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Caprices compiégnois

Compiègne
Théâtre impérial
10/01/2006 -  et 8* octobre 2006
Henri Sauguet : Les Caprices de Marianne

Isabelle Philippe (Marianne), Magali Damonte (Hermia), Armando Noguera (Octave), Stéphane Malbec Garcia (Cœlio), Matthieu Lécroart (Claudio), Lionel Muzin (Tibia), Mathias Vidal (L’aubergiste, Le chanteur de sérénades), Jean-Pierre Descheix (La duègne)
Orchestre français Albéric Magnard, Miquel Ortega (direction musicale)
Pierre Jourdan (direction artistique, mise en scène), Jean-Pierre Capeyron (scénographie et costumes), Thierry Alexandre (lumières), Jean-Hugues Tanto (pantomime)


Le Théâtre français de la musique dédie sa saison 2006-2007 à la mémoire de celui qui fut son président d’honneur, Gabriel Dussurget, disparu voici maintenant plus de dix ans, le 28 juillet 1996. Cet hommage rendu au fondateur du Festival d’Aix-en-Provence s’accommode on ne peut mieux de la politique toujours aussi dynamique de redécouverte du répertoire français que Pierre Jourdan développe depuis quinze ans au Théâtre impérial de Compiègne: avant de présenter Fra Diavolo d’Auber ainsi que divers concerts (récitals de chant, orchestre, musique de chambre) et spectacles (variété, danse, théâtre, cinéma, …), il ouvrait ainsi l’année avec Les Caprices de Marianne (1954) de Sauguet.


La musique contemporaine n’était certes pas la priorité à Aix à cette époque, mais Dussurget n’en avait pas moins commandé cet opéra comique en deux actes et, pour la seconde des représentations de cette nouvelle production, la présence d’invités de marque rappelait cet âge d’or aixois – Jean-Pierre Grédy, l’auteur du livret tiré de la pièce (1833) de Musset, sans le concours de l’inséparable Pierre Barillet, et Edmonde Charles-Roux, active dès les premières heures et aujourd’hui présidente d’honneur du Festival – mais permettait également de saluer un interprète de cette musique, en la personne de Michel Sénéchal, qui l’enregistra sous la baguette de Manuel Rosenthal.


Dans son propos liminaire, Pierre Jourdan estime qu’on tient ici le «Pelléas du milieu du XXe siècle» et en profite pour épingler au passage les musiciens «pseudo intellectuels» qui en auraient freiné la carrière. Risquant de susciter la déception, de telles déclarations pourraient finir par desservir la cause qu’elles veulent illustrer, c’est-à-dire une partition solidement ficelée dont on ne se dit à aucun moment qu’elle aurait dû rester reléguée sur les étagères des bibliothèques. Avec un sujet qui ne lui permettait évidemment pas d’écrire dans la manière de Satie ou du Groupe des Six, comme dans ses œuvres les plus connues, Sauguet n’a pas fait pour autant dans le pastiche ou la couleur locale (napolitaine), mis à part une brève scène de carnaval. De même, la dimension bouffe, malgré un rôle de duègne confié à un ténor, n’est pas exagérée et l’humour demeure toujours plus allusif qu’appuyé.


Pendant deux heures et cinq minutes, le flux musical s’écoule avec fluidité et naturel, sans interruption, tout en ménageant de nombreux airs et de rares ensembles, dans un langage sobre et peu révolutionnaire, privilégiant les demi-teintes et préférant suggérer plutôt que de procéder par grands gestes théâtraux ou spectaculaires. Subtil et discret, l’accompagnement orchestral passe rarement au premier plan – il n’y a d’ailleurs ni ouverture, ni prélude – et les voix s’épanouissent donc librement pour traduire, dans un lyrisme aussi traditionnel que généreux, les sentiments des personnages.


Pierre Jourdan signe une mise en scène sans surprise, qui s’inscrit dans les décors et costumes de Jean-Pierre Capeyron, de facture on ne peut plus classique, avec notamment une toile peinte figurant la baie et un Vésuve fumant… Les bâtiments assez ternes qui occupent tout le premier plan bénéficient heureusement des éclairages chaleureux de Thierry Alexandre, même si la différence entre le jour et la nuit ne ressort pas de façon suffisamment nette.


La distribution rassemble de jeunes chanteurs, pour la plupart familiers du lieu – qui, par un curieux effet acoustique, paraît assurer une meilleure projection du son en milieu de plateau que sur la rampe – et s’attachant dans l’ensemble à une articulation soigneuse du texte. Reprenant un rôle initialement destiné à Lily Pons et créé par Graziella Sciutti, Isabelle Philippe possède le registre de colorature requis et se tire bien d’une partie redoutablement exigeante, campant une Marianne plus grave et altière qu’ingénue. L’Octave d’Armando Noguera, suave et onctueux, mais qui sait aussi être bouleversant dans l’adieu à son ami, réunit tous les suffrages. Stéphane Malbec Garcia est un Cœlio convaincant et d’une belle musicalité, au vibrato cependant parfois un peu large. Le Claudio de Matthieu Lécroart est animé par une superbe prestance, crédible malgré sa jeunesse, faisant valoir une émission parfaitement claire et des phrasés impeccables. Il faut en outre distinguer la qualité de la ligne de chant et du timbre de Mathias Vidal, en aubergiste puis en chanteur de sérénades.


L’Orchestre français Albéric Magnard n’est certes ni parfait, ni très fourni, mais il est intelligemment conduit par Miquel Ortega, qui respecte à chaque instant l’équilibre avec la scène. Comme de coutume à Compiègne, cette production fera l’objet d’un film qui sera commercialisé en janvier 2008.


Le site du Théâtre français de la musique



Simon Corley

 

 

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