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Rome n'est plus dans Rome

Salzburg
Felsenreitschule
07/25/2006 -  et les 27 et 30* juillet
Wolfgang Amadeus Mozart : Lucio Silla
Roberto Sacca (Lucio Silla), Annick Massis (Giunia), Monica Bacelli (Cecilio), Veronica Cangemi (Lucio Cinna), Julia Kleiter (Celia), Stefano Ferrari (Aufidio). Chœur et Orchestre de la Fenice de Venise, dir. Tomáš Netopil. Mise en scène : Jürgen Flimm.

Autant Mitridate était, l’année dernière, une totale réussite, tant scéniquement que musicalement, autant Lucio Silla est cette année un total ratage, fortement chahuté le jour de la première. Jürgen Flimm, bouillant directeur de la RuhrTriennale, qui va succéder l’an prochain à Peter Ruzicka, est-il gêné par les longueurs souvent brocardées du seria ou par les vastes dimensions du plateau du Manège aux rochers? Il multiplie en tout cas les déplacements de figurants inutiles, superpose au drame une chorégraphie aussi ridicule que superflue. Mêlant reconstitution et transposition, il insiste surtout lourdement sur le caractère inquisitorial du régime du dictateur romain, qu’il situe entre l’absolutisme monarchique du temps de Mozart et les dictatures plus récentes, comme si l’on était, avec ces salles d’interrogatoire et cette neige qui tombe, chez Dostoïevski ou Soljenitsyne. Tout cela est hétéroclite et n’a guère de sens, ne pouvant de surcroît servir d’alibi à la pauvreté de la direction d’acteurs. Et faire tomber, à la fin, le tyran sous les coups de l’exécuteur de ses basses œuvres constitue moins une ultime péripétie qu’un contresens patent. Du coup, la chronique d’une dictature ordinaire occulte la tragédie intérieure de ces personnages contraints, pour sauver leur amour, à un combat incessant contre les autres et contre eux-mêmes ; bref, tout ce qui constitue l’essence même du seria passe à la trappe, le metteur en scène utilisant sans compter de grosses ficelles depuis longtemps usées – Silla se dépoitraillant pour tenter de violer Giunia attachée à une chaise par les soins de son âme damnée... On est certes sensible à la campagne italienne servant de toile de fond et la façade palladienne du Teatro Olimpico de Vicenza – pivotant souvent pour montrer, à travers échafaudages et projecteurs, une sorte d’envers de la dictature ; mais on regrette que, coproduction avec la Fenice oblige, les arcades du Manège aux rochers, espace idéal pour ces jeux ambigus de cache-cache entre sbires du tyran et combattants de l’ombre, n’aient pu être exploitées.
Cela dit, la production irrite d’autant plus que les interprètes, confrontés parfois à des rôles écrits sur mesure pour d’éminents chanteurs de l’époque, font plutôt figure de seconds couteaux. On cherche en vain, chez Roberto Sacca, des affinités avec le bel canto mozartien. Totalement dépassée, avec sa voix de soprano d’opéra-comique au timbre pauvre, par les exigences vocales et stylistiques de Giunia, Annick Massis s’attache surtout à tricoter ses vocalises. On ne dira même pas qu’elle aurait dû chanter Celia : Julia Kleiter nous y réserve la seule vraie satisfaction de la soirée. Veronica Cangemi déçoit en Cinna, dont elle n’a ni l’héroïsme ni l’éclat, avec des vocalises fortement savonnées. Reste l’honnête et assez attachant Cecilio de Monica Bacelli, mezzo riche mais au grave trop limité, lui aussi dépourvu de l’héroïsme nécessaire. On est à mille lieues de ce qu’on attend de l’opera seria lorsqu’on ne veut pas s’y ennuyer. Orchestre et chœur de la Fenice font ce qu’ils ont à faire, mais le jeune chef tchèque Tomas Netopil, lauréat du premier concours international sir Georg Solti en 2002, très professionnel sans doute, a du mal à atteindre le stade d’une authentique interprétation, beaucoup trop neutre par exemple dans la scène des tombeaux, n’arrivant pas non plus à imposer une vraie vie aux récitatifs.





Didier van Moere

 

 

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