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L’arrangeur arrangé

Prades
Abbaye Saint-Michel de Cuxà
08/04/2005 -  
Johann Sebastian Bach: Le Clavier bien tempéré (Premier livre), Fugue n° 22, BWV 867 (arrangement Ludwig van Beethoven) (#)
Ludwig van Beethoven: Symphonie n° 7, opus 92 (arrangement pour nonette) – Trio avec piano n° 7 «A l’Archiduc», opus 97 (+)

Jean-Louis Capezzali, Han Seung Hwa (hautbois), Michel Lethiec, Maurizio d’Alessandro (clarinette), Amaury Wallez, Mehdi El Hammami (basson), André Cazalet, Jean-Sébastien Gable (cor), Hagaï Shaham (+) (violon), Yvan Chiffoleau (+), Arto Noras (#) (violoncelle), Niek de Groot (contrebasse), Jeremy Menuhin (+) (piano), Quatuor Fine Arts (#): Ralph Evans, Efim Boico (violon), Yuri Gandelsman (alto), Wolfgang Laufer (violoncelle)


Pas de Festival Pablo Casals sans une soirée Beethoven à l’Abbaye Saint-Michel de Cuxà. L’intérêt, s’il en était besoin, en était toutefois renouvelé par une première partie sortant des sentiers battus, où le maître de Bonn s’est trouvé dans l’inconfortable position de l’arrangeur arrangé.


Comme bon nombre de compositeurs, à commencer par Mozart, Beethoven s’est imprégné de l’œuvre de Bach, et notamment de son Clavier bien tempéré, en adaptant certaines de ses pièces. C’est ainsi qu’il arrangea en 1802 la fugue à cinq voix en si bémol mineur du Premier livre (1722) pour un quintette à deux violoncelles. Malgré sa brièveté, cet exercice n’est nullement pris à la légère par des interprètes de haut vol (le Quatuor Fine Arts renforcé par Arto Noras), qui en offrent une lecture particulièrement expressive.


Si Beethoven respectait indéniablement son modèle, que dire de cette transcription pour nonette (octuor d’instruments à vent et contrebasse) de sa Septième symphonie (1812), réalisée de son vivant par un auteur qui a sans doute bien fait de rester anonyme? Le défi purement technique est certes sans commune mesure, même si cette symphonie réserve déjà une place importante aux bois et aux cuivres et si, sans aller jusqu’à évoquer les formidables transcriptions de Liszt, Beethoven lui-même a retravaillé certaines de ses partitions, y compris sa Deuxième symphonie pour trio avec piano.


Mais, même en tentant de faire abstraction de l’original, le résultat est ici franchement décevant: non seulement le texte est coupé (notamment dans le Scherzo, où le Trio n’apparaît qu’une fois), privé de ses reprises et transposé, qui plus est différemment d’un mouvement à l’autre, mais l’ensemble manque de poids et sonne souvent de façon maladroite ou criarde. Plus que l’absence de chef d’orchestre, le manque d’élan traduit une médiocre restitution de l’élément rythmique, confirmant la pertinence de l’observation de Wagner, qui voyait dans cette symphonie une «apothéose de la danse», et le rôle novateur que tient la percussion chez Beethoven.


Au demeurant, on voit mal quelle pouvait être la destination d’une telle réduction, compte tenu de son indéniable difficulté d’exécution et de mise en place, qui exclut d’emblée une réunion d’amateurs, même éclairés, et qui donne d’ailleurs déjà pas mal de fil à retordre aux différentes générations de musiciens regroupées autour de Michel Lethiec.


En seconde partie, le Septième trio avec piano «A l’Archiduc» (1811) ramenait à la fois une atmosphère plus familière et, surtout, une satisfaction pleine et entière. Généreuse et spectaculaire, conquérante et punchy, servie par une qualité instrumentale irréprochable, l’approche de Jeremy Menuhin, Hagaï Shaham et Yvan Chiffoleau se déploie avec énergie et ferveur, faisant presque de ce Trio de grande ampleur ce que l’Héroïque est à la symphonie. Mais elle traduit surtout une complicité et un plaisir de jouer qui font, depuis plus de cinquante ans, les grands moments de Prades. Il est d’ailleurs des indices qui trompent rarement: l’attention et la concentration remarquables du public, suivies d’applaudissements chaleureux et enthousiastes.



Simon Corley

 

 

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