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Roger Muraro et Messiaen : une rencontre idéale entre un interprète et un compositeur

Normandie
Caen (Grand auditorium)
11/21/2006 -  et 19 décembre 2006 (Nancy)
Franz Liszt : Harmonies poétiques et religieuses n°1 « Invocation », n°6 « Hymne de l’enfant à son réveil » et n°7 « Funérailles »
Isaac Albéniz : Iberia, premier cahier : « Evocación », « El Puerto » et « Corpus Christi en Sevilla »
Olivier Messiaen : Dix premiers Regards sur l’Enfant Jésus

Roger Muraro (piano)


L’Orchestre de Caen organise trois fois par an des récitals de piano au profit d’Entraide médicale internationale (EMI). La saison dernière avait ainsi permis au public d’applaudir Bruno-Leonardo Gelber. Cette année, c’est à Roger Muraro qu’échoit l’honneur de proposer le premier concert de la série. Il a choisi un programme dense et exigeant, construit autour de trois acceptions de la foi catholique : romantique chez Liszt, sensuelle et festive dans les cortèges espagnols, foisonnante et riche de Messiaen.


Bien que « Invocation », la première des Harmonies religieuses et poétiques, d’après Lamartine (« Elevez-vous, voix de mon âme, Avec l’aurore, avec la nuit ! »), soit censée évoquer les flammes et les orages, Roger Muraro s’impose d’abord par sa souplesse. Il cherche à tirer de son instrument un maximum de couleurs, et travaille la subtilité plus que la force. Il est loisible de préférer une version plus dramatique mais on ne peut qu’admirer l’usage délicat de la pédale douce. Ce jeu convient parfaitement à « Hymne de l’Enfant à son réveil », pas du meilleur Liszt, mais que le pianiste rend intéressant, notamment à travers une deuxième partie plus vive, presque dansante parfois. Pour Funérailles, plus connues et plus virtuoses, il cherche à nouveau la variété des couleurs plus que l’extériorisation dramatique.


On retrouve dans son interprétation d’Iberia les qualités de son enregistrement paru chez Accord il y a dix ans. Mais entre-temps, Roger Muraro a approfondi sa lecture de l’œuvre, qu’il cherche à placer dans le courant impressionniste français qui a considérablement inspiré Albéniz. D’emblée, « Evocación » s’y prête particulièrement bien. La danse d’«El Puerto », joué avec une grande liberté rythmique, impressionne par sa souplesse – le poignet droit semble rebondir sans cesse. Si le cortège final manque un peu de folie, le caractère méditatif de la conclusion est de toute beauté.


Mais ce sont avant tout les pages de Messiaen, dont Roger Muraro a gravé une intégrale de référence, qui marquent le point culminant de ce récital. Sa première interprétation des Regards sur l’Enfant Jésus en concert avait d’ailleurs reçu les félicitations du compositeur et leur rencontre est de celles qui changent notre façon d’écouter une œuvre. Une des grandes difficultés du style des Regards est de gérer les répétitions, en particulier celles du « Regard du père » ou du « Regard du Fils sur le Fils », qui s’appuient sur le « thème de Dieu », par essence immuable et éternel. Le pianiste sait trouver le tempo juste, les épisodes contemplatifs alternant avec des évocations plus gaies, souvent tendres. Car le Dieu de Messiaen est plus celui de l’Amour, de la Nature (on perçoit déjà des chants d’oiseaux dans le « Regard des Hauteurs ») que de la colère. Le toucher ductile et raffiné de Roger Muraro lui permet de clarifier les textures les plus touffues, comme celle de « L’Echange », qui superpose trois plans sonores. Mais les dix premiers Regards comportent aussi deux des pièces parmi les plus difficiles jamais écrites par Messiaen, et qui demandent de la part du pianiste une technique à toute épreuve : « Par Lui tout a été fait », sorte de grandiose Création du Monde, et « Regard de l’Esprit de Joie », danse sauvage qui annonce le finale de la Turangalîla-Symphonie. Le pianiste les joue avec autant d’engagement que de plaisir.


Au public caennais, qui a longuement réclamé un bis, le pianiste a offert le onzième Regard.


Le site de l’Orchestre de Caen
Le site d’Entraide médicale internationale



Thomas Herreng

 

 

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