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La star Paris Salle Pleyel 03/18/2009 - et 19* mars 2009 Ludwig van Beethoven : Concerto pour piano n° 4, opus 58
Dimitri Chostakovitch : Symphonie n° 15, opus 141
Hélène Grimaud (piano)
Orchestre de Paris, David Zinman (direction)
David Zinman (© Prisca Ketterer)
Au milieu d’un agenda international chargé de façon impressionnante comme en témoigne son site, la star Hélène Grimaud faisait une étape les 18 et 19 mars à Paris pour le Quatrième concerto de Beethoven c’est-à-dire une interprétation non associée comme c’est trop souvent le cas à la sortie d’un disque, sa gravure dudit concerto au disque remontant à 1999 avec l’Orchestre philharmonique de New York sous la direction de Kurt Masur pour Teldec (voir ici). Ce jeudi la salle était encore parfaitement remplie, comme à l’habitude chaque fois que la pianiste aixoise se produit à Paris et ce malgré les difficultés de transport dues aux grèves. Le public venait à vrai dire essentiellement pour elle et non pour la Quinzième symphonie de Chostakovitch pourtant peu fréquente à l’affiche ou le vétéran américain David Zinman (73 ans), chef de la Tonhalle de Zurich, que l’on voit rarement à Paris (2007, 2003, 2000).
Le répertoire de la pianiste reste relativement étroit tant au concert qu’au disque. Il comporte, en dehors de Bach, des compositeurs essentiellement romantiques ou postromantiques, germaniques, et quasiment pas de musique de chambre ou d’auteurs français mais la dilection de l’artiste pour les grands concertos y est frappante. Une nouvelle démonstration en était donnée salle Pleyel puisqu’il s’agissait d’un des plus beaux du répertoire : le Quatrième de Beethoven (1808). La domination technique de la pianiste bientôt quarantenaire était encore une fois évidente ainsi que la remarquable clarté du discours, ligne correspondant tout à fait à celle de David Zinman mais la fantaisie ou l’ébaudissement n’était pas au rendez-vous notamment dans l’Allegro moderato initial, ample mais froid. Si l’Andante con moto central, lamentablement troublé par un concert concurrent de portables, fut marqué par une superbe péroraison finale du piano, l’ensemble et singulièrement le Rondo vivace pris avec beaucoup de retenue parut trop propre, trop suisse et sans conviction. Les rappels furent néanmoins nombreux mais la star habillée d’un superbe ensemble blanc aux larges basques refusa, avec le sourire, tout bis.
L’intérêt du concert allait surtout se manifester lors de sa seconde partie consacrée à la Quinzième symphonie de Chostakovitch, sa dernière (1971). Les notes du programme, dues à Marcel Marnat, nous contaient encore une fois l’histoire des relations conflictuelles du compositeur avec le régime soviétique et replaçaient la symphonie dans un ahurissant contexte politique mondial (élection d’Allende, indépendance du Bangladesh, etc.). Certes Chostakovitch eut maille à partir avec le régime mais il est le seul compositeur où le commentaire politique systématique, excessif et souvent anachronique finisse par occulter et parfois écraser sans à-propos l’œuvre strictement musicale. Laissons la chanter comme elle est sans chercher en permanence à l’expliquer par la glaciation soviétique même si elle a eu son importance dans son édification et son esthétique. D’ailleurs, la Quinzième symphonie, écrite par un homme malade, qui se permet ce qu’il veut, y compris des embardées dodécaphoniques, est plutôt moins crépusculaire que les deux précédentes. Elle évoque à travers de multiples tableaux manquant au demeurant de cohérence sinon de grandeur, le monde de l’enfance et offre de curieux clins d’œil à Rossini (ouverture de Guillaume Tell) et Wagner (leitmotiv « du Sort » de L’Anneau du Nibelung).
La difficulté d’interprétation résidait dans la gestion de l’imposante masse orchestrale et des différentes sautes d’humeur de la symphonie, l’œuvre passant de l’optimisme des mélodies populaires aux marches martiales comme du sarcasme au mauvais goût tonitruant et à la dépression. David Zinman se révéla ici parfaitement à la hauteur, moins cependant dans l’humour grinçant du premier mouvement que dans le deuxième, un Adagio à pleurer, les implacables Allegrettos ou les étonnantes sections rythmiques de l’ultime mouvement lesquelles faisaient parfois penser à Philip Glass. L’Orchestre de Paris suivit sans problème la direction méticuleuse du chef, le premier violon solo comme les percussions ou les trombones se révélant exceptionnels de justesse de ton, le violoncelle solo étant simplement un cran en dessous lors de l’Adagio.
Le site d’Hélène Grimaud
Le site de David Zinman
Stéphane Guy
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