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Désir et frustration

Bruxelles
La Monnaie
05/08/2009 -  et 9, 10*, 12, 13, 15, 16 (Bruxelles), 26, 27 (Luxembourg), 30, 31 (Rotterdam) mai, 3, 4, 5 (Antwerpen), 20 (Gent) juin, 19 (Brugge), 25, 26 (Mulhouse) septembre, 6 (Utrecht), 9, 10 (Marne-la-Vallée), 16 (Breda), 20 (Groningen), 23 (Amsterdam) octobre 2009
Kris Defoort: House of the sleeping beauties
Omar Ebrahim, Dirk Roofthooft (Old man), Katelijne Verbeke (Madam), Barbara Hannigan (The Woman), Susanne Duwe, Alice Foccroulle, Susanne Hawkins, Els Mondelaers (The Sleeping Beauties)
Asko/Schönberg, Patrick Davin (direction)
Guy Cassiers (mise en scène), Enrico Bagnoli, Arjen Klerx (mise en forme, scénographie, éclairages, vidéo), Sidi Larbi Cherkaoui (chorégraphie), Kaori Ito (danse), Tim Van Steenbergen (costumes)


(© Maarten Vanden Abeele)



Le vieux Eguchi se rend dans une maison close pour le moins particulière. Les clients, âgés, peuvent partager le lit d’une jeune fille nue, et endormie sous narcotique, avec une recommandation : ne pas la réveiller… Le roman de Yasunari Kawabata (1899-1972) a inspiré à Kris Defoort son deuxième opéra – le premier, The Woman who walked into doors, a été créé en 2001, également à la Monnaie. Le livret, à la fois érotique et poétique, a été rédigé, en anglais, avec le metteur en scène Guy Cassiers et Marianne Van Kerkhoven.


Si l’argument offre matière aux plus intimes réflexions, sur le temps qui passe, le souvenir des femmes aimées, le désir, la beauté et l’innocence, le spectacle, lent et esthétisant, peine à émouvoir. Les options retenues peuvent l’expliquer. Le vieillard est incarné par un acteur et un chanteur, tous deux très ressemblants, mais hélas plus quinqua que septuagénaires. Un quatuor vocal commente les événements, une soprano en offre une interprétation plus personnelle, quand elle ne représente pas les femmes aimées d’Eguchi, tandis qu’une danseuse, la seule japonaise sur le plateau, effectue des acrobaties chorégraphiques aériennes (Sidi Larbi Cherkaoui). Les échanges entre Eguchi et la tenancière, deux rôles tenus par des comédiens, sont quant à eux parlés avec un fond sonore à la Satie. Le reste n’est le plus souvent que monologue.


Le spectacle, à l’érotisme très dilué et cérébral, ne convainc donc qu’en partie alors que ce récit touchant regorge de tendresse, d’émotion et de nostalgie. Et de nudité, il n’en est question que dans le livret et les photographies du programme. Il aurait été malhabile de nier le contexte nippon de l’ouvrage : le dispositif scénique, aux lignes très épurées, évoque le pays du soleil levant mais l’intégration avec les éclairages et la vidéo, certes joliment réalisés mais trop rutilants voire encombrants, passe mal.


L’année dernière, avec l’Orchestre national de Belgique, Patrick Davin avait donné un avant-goût de l’ouvrage (voir ici). Sous sa direction, les vingt-deux musiciens de l’Asko/Schönberg, fusion récente des Ensembles Asko et Schönberg, défendent cette partition avec tout leur savoir-faire. Hormis dans la grandiloquente conclusion, pour le moins discutable, la musique, sans doute plus expressive que sensuelle, témoigne d’une remarquable maîtrise de la forme et des couleurs instrumentales. Le plus souvent foisonnante et concentrée, elle s’aventure subtilement et ponctuellement sur les terres du jazz et s’autorise même un pastiche, malgré tout un peu incongru, de musique baroque. Les amateurs de beau chant seront quant à eux ravis de la magnifique prestation de Barbara Hannigan, voix pure et cristalline. Dans le rôle du vieil homme, le baryton Omar Ebrahim, spécialiste de la musique contemporaine, se distingue lui aussi positivement tandis que les « belles endormies » Susanne Duwe, Alice Foccroulle, Susanne Hawkins et Els Mondelaers ne sont pas en reste.


Ce spectacle, produit avec le LOD de Gand et le Toneelhuis d’Anvers, et inscrit dans le cadre du Kunstenfestivaldesarts, sera repris cette année au Grand Théâtre du Luxembourg, au Rotterdamse Schouwburg, au deSingel d’Anvers, au Vlaamse Opera de Gand, au Concertgebouw de Bruges, à la Filature de Mulhouse, au Stadsschouwburg d’Utrecht, à la Ferme du Buisson de Marne-la-Vallée, au Chassé Theater de Breda ainsi qu’aux Stadsschouwburg de Groningue et d’Amsterdam. Les occasions de découvrir ce nouvel opéra ne manquent donc pas !



Sébastien Foucart

 

 

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