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Maria Stuarda

Marseille
Opéra
06/15/2005 -  17, 19 et 22 juin
Gaetano Donizetti: Maria Stuarda
Angeles Blancas Gulìn (Maria Stuarda), Marie-Ange Todorovitch (Elisabetta), Gioacchino Lauro Li Vigni (Leicester), Franck Ferrari (Talbot), Wojtek Smilek (Cecil), Burcu Uyar (Anna).
Orchestre et chœurs de l’Opéra de Marseille, Patrick Davin (direction musicale).
Francesco Esposito (mise en scène et costumes), Andréa Hlinková (assistant à la mise en scène), Italo Grassi (décors), Daniele Naldi (lumières).

Production du Théâtre de Bergame


S’il est des œuvres aux parcours laborieux et mouvementés, Maria Stuarda, quarante-huitième opéra de Donizetti, en est une. Créée en 1834 au Théâtre San Carlo de Naples, l’œuvre eut une gestation difficile. Déjà, pendant les répétitions, le roi Ferdinand II de Naples interdit l’ouvrage qu’il jugeait blasphématoire. Il n’était pas du goût d’un monarque conservateur, rétrograde même, de voir deux reines s’affronter aussi crûment sur scène, ni l’une d’elles – de surcroît protestante – envoyer sa rivale catholique sur le billot. Le livret fut remanié en hâte et l’opéra créé sous le titre de Buondelmonte. Un an plus tard, lorsque Maria Stuarda se présente à Milan avec La Malibran dans le rôle titre, l’œuvre subit à nouveau les affres de la censure. Après la mort de Donizetti, l’opéra sombre dans l’oubli jusqu’en 1958, date de sa reprise à Bergame, patrie du compositeur.
Le livret de Bardari, vaguement inspiré d’une pièce de Schiller, prend quelques libertés avec la vérité historique dont il ne conserve que les conflits émotionnels. Dans ce triangle classique où deux femmes (Marie Stuart et Elizabeth I) aiment le même homme (le Comte de Leicester), la réalité des faits cède le pas à l’affrontement des personnages.
Musicalement, on a coutume de dire que Maria Stuarda est une œuvre moins inspirée qu’Anna Bolena, Roberto Devereux, La Favorite, ou Lucia di Lammermoor. Peut-être. Il n’en demeure pas moins que cet opéra, triomphe du bel canto romantique, comporte des pages d’une beauté saisissante.

La mise en scène de Francesco Esposito, même si elle relève parfois d’une esthétique un peu conventionnelle, a le mérite de bien mettre en évidence la montée progressive et inéluctable de la tension dramatique. Notons le superbe décor du premier tableau de l’acte 3 où Elizabeth, qui vient de signer l’arrêt de mort de sa cousine, se retrouve au centre d’une gigantesque tâche de sang – celui que va verser Marie Stuart - représentée par un immense tissu de velours rouge qui envahit presque toute la scène. Tout aussi efficace, surtout grâce aux magnifiques éclairages de Daniele Naldi, la scène finale, sorte d’épiphanie esthétique et religieuse, voit Marie s’avancer stoïquement vers la mort, foudroyée par une aveuglante lumière blanche. Mais la soirée valait surtout pour l’affrontement des deux reines, superbement interprétées par deux chanteuses de talent. Marie-Ange Todorovitch campe une Elizabeth de grande qualité : inflexible, autoritaire et haineuse. Certes les aigus sont parfois un peu tendus, mais la voix est solide et puissante, le medium riche, opulent même. Pour lui tenir tête, la soprano germano-espagnole Angeles Blancas Gulìn déploie des moyens dramatiques et vocaux tout à fait convaincants. Malgré un timbre un peu opaque et une légère perte de couleurs dans le registre aigu, la ligne de chant garde toute sa souplesse dans les passages de bravoure et le phrasé est élégant. A l’aise dans le style bel canto - quoique ne chantant les trilles dans aucun de ses trois airs, ni l’ornementation du deuxième couplet de son « Oh nube che lieve », Angeles Blancas Gulìn est touchante dans « Ah dal cielo scende la tua voce » à l’acte 3, altière et fielleuse dans la scène de la confrontation, élégiaque et poignante de dignité dans son dernier air « Ah se un giorno ».
Le Talbot de Franck Ferrari, baryton, est lui aussi d’une très bonne tenue. Le Niçois possède des moyens vocaux qui lui permettent de camper un Talbot de très bon niveau. Citons aussi la bonne tenue du Cecil de Wojtek Smilek et de l’Anna de la soprano turque Burcu Uyar. L’Italien Gioacchino Lauro Li Vigni, dans le rôle de Leicester n’a pas semblé très en forme le soir de la première. Très en retrait par rapport au reste de la distribution, ce ténor semble inclassable, chantant parfois dans le style bel canto, puis soudain avec une voix de ténor lyrique.
Dirigés par Pierre Iodice, les chœurs de l’opéra de Marseille signent une prestation digne d’éloges, et tout particulièrement dans la troublante page sotto voce du « Vedeste » au troisième acte.
Sous la baguette de Patrick Davin, premier chef invité, l’orchestre de l’Opéra de Marseille ne cesse de progresser. Cette formation en avait bien besoin. Si nous avons écouté avec un immense plaisir la lecture limpide et ferme de ce jeune et talentueux chef d’orchestre, pour autant, nous avons regretté qu’il choisisse de ne pas jouer l’ouverture.

Le public marseillais a quitté le théâtre ravi que la saison 2004/2005 se termine avec éclat, même s’il fallut pour cela couper la tête d’une reine de France.






Christian Dalzon

 

 

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