About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Eloge du geste

Paris
IRCAM (Espace de projection)
11/13/2008 -  
Sebastian Rivas : Orbis Tertius (création) (*)
Franck Bedrossian : Tracés d’ombres
Florence Baschet : StreicherKreis (création) (**)
Wolfgang Rihm : Quatuor n° 9 «Quartettsatz»

Quatuor Danel: Marc Danel, Gilles Millet (violon), Vlad Bogdanas (alto), Guy Danel (violoncelle) – Benjamin Thigpen (*), Serge Lemouton (**) (réalisation informatique musicale)


Le Quatuor Danel (© Derek Trillo)


La saison de l’IRCAM propose notamment un cycle de trois concerts consacrés au quatuor à cordes avec électronique, qui permettra d’entendre le Quatuor Diotima le 5 février puis, dans le cadre du Festival Agora, le Quatuor Arditti le 19 juin. La soirée inaugurale aura déjà permis de balayer un certain nombre de clichés: d’une part, non seulement le Quatuor Danel n’est pas belge, mais il ne joue pas que Chostakovitch; d’autre part, la musique contemporaine fait recette, puisque l’espace de projection aura tout juste suffi à accueillir un public d’une moyenne d’âge bien inférieure à celle des autres salles parisiennes. Baptisé «Démanché», le programme associait la reprise de deux pièces récentes et deux créations faisant appel à l’informatique.


Orbis Tertius de Sebastian Rivas (né en 1975), réalisé avec le Centre international de recherche musicale (CIRM) de Nice, constitue la troisième et dernière partie, dédiée à Ivan Fedele, d’un triptyque comprenant par ailleurs Tlön et Uqbar. Mis bout à bout, les titres forment celui d’une nouvelle de Borges traitant de la question de la perception. Le Franco-Argentin livre ici plus d’un quart d’heure d’une musique rugueuse et éruptive, suite de crissements et crépitements fantastiques que le dispositif électroacoustique en temps réel colore très discrètement, par écho, résonance, amplification ou déformation.


C’est également à l’un de ses maîtres (Allain Gaussin) que Franck Bedrossian (né en 1971) a dédié les trois brefs mouvements (un peu plus de dix minutes) de Tracés d’ombres (2005/2007). Si l’intention («errements d’une voix humaine et sa hantise du silence») évoque les préoccupations d’un Beckett, la réalisation, sans le secours de l’électronique, n’en est pas moins spectaculaire et virtuose. Le schéma traditionnel vif/lent/vif laisse en effet s’exprimer un discours extrêmement mobile et tendu, d’une très grande difficulté d’exécution et dans lequel le recours aux sonorités saturées pourra paraître un peu trop systématique.


Florence Baschet (née en 1955) a travaillé avec l’IRCAM pour écrire StreicherKreis. Littéralement, le titre fait référence à un «cercle de cordes», mais elle préfère parler de «cercle de ceux qui jouent des instruments à cordes frottées». Cercles également que ces trois enroulements successifs d’une spirale vers son centre, «superposant ainsi trois cycles sonores». Le compositeur décrit la partition comme un «quatuor augmenté», car grâce à six «capteurs gestuels miniaturisés» placés sur les archets et à des bracelets autour du poignet, le jeu des Danel interagit en temps réel sur le son. Beaucoup de bruit pour rien? Sans aller jusque là, ces vingt-cinq minutes ne renouvellent guère l’écriture pour quatuor et, surtout, bénéficient d’un apport fort modeste du «dispositif électronique live», qui semble cantonné à quelques sourds grondements et effets de réverbération.


Le Neuvième (1993) des douze Quatuors de Rihm est sous-titré «Mouvement de quatuor»: de fait, il se présente d’un seul tenant. Pas d’informatique, et même des allusions tonales, mais un éloge du geste en harmonie avec les trois œuvres précédentes: un flux torrentiel d’une grande densité, qui parvient même à intégrer les silences, interrompu par de rares pauses contemplatives et trouvant son exutoire dans des paroxysmes expressifs. L’épuisement – pas celui du Quatuor Danel, qui répond aux exigences physiques de ces vingt-trois minutes – finit toutefois par l’emporter, sur quelques notes hagardes de l’alto.


Le site du Quatuor Danel



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com