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Esbroufe

Paris
Auditorium du Louvre
03/05/2008 -  
Franz Liszt : Après une lecture de Dante (extrait des «Années de pèlerinage»)
Ludwig van Beethoven : Sonate pour piano n° 23 «Appassionata», opus 57 – Variations sur une valse de Diabelli, opus 120

Giovanni Bellucci (piano)


Quoi de neuf? Beethoven, bien sûr. Sans le moindre «anniversaire» en perspective... ni la moindre concertation, deux grands musées parisiens se lancent chacun presque au même moment dans une opération de grande envergure: Orsay accueillera à compter du 15 mars six week-ends de concerts gratuits «Portes ouvertes» de Radio France sur le thème «Beethoven et la musique française du XIXe siècle», tandis que le Louvre présente jusqu’au 3 avril, sous l’emblème kagélien «Ludwig van», un double cycle de sept concerts et de trente séances de musique filmée, elles-mêmes sous-titrées «Beethoven et ses métamorphoses».


Ces festivités se sont ouvertes dès le 3 mars par une projection – la Cinquième symphonie dirigée par Leonard Bernstein puis par Carlos Kleiber – mais c’est à Giovanni Bellucci qu’il revenait d’inaugurer une série de récitals et de musique de chambre qui présentera des interprètes attendus (Jean-François Heisser, Alexander Kobrin, Jean-Frédéric Neuburger,...) et s’ouvrira à d’autres que Beethoven: au cours d’une prometteuse soirée-débat, Philippe Manoury sera en effet associé à quelques-uns des compositeurs ayant écrit, plus modestement que Beethoven, des variations que l’éditeur Diabelli leur avait commandées, en 1822, sur une petite valse de son cru.


Le jeune Liszt, alors tout juste âgé de onze ans, avait contribué à ce recueil, une bonne dizaine d’années avant de commencer à se confronter lui-même au maître de Bonn au travers d’arrangements pour piano de ses Symphonies. Bellucci a choisi de commencer par la dernière pièce de la Deuxième (1849) des Années de pèlerinage, Après une lecture de Dante: un piano spectaculaire, tenant de l’orgue ou de l’orchestre, n’hésitant pas à affronter la démesure et le risque technique, mais ayant tendance à abuser de la pédale.


Si Liszt a intitulé cette page «Fantasia quasi Sonata», Beethoven avait lui-même sous-titré ses deux Sonates de l’Opus 27 «Quasi una fantasia». Dans la Vingt-troisième sonate «Appasionata» (1806), le pianiste italien demeure d’ailleurs très proche de cet esprit d’improvisation tant, indépendamment de ses trop fréquentes approximations, il prend de libertés avec le texte et le tempo. L’Allegro initial est certes marqué assai et l’Andante central con moto, mais faut-il pour autant aller jusqu’à confondre élan et précipitation? Heurté et incohérent, peu regardant quant à l’exagération des effets, ce piano de bateleur d’estrade mise sur quelques intuitions fulgurantes mais pèche par manque d’articulation, abondance de décibels, complaisance et maniérisme.


En seconde partie, dès la défiguration du thème des Variations «Diabelli» (1823), l’auditeur est fixé sur son sort. Davantage même qu’une déconstruction à la Gould, c’est en effet l’arbitraire qui domine, alors même que Bellucci s’encombre d’une partition dont il a parfois du mal à tourner les pages: respect anarchique et aléatoire des reprises (l’exécution ne dépasse pas quarante minutes), tempo faisant sans cesse le yoyo à l’intérieur même de chaque variation. Quelques semaines plus tôt au Châtelet (voir ici), Stephen Kovacevich avait pourtant démontré, avec une précision au demeurant bien supérieure tout en jouant par cœur, qu’il était possible d’être visionnaire sans devenir incompréhensible, d’éclairer sans surligner, d’innover sans verser dans l’excentricité, de servir la musique sans faire un sort à chaque mesure, de démonter le mécanisme pour ensuite mieux le remonter.


Pas de routine, certes, chez Bellucci – mais quelle routine pourrait-il y avoir dans les Diabelli? – et, même s’il vit le moment avec une intensité clairement perceptible, ahanements compris, l’on va de (mauvaise) surprise en (mauvaise) surprise. A-t-il voulu replacer l’auditeur dans le contexte de l’époque, certains n’étant alors pas loin de considérer que Beethoven était devenu fou? Toujours est-il que par-delà l’exaltation d’une certaine virtuosité à laquelle un tel monument ne saurait être réduit, il est difficile de suivre une conception aussi erratique. Le retour à Liszt, en bis, avec la Paraphrase de concert sur «Rigoletto» (1859), n’abandonne hélas pas le registre histrionique.


Le site de Giovanni Bellucci



Simon Corley

 

 

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