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Miniature ravélienne Paris Athénée – Théâtre Louis-Jouvet 11/16/2007 - et 17, 18, 19 novembre 2007 Maurice Ravel : L’Enfant et les sortilèges (arrangement Didier Puntos)
Thomas Dolié (Le fauteuil, L’arbre), Kareen Durand (Le feu, La pastourelle, Le rossignol, La chouette), Delphine Galou (La mère, La tasse, La libellule), Simon Jaunin (L’horloge, Le chat), Gaële Le Roi (L’enfant), Jean-Louis Meunier (La théière, Le petit vieillard, La rainette), Sandrine Sutter (La bergère, Le pâtre, La chatte, L’écureuil), Katia Velletaz (La princesse, La chauve-souris)
Didier Puntos, Frédéric Jouannais (piano), José-Daniel Castellon (flûte), Valérie Dulac (violoncelle)
Patrice Caurier et Moshe Leiser (mise en scène), Christian Rätz (décors), Patrice Caurier (costumes), Christophe Forey (lumières)
En coproduction avec les opéras d’Angers-Nantes et Rennes, et avec le soutien de l’Arcadi, le Théâtre de l’Athénée reprend pour cinq représentations la production de L’Enfant et les sortilèges (1925) de Ravel créée en 1989 par l’Atelier d’interprétation vocale de l’Opéra national de Lyon. Donné à près de deux cents reprises en France et dans le monde, ce spectacle remporte à nouveau un succès mérité, devant un public où bon nombre des spectateurs ont l’âge du héros de la «fantaisie lyrique» conçue par Colette.
Didier Puntos a adapté la partition en parvenant (presque) à faire oublier les sortilèges de l’orchestration ravélienne: point de hiatus lorsque retentit un bref extrait de la «Danse des rainettes» dans sa version originale. L’effectif est pourtant restreint à un piano (à quatre mains), installé côté jardin, auquel se joignent deux autres musiciens: une violoncelliste et un flûtiste (qui tient également le piccolo ainsi que l’indispensable flûte à coulisse), les huit chanteurs constituant en tant que de besoin le chœur.
Patrice Caurier et Moshe Leiser ont effectué un travail de mise en scène à la fois drôle et poétique: on n’est pas près d’oublier, dans le premier registre, le duo de la théière et de la tasse chinoise ou bien celui des chats, mais la veine expressive n’est pas en reste, soutenue par de superbes éclairages de Christophe Forey. Et quelle virtuosité dans la lutte avec l’arithmétique!
Le décor unique de Christian Rätz – révélé lorsque la montée du fin rideau de scène marque, après le départ de la mère, le basculement dans le fantastique – ne néglige aucun des éléments-clefs de la première partie, de l’horloge à la tapisserie, mais avec le recul de l’adulte et la déformation du rêve (ou du cauchemar). Les costumes de Patrice Caurier privilégient les références à l’époque de la composition et, dans la seconde partie, se contentent de suggérer plutôt que d’essayer de reproduire fidèlement les animaux.
L’accompagnement réduit permet aux protagonistes de ne pas forcer la voix, mais leur impose en même temps de veiller encore plus que de coutume à l’intelligibilité du texte: tous y parviennent, à commencer par Gaële Le Roi, en insupportable rouquin sachant néanmoins émouvoir lorsqu’il constate qu’il n’a pu sauver la princesse de ses contes. Parmi les nombreux rôles que chacun des sept autres solistes doit assurer, il faut retenir Delphine Galou en vamp irrésistible (la tasse), Kareen Durand en petit ramoneur (le feu), Thomas Dolié en arbre, Katia Velletaz en chauve-souris (davantage qu’en princesse), Jean-Louis Meunier en rainette qu’une paire de lunettes et des gants rendent plus vraie que nature, Simon Jaunin et Sandrine Sutter en chats aux ébats plus que suggestifs.
Un spectacle de poche, certes, mais dont le format ne nuit nullement au caractère parfaitement abouti et fidèle à l’esprit de Ravel, amateur de miniatures, de bibelots et de mécanismes de précision.
Simon Corley
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