About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Voilà justement ce qui fait que votre fille est muette

Paris
Salle Pleyel
01/20/2008 -  et 29, 30 novembre (Suresnes), 4 (Saint-Quentin-en-Yvelines), 7 (Bonneuil-sur-Marne) décembre 2007, 7 (Villeparisis), 8 (Villeneuve-Saint-Georges), 10 (Alfortville) février 2008
Marc-Olivier Dupin : La Princesse Kofoni

Dominique Reymond*/Frédérique Bruyas (récitante)
Orchestre national d’Ile-de-France, Christophe Mangou (direction)


Avant que l’Orchestre national d’Ile-de-France et son chef Christophe Mangou n’entrent en scène, la Salle Pleyel s’emplit d’un brouhaha plus aigu qu’à l’ordinaire. C’est qu’une nuée de têtes blondes a singulièrement abaissé la moyenne d’âge en ce dimanche matin: repris huit fois depuis novembre et jusqu’en février, le conte musical La Princesse Kofoni faisait en effet étape à Paris. Créé en 2006, le spectacle a été conçu par une équipe constituée de longue date, notamment à l’ONDIF où elle a déjà produit Robert le Cochon: le compositeur Marc-Olivier Dupin, par ailleurs directeur général de l’orchestre, et l’écrivain Ivan Grinberg, auteur d’un texte au surréalisme particulièrement goûteux, même si seuls les adultes peuvent sans doute en apprécier toute la saveur.


Dans ce royaume où un tuba vu d’en haut ressemble à un soleil, on croise en outre des frontières qui ont tout de bêtes sauvages, aussi apeurées que dangereuses, mais aussi des instruments, tels que le tuba ou le piccolo, qui ingurgitent ou régurgitent des personnages. Bien entendu, il y a un roi et une reine, il y a des gentils, beaucoup de gentils, et il y aussi un méchant, le grand chancelier Dezékerr – mais tout se termine bien, puisqu’il est englouti par son orchestre. Entre-temps, la princesse Kofoni, qu’il avait rendue muette dès sa naissance, rencontrera l’amour grâce au tubiste Wuturi et, belle morale, retrouvera sa voix grâce à la musique. Une aventure qui rappelle celle de Joseph, le pioupiou violoniste de L’Histoire du soldat de Stravinski et Ramuz, auquel le livret ne manque pas d’adresser un clin d’œil («A beaucoup marché»), le thème de la jeune fille muette étant d’ailleurs un grand classique du conte et du théâtre, comme dans Le Médecin malgré lui de Molière («Voilà justement ce qui fait que votre fille est muette»).


En récitante au timbre à la fois musical et flexible, Dominique Reymond s’illustre dans un tout autre registre que celui du film qui l’a révélée au grand public, Y aura-t-il de la neige à Noël? (1996) de Sandrine Veysset. Si la voix se plie sans peine à toutes les difficultés – récitation en mesure, accouchement spectaculaire, cris d’animaux, injonctions du grand chancelier, «gazouillis» de la princesse se réveillant de son long silence – le corps se met également en mouvement avec une souplesse imparablement suggestive pour évoquer les caprices ou le battement de la queue des deux royales ânesses jumelles, Elise et Liza.


Marc-Olivier Dupin utilise avec une grande habileté un effectif de trente-neuf musiciens: sur une trame tonale se greffent bruitages et autres procédés contemporains, mais aussi de très brèves citations (la Pastorale de Beethoven, les concertos pour violon de Mendelssohn et Tchaïkovski, Siegfried de Wagner, la Fantastique de Berlioz, la Pizzicato-Polka des Strauss, …). La réussite d’une œuvre destinée aux enfants, c’est de se frayer un chemin entre niaiserie et complexité, ce à quoi cette série d’exercices de style (berceuse, valse, habanera, nocturne) ou de morceaux de bravoure (voyage au centre d’un tuba, fugue équine, chevauchée des ânesses) parvient avec brio et finesse.


Compte tenu de la durée du spectacle (près d’une heure) et de son ambition, les enfants en tireront le meilleur parti autour de l’âge de huit ans, mais les plus jeunes rêveront à un univers de princesses, prendront un bain musical et feront plus ample connaissance avec le piccolo et le tuba. Et, une fois rentrés chez eux, ils pourront prendre le temps de se pencher plus longuement sur un programme de salle présenté sous la forme d’un astucieux lexique, de A comme «ânesses» à W comme «Wuturi».



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com