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Giocoso

Paris
Maison de Radio France
03/03/2007 -  
Thomas Adès : Living toys, opus 9
György Ligeti : Hungarian rock – Continuum
Graciane Finzi : Concerto pour clavecin et orchestre avec cymbalum (création)
Antoine Hervé : Concertino pour piano (création)
Oscar Strasnoy : The End (création)

Elisabeth Chojnacka (clavecin), Antoine Hervé (piano)
Orchestre philharmonique de Radio France, Jean Deroyer (direction)


Placé sous le signe du jeu et donné, une fois n’est pas coutume, devant une salle comble, l’avant-dernier concert de «Présences 2007», confié à Jean Deroyer et à l’Orchestre philharmonique de Radio France, s’ouvrait avec Thomas Adès, figure centrale de cette édition. Faisant appel à seize exécutants, Living toys (1993) s’attache à narrer, selon un découpage clairement identifiable (en cinq «sections» et trois «paragraphes» de seize minutes), un conte espagnol anonyme mettant en scène un jeune garçon: Ma Mère l’Oye et L’Enfant et les sortilèges revus par les studios Pixar. Car les ingrédients de Ravel – allusions hispanisantes dans la corrida, avec castagnettes, fanfares, claquements de mains des musiciens et du chef (Aurochs), teintes jazzy dans un combat mené par la trompette piccolo (Miliciens) et, avant tout, cette façon de considérer l’enfance comme la chose la plus sérieuse au monde – se mêlent au style éclectique et foisonnant que l’on associe d’ordinaire à Adès, encore qu’il paraisse ici encore plus survolté qu’à l’habitude.


Hungarian rock (1978) de Ligeti s’enchaînait dès lors sans grande rupture, suivi de Continuum (1968): un peu plus concentrée (quatre minutes), la seconde pièce fascine davantage par ses illusions sonores entre mouvement et stabilité, mais la première (cinq minutes) retrouvait en l’occurrence sa dédicataire, Elisabeth Chojnacka, également destinataire du Concerto pour clavecin et orchestre avec cymbalum (2006) de Graciane Finzi. Il est naturellement permis de se revendiquer aujourd’hui comme «romantique», mais ce que l’on a entendu durant dix-huit minutes ne semble en retenir qu’une acception étroite et superficielle, sucrée et (moyen)orientalisante, alors que Varèse, Messiaen, Dutilleux ou Dusapin ont démontré chacun à leur manière qu’une telle attitude n’était pas nécessairement synonyme de retour au passé, et encore moins de telles compromissions. La création de cette succession de vignettes kitsch, conjuguant vanité et vacuité avec un rare aplomb, offre en effet un bien piètre aperçu du paysage musical contemporain, sans que soit évidemment en cause l’engagement des solistes, tous deux amplifiés, le nom de Cyril Dupuy, incontournable au cymbalum, n’étant d’ailleurs pas même mentionné dans le livret-programme.


Heureusement, la fameuse affirmation de Schönberg, qui estimait encore possible de composer beaucoup de bonne musique en ut majeur, a mieux trouvé à s’appliquer après l’entracte. Car les vingt et une minutes du Concertino pour piano (2006) d’Antoine Hervé affichent la couleur sans prétention: celui qui fut l’un des premiers directeurs artistiques de l’Orchestre national de jazz (1987-1989) met sa formation classique au service d’une sorte d’improvisation (entièrement notée), Rhapsody in blue mâtinée de Bartok et de Bernstein, dont les rythmes et ostinati s’imposent avec efficacité jusqu’à une conclusion apaisée. L’orchestre, dont l’écriture résulte du «recyclage» et de l’instrumentation de matériaux préalablement obtenus avec un clavier midi, tend malheureusement trop souvent à couvrir la partie soliste, tenue par le compositeur lui-même.


Le concert devait se conclure sur les troisième et quatrième parties du cycle Sum d’Oscar Strasnoy: exit, sans autre explication, la troisième, Scherzo, créée la saison passée par l’Orchestre national d’Ile-de-France et Jean Deroyer; restait donc la création de la quatrième, The End (2006). Dans Pour un nouveau roman (1963), Robbe-Grillet affirme non sans raison que «personne n’aurait l’idée de louer un musicien pour avoir, de nos jours, fait du Beethoven». Strasnoy, qui partage certainement cet avis, inverse cependant la proposition: «A quoi bon faire de la musique d’orchestre de nos jours, puisque tout le monde, publics et orchestres, ne veut que du Beethoven?». Et comme Argentine rime, depuis Kagel, avec dérision, il prend le pari au mot, dans une perception à la fois lucide et grinçante des espoirs et des impasses des musiques contemporaines: partir des dernières mesures de la Huitième symphonie, où Beethoven semble d’ailleurs se moquer de la coda de sa propre Cinquième, pour livrer une pochade clownesque à la Spike Jones: dix minutes d’un exercice délirant et virtuose, relevé par une contrainte supplémentaire – n’utiliser que des accords majeurs ou mineurs – qui ne suggère pas pour autant systématiquement un contexte tonal.


Le site de Graciane Finzi
Le site d’Antoine Hervé
Le site d’Oscar Strasnoy
Le site d’Elisabeth Chojnacka
Le site de Cyril Dupuy



Simon Corley

 

 

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