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Présences parisiennes Paris Maison de Radio France 03/06/2009 - György Ligeti : Etudes pour piano n° 1 «Désordre» et n° 2 «Cordes à vide»
Michaël Levinas : Evanoui (création)
Serge Nigg : Fulgur
Bruno Mantovani : Concerto pour deux altos (création)
Michaël Levinas (piano, électronique), Antoine Tamestit, Tabea Zimmermann (alto), Benoît Meudic (réalisation informatique musicale IRCAM)
Orchestre philharmonique de Radio France, Pascal Rophé (direction)
Au cours de cette saison, «Présences», toujours sous la direction artistique de René Bosc, poursuit dans la voie de la décentralisation: sur les trois premiers week-ends de la dix-neuvième édition, seul un a eu lieu dans la capitale, les deux autres se tenant à Dijon puis à Metz. Mais pour la conclusion du festival, c’est le retour aux 104: le pluriel est de mise, car outre l’ancien studio 104 de la Maison de Radio France (devenu Auditorium Olivier Messiaen) pour les deux derniers week-ends, le CENTQUATRE qui inauguré en octobre dernier rue d’Aubervilliers accueillera «Présences électronique» du 13 au 15 mars.
C’est l’Orchestre philharmonique de Radio France qui donne deux des trois concerts de l’avant-dernier week-end: deux créations au programme du premier de ces concerts, sous la direction de Pascal Rophé, précédées chacune par une œuvre d’un compositeur récemment disparu et avec laquelle on ne pourra s’empêcher de chercher une hypothétique parenté. L’exercice n’est guère difficile en première partie: Michaël Levinas lui-même se met au piano pour les deux premières Etudes (1985) pour piano de Ligeti, avant la présentation de sa nouvelle pièce, intitulée Evanoui (2006). Différents représentants des cordes pincées (deux harpes, deux guitares, clavecin), auxquels sont associés trois synthétiseurs, piano et célesta, se détachent de l’orchestre traditionnel (sans hautbois ni bassons mais avec trois saxophones), relégué côté cour et disposé comme dans un miroir, tels ces premiers violons inhabituellement placés à droite du chef. Levinas déclenche quatorze minutes d’une sorte de gamelan infernal, qui, jouant sur différents diapasons, fait songer aux instruments délirants de Harry Partch, même si ce babil incessant et fascinant, toujours en mouvement, ne renie pas non plus son appartenance au courant spectral, pour s’achever sur des superpositions d’arpèges ponctuées par les rugissements du lion’s roar.
Le début de la seconde partie rend hommage à Serge Nigg (1924-2008), avec les seize minutes de Fulgur (1969), paroxystiques et sensuelles, brûlantes et intenses, puissantes et raffinées, fantastiques et oniriques – rêve ou cauchemar? De paroxysmes il est aussi question dans le Concerto pour deux altos (2008) de Bruno Mantovani, commande de Radio France, de l’Orchestre philharmonique de Liège et de la Radio de Cologne (WDR). L’effectif est rare, même si, sans remonter aux époques baroque et classique, Sofia Goubaïdoulina l’a expérimenté voici dix ans dans un concerto sous-titré Deux chemins (Une dédicace à Marie et Marthe). La partition s’ouvre sur près de cinq minutes confiées aux deux solistes, qui s’associent et se complètent ensuite face à un orchestre hostile et violent – interjections des cuivres, tutti tombant comme des couperets. Compositeur prolixe, brillant et couronné de succès, Mantovani s’est-il laissé dépasser par l’envergure de sa partition, comme Richard Dubugnon dans son récent Concerto pour violon (voir ici)? Car aussi admirablement défendues qu’elles l’aient été par Antoine Tamestit et Tabea Zimmermann, ces trente-neuf minutes d’un seul tenant évoquent curieusement le Penderecki des trente dernières années: les langages n’ont certes que peu en commun, mais le propos, prévisible et délayé, tend à l’académisme et à la grandiloquence.
Le site du Festival Présences
Le site d’Antoine Tamestit
Le site de Tabea Zimmermann
Simon Corley
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