeur, présent dans la salle, reçut néanmoins des applaudissement chaleureux.


Suivait le Concerto de Grieg (1868). Après une œuvre écrite par un compositeur d’un certain âge, le tube était interprété par un extraordinaire garçonnet – treize ans cette année : Martín García García. Natif de Gijón, formé par des Russes, lesquels composent l’essentiel de l’Orchestre de la Principauté des Asturies, il entama le concerto sans complexe, suivant la battue plutôt modérée de Maximiano Valdés, se jouant des difficultés techniques, mais aussi sans puissance. Il fut naturellement plus convaincant dans le deuxième mouvement, Adagio, son âge lui évitant tout côté sirupeux. Les limites de son jeu réapparurent néanmoins dans le dernier mouvement tandis que la direction, attentive, d’un orchestre aux cors décevants ne montrait de son côté guère d’éclats.


Les choses empirèrent avec les bis du jeune prodige. Sans que le public lui demande quoi que ce soit, Martín García García offrit en effet immédiatement après un instant de concentration deux bis dont la Douzième  Révolutionnaire » (Allegro con fuoco) des Etudes opus 10 de Frédéric Chopin, boulée, précipitée, sans dynamiques ni respiration. Mais on ne pouvait qu’être frappé par autant de talents rassemblés chez un aussi jeune artiste. Ils n’attendent finalement, et c’est normal, qu’un peu de maturité.


La seconde partie du concert était entièrement consacrée à la monumentale Onzième symphonie de Chostakovitch créée en 1957 pour évoquer l’année 1905 et sa révolution dans un style le plus souvent pompeux et cinématographique. La musique à programme que constitue cette symphonie perdit malheureusement toute urgence sous la direction de Maximiano Valdés. L’évocation de la place du Palais d’Hiver fut presque ennuyeuse. Si la trompette parut fade et imprécise dans ce premier mouvement, il n’en fut pas de même du beau hautbois ou des percussions, notamment de la caisse claire, dans le dernier, superbe page motoriste menée de façon imperturbable par un Maximiano Valdés, méticuleux même si sans aucune flamme révolutionnaire.


Les limites de la salle apparurent alors encore plus nettement qu’auparavant. Le théâtre de la « Laboral » n’est en effet en aucune façon, malgré les travaux opérés, qui notons-le au passage ont sacrifié les superbes fauteuils en cuir pour les remplacer par de banals fauteuils de velours rouge, une salle de concert. Certes l’orchestre était trop profondément installé sur la scène, sous un écran de cinéma et des rideaux de théâtre, des musiciens (contrebasses) se trouvant quasiment dans les coulisses, en dehors du champ de vision des spectateurs, compte tenu de l’ampleur des effectifs, alors qu’il restait quelques mètres devant, mais les sons ne portaient pas: ils paraissaient dramatiquement emprisonnés sur la scène. Si les cloches furent à peine audibles, ce n’était donc nullement du fait du chef titulaire et directeur artistique de l’Orchestre symphonique de la Principauté des Asturies depuis 1994 et, à ce titre responsable d’une très intéressante programmation 2009-2010, prévoyant notamment une Dixième et une Douzième « L’Année 1917 » de Chostakovitch (27 et 28 mai, et 4 et 5 mars 2010) ainsi que la création en Espagne de Paysage avec ruines de Philippe Hersant (12 mars 2010), dans des salles mieux adaptées, à Oviedo ou Avilés.


En quittant le théâtre, on fut soulagé de constater que le son et lumière réalisé dans la cour centrale n’avait finalement pas perturbé le concert. Les décibels n’allaient se déchaîner qu’après son issue, l’objectif semblant alors être de briser les tympans des spectateurs dans un éloge de la connaissance (« Conocimiento » affichés partout) aussi naïf que bruyant malgré de superbes jeux de lasers sur les façades néobaroques (du début des années cinquante) de Luis Moya Blanco.


Le site de l’Orchestre symphonique de la Principauté des Asturies



Stéphane Guy

 

 

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