About us / Contact

The Classical Music Network

Marseille

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Le gothique essuie un grain

Marseille
Opéra
02/17/2009 -  et 20, 22 (matinée), 25 février
Vincenzo Bellini: Il Pirata
Ángeles Blancas Gulín (Imogène), Murielle Oger-Tomao (Adèle), Giuseppe Gipali (Gualtiero), Fabio Maria Capitanucci (Ernesto), Ugo Guagliardo (Goffredo), Bruno Comparetti (Itulbo)
Orchestre et chœur de l’Opéra de Marseille, Pierre Iodice (chef du chœur), Fabrizio Maria Carminati (direction musicale)
Jamie Vartan (décors), Katia Duflot (costumes), Simon Corder (lumières), Stephen Medcalf (mise en scène)


Á. Blancas Gulín et G. Gipali (© Christian Dresse)


Il Pirata n'avait pas été représenté à Marseille depuis 1838. L'affiche faisait donc figure d'événement et l'objet de toutes les attentes. Si la mise en scène du Britannique Stephen Medcalf rassemblait peu de suffrages parmi le public, elle n'avait pourtant rien de choquant. Transposée au vingtième siècle dans un contexte de régime despotique armé jusqu'aux dents (l'idée est loin d'être nouvelle et elle finira par lasser), la mise en scène cohérente de ce mélodrame fait resurgir les délires du genre gothique, fort prisé par les romanciers romantiques anglo-saxons. Ces outrances, qui ont valu à M. Medcalf d'être voué aux gémonies par une partie du public marseillais trouvent pourtant leur légitimité dans Bertram, or the Castle of Saint Aldobrand de Charles Maturin, pasteur irlandais qui écrivait des romans appartenant à ce genre littéraire et dont s'inspire le livret du Pirata. Aussi, ne fallait-il pas s'étonner de voir, entre autres détails morbides, un cercueil s'ouvrir sur le côté libérant le corps d'Ernesto qui roule sur le sol, ou encore le cadavre sanguinolent de Gualtiero extrait du ventre de la scène, pendu par les pieds.


Sans obtenir un triomphe mémorable, la distribution est digne d'éloges. Giuseppe Gipali est plus à son aise dans le bel canto qu'il ne l'était sur cette même scène en 2008 en Riccardo de Un ballo in maschera (lire ici). La voix ne manque pas de charme, d'agilité et de vaillance et M. Gipali campe un Gualtiero très byronien, vaurien rejeté et incompris, rendant avec bonheur les aspects les plus sombres de sa personnalité. La soprano Ángeles Blancas Gulín, qui avait séduit les Marseillais en 2005 en Maria Stuarda (lire ici) possède très certainement les moyens vocaux du rôle d'Imogène. Pour autant, ce soir de prise de rôle, la voix nous a paru tendue, puissante, trop parfois, les aigus stridents, mais les graves superbes. L'interprétation musicale demande donc à être peaufinée. Mme Gulín est aussi une comédienne hors pair et elle signe la scène de sa folie avec une incontestable efficacité dramatique. Fabio Maria Capitanucci en Ernesto possède une voix de baryton au timbre suave mais la technique est un peu approximative dans les ensembles ou les passages ornementés. Son incarnation du tyran violent et sadique ne manque pas de justesse et Capitanucci sait se rendre lâche et méprisable.
Le reste de la distribution, Murielle Oger-Tomao, Ugo Guagliardo et Bruno Comparetti, rendent fière justice aux rôles d'Adèle, de Goffredo et d'Itulbo. Le chœur de l'Opéra de Marseille prend quelques libertés avec les départs sans pour autant entacher une exécution de très bon niveau.


Dans la fosse, la direction de Fabrizio Maria Carminati reste en retrait, laissant ainsi une place de premier plan au plateau. Signalons la bonne prestation de Marc Badin qui exécute avec talent le très mélodieux solo du cor anglais précédant la scène de la folie. Sans doute l'un de ces nombreux passages de l'œuvre de Bellini qui ont fait dire à Stravinsky: « Il a reçu la mélodie sans avoir eu la peine de la demander, comme si le Ciel lui avait dit : Je te donne tout juste ce qui manquait à Beethoven ».



Christian Dalzon

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com