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Brilliant idée? Paris Salle Pleyel 11/21/2008 - Alexander Warenberg : Concerto symphonie d’après la Symphonie n° 2 de Rachmaninov (création)
Serge Rachmaninov : Danses symphoniques, opus 45
Denis Matsuev (piano)
Orchestre philharmonique de Radio France, Vladimir Spivakov (direction)
Vladimir Spivakov
Si l’on y inclut la Rhapsodie sur un thème de Paganini, Rachmaninov a écrit cinq concertos pour piano. Un siècle après sa création, fallait-il adapter la Deuxième symphonie (1907) pour en tirer un sixième concerto? C’est en tout cas la conviction du directeur artistique de Brilliant classics, qui a confié la réalisation de cette idée à Alexander Warenberg (né en 1952), son ancien professeur de piano, par ailleurs compositeur et arrangeur. Ce Concerto symphonie est déjà paru chez Brilliant sous le titre «Concerto pour piano n° 5», mais c’était ici sa première présentation en concert, devant un public étrangement clairsemé pour un vendredi soir.
Le projet s’est entouré de solides cautions: une publication chez Boosey and Hawkes; un soliste reconnu pour ses interprétations de Rachmaninov, dont témoigne un récent disque d’œuvres rares enregistré sur le piano du compositeur (voir ici); le goût de Rachmaninov lui-même pour les transcriptions. Aurait-il toutefois été jusqu’à arranger une symphonie de Schumann, par exemple, pour en faire un second concerto pour piano?
Si le Troisième concerto de Tchaïkovski a servi à reconstituer une hypothétique Septième symphonie, c’est à l’exercice inverse que Warenberg devait se livrer ici. Pour ce faire, il s’est adossé à la structure du Troisième concerto, quasi contemporain: grande cadence dans le premier mouvement, section centrale rapide dans le deuxième mouvement. Mais passer de quatre mouvements à trois impliquait de résoudre une sorte de quadrature du cercle: outre une réduction de près du tiers de la durée de la Symphonie (il est vrai souvent donnée avec des coupures), différents thèmes sont donc passés à la trappe, à commencer par sans doute l’un des plus populaires, celui du Scherzo. En outre, la trame orchestrale originelle, déjà assez dense, supporte mal l’adjonction d’une partie supplémentaire aussi riche qu’un piano, dont l’écriture adopte d’ailleurs de façon caricaturale les procédés de Rachmaninov.
Dès lors, la confusion l’emporte et l’on se prend à regretter que se soit égaré dans une telle entreprise un musicien tel que Matsuev, qui confirme en bis tout son talent dans le Douzième (en sol dièse mineur) des treize Préludes de l’Opus 32 (1910) de Rachmaninov, même s’il se livre ensuite à une démonstration aussi bruyante qu’approximative dans l’arrangement par Grigory Ginsburg (1904-1961) de «Dans le hall du roi des montagnes» extrait de Peer Gynt (1876) de Grieg.
Retour au vrai Rachmaninov après l’entracte, avec ses Danses symphoniques (1940). Comme son aîné David Oïstrakh, Vladimir Spivakov ne s’est pas contenté d’une éclatante carrière de violoniste virtuose, car il s’est également fait connaître comme chef d’orchestre et occupe ainsi depuis 2003 les fonctions de directeur artistique et de chef principal de l’Orchestre national philharmonique de Russie. A-t-il concentré son travail de préparation sur la nouvelle partition présentée en première partie du concert? Toujours est-il que son interprétation ne renonce à une prudence excessive que pour rouler des mécaniques, jusque dans ce retentissant coup de tam-tam final, qu’il laisse longuement résonner. Mais cela n’empêche pas l’Orchestre philharmonique de Radio France de tirer remarquablement son épingle du jeu.
Le site de Denis Matsuev
Simon Corley
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