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Allez les Verts!

Paris
Salle Pleyel
01/19/2008 -  
Johannes Brahms: Quatuor avec piano n° 1, opus 25 (orchestration Arnold Schönberg)
Richard Strauss: Ein Heldenleben, opus 40

Orchestre de l’Opéra national de Paris, Christoph von Dohnanyi (direction)


Nous sommes en 1998: Marek Janowski va bientôt quitter le Philharmonique de Radio France, tandis que Semyon Bychkov laisse la place, à l’Orchestre de Paris, à un «conseiller musical et premier chef invité», Christoph von Dohnanyi. Dix ans plus tard, les hasards du calendrier font que ces trois chefs se succèdent dans la capitale: Janowski mercredi et jeudi (voir ici), Bychkov (voir ici) et Dohnanyi avec l’Orchestre de l’Opéra national de Paris.


Mais parler de «l’Orchestre de l’Opéra» n’a guère de sens. En effet, celui-ci ayant vocation à assurer au même moment deux spectacles requérant parfois dans l’une et l’autre salle des effectifs très importants, il est en réalité constitué de deux formations, chacune s’étant vu attribuer une couleur: les «bleus» «feront» donc prochainement La Femme sans ombre et Cardillac, tandis que les «verts», avant de se consacrer à Parsifal et à Luisa Miller, ont donné le troisième des cinq concerts symphoniques que propose l’Opéra cette saison. Cinq seulement, mais dont trois ont lieu Salle Pleyel: une migration plus que bienvenue, car l’expérience a montré que les immenses volumes de Bastille nuisent autant aux instruments qu’aux voix.


Au-delà de ce changement de lieu, c’est pour les musiciens une occasion de sortir de leur cadre habituel pour défendre une réputation d’excellence, puisqu’il se dit toujours qu’un trésor est enfoui dans la fosse de Garnier ou de Bastille: un défi manifestement relevé, et même très largement dépassé, tant leur prestation confirme de façon incontestable leur statut de meilleur ensemble parisien. On peut bien évidemment rencontrer ailleurs ce plaisir de jouer, ces bois précis et agiles, ces cuivres clairs et irréprochables, mais où dispose-t-on de cordes aussi homogènes, justes et profondes? Pouvoir envisager de parler de «niveau international» pour un orchestre français est assez rare pour ne pas se refuser cette fois-ci un tel plaisir.


Dohnanyi n’y est évidemment pas pour rien: les explications les plus simples n’étant pas nécessairement les moins pertinentes, il y a sans nul doute chez lui un gène brahmsien, son grand-père Ernö Dohnanyi (1877-1960) ayant été dans sa jeunesse l’un des héritiers stylistiques de Brahms. Qu’importe, après tout, car dans l’orchestration par Schönberg (1937) du Premier quatuor avec piano (1861), l’attelage formé par le chef et l’orchestre se révèle insurpassable. Très en faveur ces dernières années à Paris – Albrecht et son Philharmonique de Strasbourg en octobre 2006 (voir ici), puis Chung et son Philhar’ quelques semaines plus tard (voir ici) – cet étrange et fascinant exercice se révèle d’une grande difficulté d’exécution, non pas seulement en raison du brio de l’instrumentation, mais en ce qu’il mêle admiration et irrévérence, sérieux et plaisanterie, bon goût et mauvais goût. Avec Dohnanyi, qui a enregistré l’œuvre avec la Philharmonie de Vienne (Decca), tout y est: les ombres et la couleur, la densité et la transparence, la tension et la souplesse, un véritable régal sonore naviguant avec bonheur parmi les écueils – décoratif, pesant, excessif – qui menacent dans cet océan de musique. Ce n’est certes pas la «Cinquième symphonie de Brahms», qualificatif plaisant que Schönberg avait lui-même forgé, mais comment ne pas rester confondu devant tant de chaleur et de virtuosité?


Avec Une vie de héros (1898) en seconde partie, le programme s’annonçait copieux: d’autres que Dohnanyi n’auraient sans doute pas évité l’indigestion, mais rien de tel avec ce grand straussien qu’est le chef allemand. Si l’allure générale est assez vive (quarante-trois minutes), la gestion du temps se révèle un modèle du genre. Capiteux sans forcer sur l’épaisseur, raffiné sans aller jusqu’à l’écœurement, spectaculaire mais sans céder aux effets faciles, l’interprétation parvient même à mettre en valeur des moments d’esprit chambriste. Et le feu d’artifice instrumental se poursuit, à commencer par le parfait solo de Maxime Tholance, violoniste fin et précis.



Simon Corley

 

 

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