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Thielemann : un héritier

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
05/23/2008 -  et 22 (Berlin), 25 (Köln) mai 2008
Robert Schumann : Ouverture de Manfred, op. 115 – Symphonie n°4 en ré mineur, op. 120
Johannes Brahms : Concerto pour violon en ré majeur, op. 77

Gil Shaham (violon)
Orchestre philharmonique de Munich, Christian Thielemann (direction)


Après Bruckner à Baden Baden, Schumann et Brahms à Paris. On n’attendra pas de Christian Thielemann qu’il sorte du répertoire germanique. Ni qu’il s’intéresse aux tentatives de renouvellement de l’interprétation des partitions romantiques. Ce n’est pas un fils rebelle, c’est un héritier. D’une certaine tradition allemande – plus celle de Furtwängler que celle de Klemperer, pas si proche que cela non plus d’un Karajan, qui avait aussi son côté Toscanini. L’ouverture de Manfred se veut ample, grandiose, théâtrale aussi, faisant valoir l’homogénéité d’un orchestre dont il tire une pâte sonore digne de son prédécesseur Celibidache. Mais cela va de pair avec un enveloppement de la sonorité et une liberté agogique qui peuvent dérouter les partisans d’une direction plus analytique, plus moderne.


Le Concerto pour violon de Brahms l’oblige à serrer le tempo de plus près, sans se départir de cette puissance et de cette opulence de la sonorité. Cela dit, on sent que le chef n’est peut-être pas naturellement accompagnateur : quand le soliste joue, on le dirait moins présent, moins habité. A moins qu’il ne veuille laisser s’épanouir le superbe violon de Gil Shaham. La rondeur du son, la finesse du jeu, la richesse des couleurs, l’éventail dynamique (qui fera merveille dans le Bach donné en bis) sont autant de preuves de la maîtrise de l’instrument, qui en font un des plus beaux interprètes actuels du Concerto, dont il a laissé une superbe gravure sous la direction de Claudio Abbado (DG).


La Quatrième Symphonie de Schumann montre un Thielemann parfaitement lui-même, toujours aussi libre par rapport à la partition. Il dirige décidément Schumann comme Bruckner, bâtissant une sorte de Walhalla sonore dans le « Ziemlich langsam » initial, dont les cordes constituent le fondement – c’est une des caractéristiques de sa direction. Sans lourdeur cependant, grâce à une tension rythmique sans cesse maintenue malgré les libertés agogiques, par exemple dans les accords du développement. La liberté le conduit, dans la Romance, à des abandons parfois un peu complaisants ; la sonorité, du coup, a tendance à s’épaissir. L’œuvre baigne alors dans une sorte d’hédonisme capiteux, avec une transition entre le Scherzo et le Finale très savamment dosée dans le crescendo. Ce Finale concilie la puissance et la jubilation, ménageant des plages de lyrisme plus intériorisé où l’infléchissement du tempo irrite les puristes. Ce n’est pas un Schumann mendelssohnien que dirige le chef, décidément à l’opposé d’un Gardiner ou d’un Herreweghe, mais plutôt straussien, revu à travers les exaltations de la fin du siècle – Schumann n’est-il pas, après tout, un musicien de l’ego ? On peut aimer ou détester, mais cela en impose.


En bis, l’ouverture de Hermann et Dorothée de Schumann, qui ravit le public par les échos de la Marseillaise, et où se confirme l’entente entre le Kapellmeister et l’un des meilleurs orchestres d’Allemagne.


Avec ses excès, totalement assumés, Christian Thielemann renoue avec la tradition des chefs inspirés, pour le meilleur et pour le pire, diront ses détracteurs – on sait qu’une partie de la critique française, par exemple, le prise assez peu.



Didier van Moere

 

 

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