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Paris, années 1920

Paris
Musée d’Orsay
03/16/2007 -  
Maurice Ravel : Sonate pour violon et violoncelle – Chansons madécasses – Trio avec piano
Francis Poulenc : Sonate pour clarinette et basson
Claude Debussy : Sonate n° 1 pour violoncelle et piano
Henri Dutilleux : Sarabande et cortège
Manuel de Falla : Psyché

Stéphanie d’Oustrac (mezzo), Vicens Prats (flûte), Eiichi Chijiiiwa (violon), Ana Bela Chaves (alto), Eric Picard (violoncelle), Cédric Tiberghien (piano), Odile Abrell (harpe)


Alors que les deux cycles Brahms/Fauré du Musée d’Orsay, tant de piano que de musique de chambre, ont, pour le premier, récemment mobilisé l’attention et, pour le second, déjà repris, celui consacré à «Maurice Denis et la musique» a trouvé sa conclusion dans un magnifique concert donné par les solistes de l’Orchestre de Paris – qui achevait lui-même à cette occasion le volet chambriste de sa saison – entourés d’artistes «invités» d’une non moins belle trempe: même si elle n’entretenait que peu de rapports avec le peintre nabi, il aurait été dommage de bouder cette copieuse session centrée sur la France des années 1920.


Avec la précision de celui qui s’est frotté des années durant, comme premier violon du Quatuor Diotima, aux partitions les plus complexes, Eiichi Chiijiwa, en duo avec Eric Picard confronté à un lutrin récalcitrant, offre une Sonate pour violon et violoncelle (1922) d’une âpreté et un allant inhabituels, venant rappeler que Ravel est alors joué à Vienne au cours des séances organisées par Schönberg: une parenté inattendue, mais passionnante, avec l’objectivité d’un Hindemith ou la rugosité de L’Histoire du soldat.


On comprend dès lors qu’un Ravel aussi avant-gardiste ait été relativement épargné – malgré les perfidies de Satie – par Cocteau et le Groupe des Six: Marcel Marnat rapporte que Poulenc, venant même «solliciter un conseil», se serait néanmoins (sagement) vu répondre: «Haïssez-moi!». Autre duo destiné à une formation atypique et exactement contemporain de la Sonate pour violon et violoncelle de Ravel, la Sonate pour clarinette et basson de Poulenc ne se veut sans doute pas aussi ambitieuse, ne serait-ce que par sa durée. Qu’importe, car Philippe Berrod et Marc Trénel, voisins dans les rangs des bois de l’Orchestre de Paris, entretiennent une complicité évidente, qui leur permet d’obtenir une mise en place et une qualité instrumentale remarquables, sans négliger pour autant la Romance centrale.


Par coïncidence, l’Opéra national de Paris proposait cinq jours plus tôt au Palais Garnier (voir ici), la (Première) Sonate pour violoncelle et piano (1915) de Debussy dans une distribution comparable: un premier pupitre de l’orchestre associé à un pianiste renommé. L’attelage fonctionne nettement mieux ici, Cédric Tiberghien ne prenant pas le pas sur le violoncelle et l’ensemble suggérant une poésie et une expression bien supérieures.


Chacun des volets de la saison de musique de chambre de l’Orchestre de Paris aura rendu hommage à Dutilleux: page de jeunesse (et morceau de concours, avec cadence finale), Sarabande et cortège (1942) pour basson et piano présente l’avantage de ne pas introduire de rupture avec l’esprit des autres œuvres. Impossible en effet de reconnaître ici l’auteur d’Ainsi la nuit, sinon dans une facture instrumentale de premier ordre, qui, sans surprise, illustre tour à tour le caractère lyrique du basson, dans une atmosphère postravélienne, puis, plus traditionnellement et avec un bref fugato, son emploi bouffe, à la manière d’un Prokofiev.


Par son texte et, surtout, par son écriture, Psyché (1924) de Falla, autre rareté opportunément choisie, avait évidemment toute sa place dans un concert de musique française: dès sa redoutable entrée à découvert, Stéphanie d’Oustrac met en valeur avec finesse ce petit bijou lumineux. Par une nouvelle coïncidence des programmations, la soirée à Garnier précédemment évoquée comportait également les Chansons madécasses (1926) de Ravel: moins puissante, ce qui n’est en rien gênant à Orsay, mais aussi moins habitée, la mezzo française se montre cependant davantage fidèle à l’esprit de la mélodie que ne l’était l’Américaine, plus opératique. Raffinement, un rien de préciosité, travail impeccablement ouvragé: si la sensualité tropicale se fait plus allusive, la griffe anticoloniale n’en est pas moins vigoureuse, avec un Aoua! perçant à souhait.


Le Trio avec piano (1914) marque l’apogée de l’avant-guerre ravélienne: en contraste avec le reste du programme, la rondeur reprend un peu de ses droits, mais les musiciens savent en même temps lui conférer un caractère incisif et intense, parfois même orchestral, restituant de façon parfaitement maîtrisée l’arche décrite par la Passacaille.


Le site de Cédric Tiberghien



Simon Corley

 

 

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