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Aida, ou les hauts et les bas de la Scala

Milano
Teatro alla Scala
12/07/2006 -  et les 10, 12, 14*, 17, 19, 22 décembre 2006, 3, 5, 9 et 12 janvier 2007

Giuseppe Verdi: Aida


Marco Spotti*/Carlo Cigni (Il Re), Ildiko Komlosi*/Irina Makarova (Amneris), Violeta Urmana*/Isabelle Kabatu (Aida), Roberto Alagna/Antonello Palombi/Walter Fraccaro* (Radames), Giorgio Giuseppini*/Orlin Anastassov (Ramfis), Carlo Guelfi*/Vittorio Vitelli (Amonasro), Antonello Ceron*/Ki Hyun Kim (Messaggero), Sae Kyung Rim*/Giacinta Nicotra (Sacerdotessa)

Chœur du Teatro alla Scala, Bruno Casoni (préparation), Orchestre du Teatro alla Scala, Riccardo Chailly (direction musicale)
Franco Zeffirelli (mise en scène et décors), Maurizio Millenotti (costumes), Vladimir Vassiliev (chorégraphie)



L’anecdotique pour commencer, qui vire d’ailleurs au pathétique: après sa sortie de scène houleuse à Milan et ses déclarations tonitruantes dans la presse italienne, Roberto Alagna, faisant désormais profil bas, s’est rendu jeudi soir 14 décembre, un quart d’heure avant le début de la représentation, devant le théâtre milanais, sans chercher cependant à y entrer. Venu non pas pour protester mais pour s’excuser («Comme Radames, j’accepte mon sort», a-t-il déclaré), il a pris des photos de la Scala avant d’entonner le Addio fiorito asil de Madama Butterfly, le «fiorito asil» étant en l’occurrence la vénérable institution milanaise! Pour la petite histoire, signalons que le psychodrame scaligère est déjà entré dans le langage courant, le porte-parole de Romani Prodi ayant déclaré dans un entretien à un grand quotidien italien, à propos de sa politique de communication, que «nous n’allons pas nous dérober, nous ne succomberons pas au syndrome Alagna»!


L’essentiel maintenant: Aida a ouvert la saison 2006-2007 de la Scala. Une fois installé dans son fauteuil, le spectateur n’est plus tout à fait sûr d’être à Milan, tant ce qu’il voit sur scène lui donne la désagréable impression de se dérouler au Casino de Las Vegas, voire au Stade de France: plus de 300 personnes sur le plateau pour la marche du triomphe, des décors grandiloquents qui en jettent plein la vue, pour figurer un exotisme kitsch et clinquant, avec force colonnes, sphinx et statues, sans parler des trouvailles de bien mauvais goût, tels ces hommes-oiseaux descendant des cintres. Pour la direction d’acteurs et la caractérisation des personnages en revanche, c’est le néant, les solistes étant la plupart du temps immobiles sur le devant de la scène, bras en l’air. On peine à croire qu’il n’y avait personne d’autre que Franco Zeffirelli pour monter le chef-d’œuvre de Verdi. Quel manque d’imagination de la part de la direction du théâtre! D’autant que le célèbre metteur en scène avait déjà présenté sa version d’Aida au public milanais en 1963, et que son spectacle avait ensuite été repris en 65, 66 et 76. Et que penser de cette curieuse habitude de la Scala de tout miser ou presque sur le spectacle d’ouverture de saison, alors que le reste de la programmation, composé essentiellement de reprises et de coproductions, paraît bien terne, avec souvent des distributions de deuxième ordre. Au point que les Milanais eux-mêmes ont baptisé l’illustre maison «le plus grand théâtre de province du monde».


Mais heureusement, il y a la musique de Verdi, admirablement servie par Riccardo Chailly, ainsi que par l’orchestre et le chœur de la Scala. S’il n’évite pas toujours les effets faciles dans les deux premiers actes, le chef se révèle beaucoup plus fin et subtil, quasiment intimiste, dans la deuxième moitié du spectacle, insufflant des couleurs insoupçonnées, notamment dans le tableau nocturne du troisième acte. Sa direction est précise et méticuleuse, soignée jusque dans les moindres détails, sans pour autant perdre de vue l’ensemble de la partition. Et les instrumentistes répondent magnifiquement, avec une précision confondante, prouvant, si besoin est, qu’ils ont cette musique dans le sang. Ouf, la Scala n’a pas perdu tout son lustre et reste le temple de l’art lyrique, du moins pour le répertoire italien. La distribution vocale est fort honorable. S'y détache l’Amneris passionnée et combative d’Ildiko Komlosi, aux graves chauds et percutants. Violeta Urmana incarne une Aida émouvante, de grande classe, à la ligne de chant parfaitement maîtrisée et à l’art des pianissimi envoûtants; on peut simplement regretter une présence scénique quelque peu effacée. Même s’il n’est pas le plus raffiné des ténors, on admire chez Walter Fraccaro l’héroïsme et la vaillance, deux qualités qui, semble-t-il, avaient fait défaut à Roberto Alagna le soir de la première. Au final donc, une soirée qui laissera une forte impression uniquement pour sa partie musicale.




Claudio Poloni

 

 

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