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Atout chœur

Paris
Salle Pleyel
09/04/2007 -  et 18 (Boston), 28 (Luzern), 31 août (Essen), 6 septembre (London)
Hector Berlioz : La Damnation de Faust, opus 24

Yvonne Naef (Marguerite), Marcello Giordani (Faust), José Van Dam (Méphistophélès), Patrick Carfizzi (Brander)
Tanglewood Festival chorus, John Oliver (chef de chœur), Maîtrise de Paris, Patrick Marco (chef de chœur), Boston symphony orchestra, James Levine (direction)


En invitant l’Orchestre symphonique de Boston, la Salle Pleyel a effectué une rentrée aussi précoce que spectaculaire: non seulement il n’était pas venu en France depuis ses deux concerts de mai 2000 au Théâtre des Champs-Elysées avec son précédent directeur musical, Seiji Ozawa, mais la suite du calendrier est à l’aune de cette soirée d’ouverture, avec une programmation encore plus riche que la saison dernière, laquelle avait pourtant déjà frappé tant par la qualité que par la quantité.


En effet, outre les formations traditionnellement en résidence (Orchestres de Paris, Philharmonique de Radio France et Symphonique de Londres) ou familières du faubourg Saint-Honoré (Orchestres National d’Ile-de-France, Colonne et Pasdeloup), les phalanges américaines seront particulièrement à l’honneur: Los Angeles/Salonen (pour une intégrale des Symphonies de Sibelius en quatre concerts) et Chicago/Muti (dans deux programmes différents) – dont les précédentes visites parisiennes remontent à plus d’une décennie – mais aussi Cincinnati/P. Järvi. L’Allemagne sera également bien représentée: Philharmonie de Berlin, Gewandhaus de Leipzig et trois intéressants orchestres radio-symphoniques (Berlin, Baden-Baden et Fribourg, Stuttgart). D’autres quitteront la fosse (Opéra national de Paris, Monnaie) ou viendront d’horizons plus lointains (Festival de Budapest, National de Russie, Philharmonique de Chine), les régions n’étant nullement oubliées pour autant (Lille, Lyon, Montpellier, Toulouse).


Et encore ne s’agit-il ici que d’un simple aperçu, auquel on peut ajouter le Concertgebouw d’Amsterdam, une liste impressionnante de baguettes prestigieuses (Boulez, Chailly, Haitink, Dohnanyi, Dudamel, Gergiev, Jansons, Ozawa, …), la quasi-totalité des grands «baroqueux» (Christie, Gardiner, Harnoncourt, Herreweghe, Jacobs, McCreesh, Niquet, …) et une prometteuse série de récitals vocaux ou instrumentaux (Argerich, Bartoli, Florez, Gheorghiu, Hahn, Norman, Perlman, Urmana, Zimerman, …).


Historiquement considéré comme le plus français des orchestres américains, aussi bien grâce à ses musiciens – notamment des pupitres de bois longtemps issus de Paris – qu’à ses chefs, tels Münch ou Ozawa, Boston entretient de longue date une relation spéciale avec La Damnation de Faust (1846), qu’il a enregistrée avec Münch puis Ozawa (respectivement chez RCA en 1954 et chez Deutsche Grammophon en 1974). En des temps pas si anciens, l’opéra de Berlioz apparaissait très régulièrement en version de concert dans la capitale; quant aux extraits les plus célèbres – Marche hongroise, Danse des sylphes, Menuet des feux follets – ils ont longtemps fait la joie des auditeurs des concerts Colonne, Lamoureux ou Pasdeloup.


Au cours des dix dernières années, seul l’Orchestre de Paris, également très attaché à cette partition qu’il a gravée avec Barenboim (Deutsche Grammophon, 1978), a poursuivi cette tradition, pour une représentation, en février 2000, sous la direction de Georges Prêtre (voir ici). C’est ensuite la scène qui a rendu justice à cette «légende dramatique», l’Opéra Bastille en ayant présenté une version scénique: créée en juin 2001… avec Ozawa (voir ici), puis reprise en mai 2004 (voir ici) et en juin 2006 (voir ici), cette production a traversé l’Atlantique, où, à nouveau avec Ozawa, elle est venue au Met, dont le patron n’est autre que… James Levine.


La boucle était ainsi bouclée, puisque l’Américain est depuis l’automne 2004 le directeur musical de l’Orchestre symphonique de Boston. Cela étant, c’est davantage le chef lyrique qu’on a pu entendre à Pleyel, avec une battue très sûre, un souci d’équilibre entre les (nombreuses) forces en présence et une attention constante portée aux chanteurs. Mais le sens dramatique, l’étincelle et la passion, pourtant tout à fait prenants, par exemple, dans la Course à l’abîme, auront trop souvent fait défaut. Cette impression tient peut-être aussi à la griserie narcissique que peut susciter les qualités individuelles de l’orchestre, à l’image d’un cor anglais idyllique dans D’amour l’ardente flamme, et sa sonorité claire et soyeuse à la fois: un tel raffinement contraste avec les quelques effets et facilités que Levine s’autorise ici ou là, comme à la fin de la Marche hongroise; surtout, il n’est sans doute pas le plus approprié à la démesure et au romantisme flamboyant de Berlioz, en particulier à sa recherche de couleurs parfois volontairement laides ou grotesques.


Tout sauf homogène, le plateau vocal souffre principalement du Faust extrêmement problématique de Marcello Giordani: dans ce rôle il est vrai toujours aussi périlleux, non seulement sa technique laisse à désirer (aigus étranglés, timbre et registres inégaux), mais son style vériste se révèle hélas hors de propos, d’autant qu’il maîtrise assez mal le français. Yvonne Naef possède une voix un peu large pour Marguerite, qu’en tragédienne accomplie, elle incarne de façon distanciée, offrant une prestation d’une indéniable plastique. Il serait injuste de ne pas mentionner le Brander satisfaisant de Patrick Carfizzi, mais le héros fut, une fois de plus, Méphistophélès: José Van Dam trahit certes quelque fatigue, mais la manière dont il vit l’un de ses personnages de prédilection, investissant avec gourmandise chaque mot du texte, captive et séduit: un véritable régal qui en rendrait inutile le surtitrage.


Cela étant, la palme revient sans conteste au Chœur du Festival de Tanglewood (où cette Damnation a été donnée mi-août avant une tournée européenne qui fait par ailleurs étape en Suisse, en Allemagne et au Royaume-Uni), renforcé dans l’Apothéose finale par la Maîtrise de Paris: libérés de leur partition, les choristes se produisent certes sans filet, mais suscitent l’admiration par leur cohésion, par leur capacité à chanter sans effort apparent aussi bien en français qu’en… latin ou en langue infernale et par leur aisance à se faire tour à tour anges et démons, paysans et buveurs, soldats et étudiants.


Le site de la Salle Pleyel
Le site de l’Orchestre symphonique de Boston



Simon Corley

 

 

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