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Golaud et Mélisande

Paris
Opéra Comique
03/23/1999 -  et 25, 27, 29, 31 mars 1999
Claude Debussy : Pelléas et Mélisande
Philip Sheffield (Pelléas), Sophie Daneman (Mélisande), François Le Roux (Golaud), Christian Tréguier (Arkel), Sylvie Althaparro (Geneviève), Bruno Rostand (le Médecin), Un soliste de la Ménacanterie de Tölz (Yniold)
Choeurs de l'Opéra Comique, Orchestre de Paris, Georges Prêtre (direction)
Pierre Médecin (mise en scène), André Rheinhardt (décors et costumes)

Musicalement, la distribution de cette reprise surpasse largement celle de la production de l'an dernier. François Le Roux (Golaud) chante avec encore plus de brio, et une présence vocale aussi impressionnante que sa présence scénique. Il compose un Golaud attendrissant, sanguin sans être (vraiment) méchant, complexe - et intense de bout en bout, c'est-à-dire pendant deux heures trente de présence ininterrompue sur la scène, qu'il chante ou non. Sophie Daneman est une Mélisande convaincante. Elle peine un peu au début, sans doute à cause du trac et parce que la mise en scène l'oblige à chanter du fond du plateau, ce qui la rend parfois difficilement audible. Ses aigus sont un peu courts dans la scène de la Chevelure, mais elle a une belle voix, une excellente diction, et une certaine présence scénique (même si son jeu devra encore progresser). Elle a été excellente dans les deux derniers actes. Elle arrive à préserver l'ambivalence de Mélisande en chantant toujours avec une justesse d'intonation (est-elle innocente, fourbe, idiote, inconsciente ? Amoureuse ?) - justesse que son jeu vient parfois contredire dans les premiers actes. Le petit Yniold, chanté par un jeune soliste de la Ménacanterie de Tölz, est également remarquable : s'il lui arrive de manquer de puissance dans la scène du rocher, il reste d'une justesse époustouflante dans toutes ses interventions. C'est simple, on n'a jamais entendu un enfant chanter aussi bien le rôle d'Yniold. Christian Tréguier, plus encore que Sylvie Althaparro, s'acquittent enfin très bien des rôles d'Arkël et de Genevieve. Seule déception, mais de taille, Philip Sheffield n'était pas à la hauteur de Pelléas, ni comme chanteur, ni comme comédien. Il est vrai que son prédécesseur dans le rôle était tout aussi mauvais, sinon plus, mais cela se remarquait moins au milieu d'une distribution assez homogène dans la médiocrité. Philip Sheffield n'a pas une vilaine voix, mais il manque de puissance, d'aigus, de contrôle et de maturité musicale. Qu'a-t-il compris du rôle de Pelléas ? Difficile de le savoir. Avec lui, le rôle est une suite d'envolées lyriques, qui deviennent vite tout aussi lassantes que son nullissime "jeu" d'acteur, reposant sur une connaissance d'ailleurs limitée d'un ou deux poncifs de l'opéra : son jeu se résume à ouvrir grand les bras, en les ramenant de temps à autre sur son coeur en levant les yeux au ciel et en se dressant sur la pointe des pieds. Une jeunesse ébouriffée, excitée, telle que des vieux peuvent se la représenter. On se demande parfois qui dirige les chanteurs. Enfin, Georges Prêtre et l'Orchestre de Paris ont très bien joué, en couvrant parfois les voix, mais avec une grande intensité et un grand soin des timbres - nous laissant un bien meilleur souvenir que l'Orchestre National de France l'an dernier. La mise en scène reste toujours aussi intelligente, toujours aussi séduisante, mais, en caractérisant le sens de chaque mot équivoque, elle ferme finalement trop de possibles. Pelléas est un grand béta excité, Mélisande est foudroyé par l'amour dès leurs première rencontre et ne s'en cache pas. De ce fait, on comprend mieux Golaud. Certes. Si on préfère quand même les Pelléas plus ouverts, qui laissent plus de place au doute, on ne saurait cependant que trop conseiller d'aller voir cette mise en scène.



Stéphan Vincent-Lancrin

 

 

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