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Les concertos de l’Ascension

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
05/25/2006 -  
Serge Prokofiev : Symphonie n° 1 «Classique», opus 25
Siegfried Matthus : Concerto for two (création française)
Bechara El-Khoury : Concerto pour violon «Aux frontières de nulle part», opus 62 (création)
Zoltan Kodaly : Hary Janos (Suite)

Marc Bauer (trompette), Joël Vaïsse (trombone), Sarah Nemtanu (violon)
Orchestre national de France, Kurt Masur (direction)


Le lundi de Pentecôte n’est certes plus un jour férié, mais l’Orchestre national de France et son directeur musical, Kurt Masur, n’ont pas hésité à renoncer au jeudi de l’Ascension et à offrir aux Parisiens, en cette période généralement assez pauvre en concerts, un beau programme qui, malgré une forte connotation contemporaine, a rassemblé un nombreux public. Une expérience à renouveler!


Périlleuse entrée en matière, notamment pour les violons, la Première symphonie «Classique» (1917) de Prokofiev convainc moins dans ses mouvements impairs (Allegro lent mais non sans charme, Gavotte surchargée d’intentions) que dans ses mouvements pairs (Larghetto fin et léger, Finale vigoureux et enlevé).


Suivaient, de part et d’autre de l’entracte, deux partitions concertantes permettant de mettre en vedette les musiciens du National. Ce furent d’abord Marc Bauer et Joël Vaïsse pour la première française du Concerto for two (2002) pour trompette et trombone de Siegfried Matthus. Présent pour l’occasion, le compositeur, originaire de l’ancienne Allemagne de l’Est comme Masur, est un proche du patron du National, qui fut à la fois le dédicataire (pour son soixante-quinzième anniversaire) et le créateur de l’œuvre. Familier de l’écriture pour les cuivres, Matthus possède déjà à son actif des concertos pour trompette, trompette et timbales ainsi que pour cor. Ce double concerto, d’un seul tenant et d’une durée de vingt minutes, respecte, après une introduction confiée aux solistes, la traditionnelle forme tripartite, avec un premier volet qui évoque parfois Hindemith, un épisode central résolument lyrique, où la trompette passe au flügelhorn et le trombone à l'alto, et une conclusion au rythme frénétique, mettant en valeur l’effectif inhabituel de l’accompagnement, où cuivres et percussions dominent les cordes, les bois étant limités à trois flûtes.


Délibérément brillante et efficace, la démarche devient même parfois franchement ludique. Les deux dernières sections sont ainsi reliées par une longue cadence (?) en forme de joute tournant presque au théâtre musical ou à un concert Hoffnung: après une compétition technique sur les aigus, les graves et les différents modes de jeu, le trompettiste et le tromboniste, mimiques à l’appui, combattent à coup de citations provenant de différents univers (Boléro, Marche de Rakoczy, Carmen, Orphée aux enfers et Thaïs, mais aussi Cadet Rousselle, L’Ile aux enfants, Le Petit vin blanc, …), tandis que porté par le rythme, un violoniste enfile des lunettes noires et se trémousse sur sa chaise à l’avant-dernier rang de son pupitre.


Commande du ministère libanais de la culture et du IXe Sommet de la Francophonie, le Concerto pour violon (2002) de Bechara El-Khoury affiche une toute autre ambition, ne serait-ce que par son titre, «Aux frontières de nulle part», qui renvoie, selon les notes de programme, à des «sources nombreuses», à des «rencontres», à des «voyages» et à la «douloureuse expérience du déracinement» du compositeur libanais, venu assister à cette création. Cela étant, ce titre pourrait également prêter à sourire pour peu que l’on ait un peu mauvais esprit et que l’on ne se satisfasse pas d’un style qui, toujours selon les notes de programme, «absorb[e] inconsciemment les exemples de Brahms, de Berg et de Khatchaturian» mais qui, au-delà de cet encombrant parrainage, rappelle plutôt Korngold.


Les vingt-deux minutes se répartissent entre un long mouvement d’allure modérée, une cadence très développée (cinq minutes) puis un mouvement vif. Hormis des interludes qui lorgnent vers Hollywood, l’orchestre, relativement fourni (bois par trois, quatre trompettes, harpe, célesta), se borne à accompagner le violon séducteur Sarah Nemtanu – une élève du dédicataire, Gérard Poulet – qui s’accommode fort bien de ce propos rhapsodique, où les abondantes indications expressives (Misterioso, Drammatico, Lirico, Poetico) traduisent une inconsolable nostalgie.


Malgré sa notoriété et son succès, la Suite de Hary Janos (1926/1927) de Kodaly est pourtant rarement donnée, peut-être parce qu’elle requiert une formation peu ordinaire, comprenant notamment trois cornets, saxophone alto et cymbalum. Les amateurs de clichés n’hésiteraient pas à qualifier de teuton l’humour dont Masur fait preuve en l’espèce, lestant d’effets une musique qui n’en a nullement besoin: excès du solo d’alto au début de la Chanson, raideur et lourdeur de l’Intermezzo, qui n’en sera pas moins bissé. Modérément truculent, sinon dans Bataille et défaite de Napoléon, ce Hary Janos se conclut en revanche sur une superbe Entrée de l’Empereur et de sa cour, vive et colorée.


Le site de Siegfried Matthus



Simon Corley

 

 

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