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Contrastes Paris Théâtre des Champs-Elysées 06/22/2005 - Ludwig van Beethoven : Symphonies n° 8, opus 93, et 6 «Pastorale», opus 68
Ensemble orchestral de Paris, John Nelson (direction)
On peut certes rêver feu d’artifice plus original et spectaculaire que de donner en cinq (courts) concerts l’intégrale des symphonies de Beethoven pour conclure une saison, mais il est légitime qu’une formation telle que l’Ensemble orchestral et son directeur musical, John Nelson, souhaitent montrer ce dont ils sont capables. Et même si les phalanges parisiennes ont déjà bien servi ce répertoire au cours des dernières années, le succès public est toujours indéniablement au rendez-vous.
Mais une autre raison plaide en faveur d’une telle initiative: de même qu’en 2001-2002, les cinq concertos pour piano avaient fait l’objet de remarquables gravures vidéo publiées par Ambroisie (voir ici), il restera également un témoignage de cette aventure, les neuf symphonies étant annoncées pour début 2006 chez le même éditeur.
Le quatrième et avant-dernier volet de cette intégrale associait les deux symphonies en fa: c’était ainsi la troisième fois au moins que la Pastorale était offerte au cours de cette saison dans la capitale (voir ici et ici), mais Nelson, en soulignant les divergences entre les deux œuvres et en faisant contraster nettement les deux parties de la soirée, est parvenu à soutenir l’intérêt d’un tel exercice.
A la tête d’un petit effectif (trente cordes), sans estrade mais partition sous les yeux, le chef américain adopte une approche résolument conflictuelle de la Huitième (1812), dans le droit fil de la Septième, exactement contemporaine: ces attaques violentes et rêches, cette vigueur rythmique et cette inlassable énergie rappellent certes le travail des «baroqueux», mais des chefs tels que Szell ou Casals ont déjà, en leur temps, donné des versions qui se caractérisaient aussi par leur verdeur et leur astringence. Les sonorités et l’équilibre entre les pupitres, avec notamment des cors (d’ailleurs renforcés d’une unité) très en avant, pâtissent cependant ici d’une vision certes stimulante, mais trop univoque, laissant par exemple assez peu de place à l’humour ou à la légèreté.
Changement radical dans la Sixième (1808): avec quelques musiciens supplémentaires (trente-cinq cordes) et une estrade, mais sans partition, Nelson opte en effet pour la souplesse et la sérénité, le chant et l’hédonisme, avec un souci beaucoup plus marqué des phrasés et des couleurs. Sans histoires, cette Pastorale ne manque pas d’allant pour autant, avec un troisième mouvement particulièrement vif et un orage grandeur nature, même si la conclusion se déroule dans un tempo inhabituellement retenu, comme pour prendre de la hauteur. La tendance à ralentir systématiquement juste avant l’énoncé des thèmes, comme pour «flécher» le discours, pourra toutefois irriter.
Simon Corley
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