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Rare chef-d'œuvre

Lyon
Opéra national de Lyon
11/04/1998 -  et 7, 9, 11, 13, 15* novembre 1998
Paul Dukas : Ariane et Barbe-Bleue
Françoise Pollet (Ariane), Nadine Denize (La Nourrice), Chris de Moor (Barbe-Bleue), Marie-Thérèse Keller (Selysette), Maryline Fallot (Ygraine), Sophie Fournier (Mélisande), Alketa Cela (Bellangère), Jérôme Varnier (un vieux paysan)
Orchestre et Choeur de l'Opéra national de Lyon, Louis Langrée (direction)
Patrice Caurier, Moshe Leiser (mise en scène)

Il y a pire que le compositeur-chef d'orchestre, qui n'écrit que pendant son temps libre et nous prive ainsi de chefs-d'oeuvre potentiels, c'est le compositeur-critique musical. Trop analytique et trop sévère par rapport à son propre travail, il brûle une grande partie de ce qu'il a pourtant écrit ! Critique musical pendant quarante années, Paul Dukas (1865-1935) devait se chauffer l'hiver avec ses partitions. Certains hivers étant plus courts que d'autres, il nous reste quelques chef d'oeuvre (L'Apprenti sorcier, La Péri, la Sonate pour piano en mi bémol mineur et, surtout, Ariane). Dukas aurait pourtant du comprendre l'utilité des pièces moyennes ou "de jeunesse" qui ainsi rehaussent les autres et permettent aux critiques-non compositeurs de se défouler en attendant de se pâmer pour celles que la postérité gardera (quand ils voient juste…). Tant pis pour lui et son oeuvre reste encore peu jouée et sous-estimée aujourd'hui.

Ariane est donc un opéra magnifique : l'orchestre, rutilant et capiteux, jamais lourd, dessine des arches sur lesquelles viennent se poser les lignes amples et tendues de la mezzo-soprano. Le rôle principal se situe toujours aux limites de la tessiture (il est souvent distribué à une soprano, comme ici) et réclame une grande endurance qui ne doit cependant pas transparaître. Françoise Pollet y parvient parfaitement en sachant garder une voix souple et claire tout au long des trois actes du drame de Maeterlinck. Soutenant l'édifice à elle toute seule (Barbe-Bleue n'intervient qu'au premier acte), seulement secondée par sa nourrice (irréprochable Nadine Denize), Ariane est l'un des rôles les plus écrasants du répertoire.

Conte sur le refus de la délivrance - les cinq femmes de Barbe-Bleue refusent la liberté que leur offre Ariane - Ariane et Barbe-Bleue s'attache à décrire l'enfermement mental ("On ne pourrait pas fuir ; car tout est bien fermé, et puis c'est défendu" dit l'une des femmes, Sélysette). Le dispositif scénique de Caurier et Leiser se révèle d'une grande intelligence : des colonnades emplissent les murs latéraux et le plafond, puis le fond de la scène à la fin de l'opéra, refermant ainsi définitivement la prison, les portes découvrant les pierres précieuses - des pans du décor qui s'entrouvent - n'agissant que comme des leurres. Avec un orchestre fabuleux et un Louis Langrée en état de grâce, "personne ne veut être délivré", et surtout pas le spectateur !



Philippe Herlin

 

 

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