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Pour et par les enfants

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
04/25/2007 -  et 28* avril, 12 mai 2007
Benjamin Britten : Noye’s fludde, opus 59

Florian Westphal (Noé), Sophie Van de Woestyne (Madame Noé)
Maîtrise des Hauts-de-Seine, Ensemble instrumental, Philippe Hui (direction)
Charlotte et David Lowe (mise en scène), Noëlle Ginefri (décors), Ingeborg Prinz (costumes), Christophe Chaupin (lumières)


Un arc-en-ciel qui ouvre la voie vers un avenir meilleur à un couple réconcilié? Ce n’est pourtant pas ici la conclusion de L’Or du Rhin, mais celle d’un opéra écrit par Britten, entre Le Tour d’écrou et Le Songe d’une nuit d’été. L’histoire d’un marin? Mais il ne s’agit pas non plus de Peter Grimes ou de Billy Budd. Le Théâtre des Champs-Elysées a donc fait preuve d’une louable originalité en programmant Noé et le déluge (1957), intitulé pour l’occasion L’Arche de Noé, qui, s’il s’est imposé dans les pays anglophones, reste encore rarement donné sous nos latitudes. Ce qui se comprend au demeurant assez aisément, car certains éléments du spectacle, et ce même dans une version française, échappent nécessairement à une audience francophone, notamment ces trois hymnes anglicans utilisés dans la partition, amplement soutenus par l’orgue et destinés à être spontanément entonnés par l’assistance: fête participative en deçà de la Manche, simple spectacle au-delà.


Car avec son ingéniosité coutumière, Britten a mis sur pied un projet sortant de l’ordinaire, non seulement opéra pour les enfants, mais opéra par les enfants: les adultes ne chantent ainsi que deux rôles (Noé et sa femme), les autres, notamment ceux des trois fils de Noé et de leurs épouses, étant confiés à de jeunes solistes, tandis que l’accompagnement instrumental – un improbable ensemble de flûtes à bec, cuivres, percussions et cordes – peut être indifféremment assuré par des amateurs ou, en l’espèce, par des musiciens professionnels. A en juger par la réaction des spectateurs conviés avenue Montaigne en ces «matinées» – au sens fort, une fois n’est pas coutume (10 heures du matin) – la présence sur scène de chanteurs de leur âge est d’ailleurs perçue comme un fort élément d’identification, auxquels contribuent les costumes contemporains conçus par Ingeborg Prinz.


Le livret, fondé sur un texte tiré des Chester plays (XIVe siècle) qui a par ailleurs inspiré Stravinski quelques années plus tard pour son Déluge, a conservé de son origine médiévale une impertinence, un goût pour les anachronismes mais aussi une forte dose de misogynie, insistant lourdement sur l’inconséquence et la futilité de «Madame Noé» et des commères, qui refusent d’embarquer malgré l’imminence du châtiment divin. La mise en scène de Charlotte et David Lowe est à l’avenant, avec ses clins d’œil à la comédie musicale et ses notations humoristiques. Après cette scène de ménage, le déluge bénéficie d’une puissante évocation musicale, malgré la rusticité des moyens instrumentaux, mais c’est la conclusion qui convainc le plus, abordée avec un heureux mélange d’humour et de tendresse, à l’image de ce corbeau en patin à roulettes ou d’une colombe rétive à lâcher son rameau d’olivier.


Si Philippe Hui conduit l’ensemble instrumental avec conviction, le volet vocal de cette production laisse en revanche grandement à désirer: en effet, hormis l’excellente Madame Noé de Sophie Van de Woestyne et si l’on peut sans doute admettre, vu le contexte, que Dieu (David Lowe lui-même) ait un fort accent anglais, la plupart des chanteurs sont à la peine, même le Noé de Florian Westphal, à l’articulation insuffisante et au timbre nasal, tandis que les six jeunes de la Maîtrise des Hauts-de-Seine ainsi que leurs camarades disposés à l’avant de la corbeille ne parviennent malheureusement pas à se faire entendre dans une salle de cette envergure.


Mais cela ne nuit apparemment pas à la satisfaction du public, qui, éclairé par un programme soigneusement présenté et richement illustré quoique vendu à un prix modique (2 euros), repart heureux, les yeux pleins des décors colorés de Noëlle Ginefri et les oreilles encore sous le charme de la musique de Britten, dont la complexité, habilement dissimulée sous des atours abordables, possède en même de quoi captiver les moins jeunes.


Le site de la Maîtrise des Hauts-de-Seine



Simon Corley

 

 

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