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Finesse Montpellier Corum 07/26/2005 - Juan Crisostomo Arriaga: Thème et variations, opus 17
Bernard Herrmann: Quatuor à cordes «Echoes»
Ludwig van Beethoven: Quatuor n° 1, opus 18 n° 1
Quatuor Fine Arts: Ralph Evans, Efim Boico (violon), Yuri Gandelsman (alto), Wolfgang Laufer (violoncelle)
Si le Festival de Radio France et Montpellier Languedoc-Roussillon fête cette année ses vingt ans, le Quatuor Fine Arts, quant à lui, se prépare à célébrer ses trois fois vingt ans: continuité et longévité remarquables qui sont plutôt l’apanage des ensembles orchestraux, même si, bien évidemment, la formation a entièrement été renouvelée depuis sa fondation en 1946 à Chicago. Sur le chemin du Festival Pablo Casals, dont il sera l’un des invités privilégiés, et en parallèle à des classes de maître qu’il donne dans le cadre de l’Académie internationale de musique de Montpellier, le quatuor américain faisait étape Salle Pasteur dans un programme montrant notamment son attachement à sortir des sentiers battus, confirmé par des disques déjà publiés (Dohnanyi) ou en préparation (Antheil, Glazounov).
Compensant par la précocité de ses dons une disparition pour le moins prématurée, dix jours avant son vingtième anniversaire, Arriaga a laissé trois importants quatuors à cordes, qui ont sans doute fait de l’ombre à son Thème et variations (1820). Il est vrai que sa forme ne réserve pas de surprises – mais fallait-il en attendre d’un compositeur de quatorze ans? – alors que son langage évoque le Beethoven de l’opus 18. Mettant individuellement en valeur tous les musiciens, y compris le second violon, les six variations respectent la coupe un rien répétitive (deux ensembles de huit mesures, faisant chacun l’objet d’une reprise) d’un thème d’esprit haydnien, mais la coda apporte une conclusion plus libre et originale.
Si, au-delà de ses musiques pour le cinéma (après Citizen Kane, il devient le collaborateur d’élection de Hitchcock et de Truffaut), la production symphonique de Bernard Herrmann jouit d’une relative notoriété, sa musique de chambre, bien que des enregistrements en aient été réalisés, reste pour le moins à découvrir, à commencer par son Quatuor (1965), que les Fine Arts proposeront prochainement chez Naxos, couplé avec celui qu’a écrit leur premier violon, Ralph Evans.
Présentant son œuvre, Herrmann indiquait que son sous-titre, Echoes, visait «une série de souvenirs nostalgiques et émotionnels». Née d’un projet de ballet pour deux danseurs, elle a d’abord connu une création de concert, avant d’être effectivement associée à la scène. D’un seul tenant (vingt minutes), elle comprend huit sections encadrées par un Prélude ainsi qu’un Epilogue, et enchaînées au moyen d’interludes qui reprennent le motif en forme de dialogue entre les deux violons qui ouvre le Prélude. Proche, y compris par ses thèmes, des musiques écrites au même moment pour Joy in the morning d’Alex Segal et Fahrenheit 451 de Truffaut, ce quatuor rappelle parfois Chostakovitch par son caractère à la fois désolé et ironique, mais procède de façon indéniablement cinématographique, par succession de brèves séquences évocatrices qui ne donnent pas lieu à développement.
Autrement plus familier, le Premier quatuor (1799) de Beethoven bénéficie ici d’une approche souriante et délicieusement surannée, avec ses sonorités moelleuses et ses portamenti d’un charme un rien langoureux. Allante et transparente, davantage en légèreté qu’en puissance, cette vision est mue par un souci d’équilibre classique plutôt que de fougue romantique, même dans le fameux Adagio affettuoso ed appassionato, tandis que l’Allegro final préserve souplesse et articulation malgré un tempo très enlevé.
Bien que le nom anglais de Fine Arts constitue un faux ami qui n’a donc pas grand-chose à voir avec notre finesse, le mot s’impose pourtant lorsqu’il s’agit de qualifier une telle interprétation. Et c’est ce qui ressort également de deux bis – Valse ridicule, troisième des Cinq pièces (1920) de Casella, puis Polka, seconde des Deux pièces (1931) de Chostakovitch – donnés avec une suprême élégance et un chic réjouissant, bien loin de l’humour appuyé avec lequel de tels morceaux sont trop souvent abordés.
Simon Corley
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