About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Est, Ouest, Nord

Paris
Hôtel national des Invalides
02/11/2008 -  
Lepo Sumera : Pala aastast 1981 – Liblikas, kes ärkas talvel üles
Urmas Sisask : Tähistaeva tsükkel I Pohjataevas, opus 10 (extraits)
Arvo Pärt : Aliinale – Variatsioonid Arinushka tervenemise puhul
Eino Heller : Kellad
Erkki-Sven Tüür : Sonate pour piano

Heli Jakobson (piano), Lutgart Van Ballaer (récitante)


2008 marque le quatre-vingt-dixième anniversaire de l’Estonie: une histoire riche en vicissitudes, couronnée en 2004 par une adhésion à l’Union européenne. Quelques jours après la première parisienne de la Cinquième symphonie d’Eduard Tubin (voir ici), il n’y a décidément plus de raison d’ignorer la musique de ce pays, qui, bien que guère plus ancienne que la proclamation de l’indépendance (24 juillet 1918) , a rapidement trouvé une voie (mais aussi une voix) distincte et originale, ouverte par les «pères fondateurs» Rudolf Tobias, Artur Kapp et Artur Lemba, comme si elle offrait par avance une réponse aux querelles stériles autour de l’(a)tonalité.


Pour fêter ces neuf décennies, l’ambassade d’Estonie s’associe à différentes manifestations et organise quatre récitals de piano au grand salon de l’Hôtel national des Invalides. Après Ivari Ilja le 21 janvier dernier, avant Peep et Sten Lassmann (23 mai) puis Irina Zahharenkova (27 juin), Heli Jakobson, quant à elle, va au-delà du concert traditionnel: vivant depuis quelques années en Belgique, la pianiste y a fait la connaissance de Lutgart Van Ballaer et propose avec elle un véritable spectacle de plus d’une heure, faisant alterner dans des correspondances musico-littéraires un florilège de la musique estonienne pour piano avec des textes et poésies traduits en français, pendant que sont projetées sur un écran les photographies de Fred Jüssi, éloges de la nature et des paysages estoniens.


Les écrivains – Jaan Kaplinski (né en 1941), Arvo Valton (né en 1935) – disent avec humour et ironie la situation d’un pays enfermé à son corps défendant dans le glacis soviétique («L’Est est parfois plus occidental que l’Ouest», titre de cette soirée) et dont les habitants ont ensuite du mal à apprendre à dire «non»: «Quand on regarde vers le nord, le cœur est à l’ouest» – mais la musique suit son propre chemin. Dès Les Cloches (1929), Eino Heller (1887-1970) impose l’ostinato, bien avant que les Américains (Reich, Glass, Adams) ne recourent à des techniques comparables, et sans empêcher une mélodie d’une grande simplicité de se détacher des volées campanaires.


Les générations suivantes jouent également de la répétition et des sonorités tintinnabulantes. C’est évidemment le cas d’Arvo Pärt (né en 1935), même si Pour Alina (1976) et les Variations pour la guérison d’Arinushka (1977) cultivent davantage un minimalisme planant. Trop tôt disparu, Lepo Sumera (1950-2000) a peu écrit pour le piano, ce que font regretter La Pièce de l’année 1981 – première d’un diptyque dont le second volet (Pardon, Fryderik!) sera donné le 23 mai – ou même, pour les enfants, dans Le papillon qui s’éveilla en hiver (1982), où s’insinue un thème populaire.


Mais c’est aussi une musique en phase avec les éléments et les forces de la nature: la fluidité du Presto initial de la Sonate d’Erkki-Sven Tüür (né en 1959) s’inscrit ainsi parfaitement dans la suite d’un poème de Betti Alver (1906-1989) suggérant l’eau, sans cesse changeante tout en semblant immobile, tandis que le Lento central possède une puissance d’ordre tellurique.


Une musique également rétive aux oukases esthétiques, aux classements et aux catégories: Pärt ne craint pas la simplicité la plus provocatrice, Tüür fut le fondateur d’un groupe de rock. Quant à Urmas Sisask (né en 1960), sa passion pour les astres rappelle Crumb ou Stockhausen, envahissant toute son œuvre: entamé en 1987, son cycle Ciel étoilé se décompose en Ciel des étoiles du nord et Ciel des étoiles du sud, le premier comptant déjà huit livres. Tirées du Troisième, Andromeda et Force évoquent respectivement le tonnerre et l’arc-en-ciel; au sein du Sixième, Les Pléiades offrent sept brefs «moments musicaux», tandis que le Septième recèle une délicieuse Canis minor – Confusion, en phase avec le comique surréaliste de Valton. Dommage que le langage apparaisse moins profond que celui de Sumera ou de Tüür, notamment par excès de références, de Bartok à Nyman.


Le site de Heli Jakobson
Le site du Centre estonien d’information musicale
Le blog «Musica estonica»
Les manifestations du quatre-vingt-dixième anniversaire de l’Estonie



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com