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Le Couronnement de Mozart! Paris Théâtre des Champs-Elysées 03/29/2005 - Wolfgang Amadeus Mozart : Exultate Jubilate, extraits des Vêpres d'un confesseur, de la messe en ut mineur. Messe du Couronnement. Veronica Cangemi - Cora Burggraaf (soprano), Blandine Staskiewicz (mezzo-soprano), Paul Agnew (ténor), Luca Pisaroni (basse)
Ensemble Matheus - Choeur les Eléments
Joël Suhubiette (chef de choeur)
Jean-Christophe Spinosi (direction) Jean-Christophe Spinosi en compagnie de son orchestre, l’Ensemble Matheus, se frotte de plus en plus à l’univers de Mozart et bien lui en prend. Il apporte au compositeur une énergie et une intelligence musicale sans pour autant jouer au chef baroqueux. Les choix de ses tempi et des couleurs instrumentales sont tout à fait judicieuses et permettent de découvrir une belle lecture de ce compositeur.
La première partie du concert est consacrée à quelques grandes pages de la musique religieuse de Mozart, notamment le fameux Exultate Jubilate. Veronica Cangemi, remplaçant Sandrine Piau, apporte toute sa virtuosité à cette oeuvre. Elle met beaucoup d’engagement dans les différents “exultate” et de douceur voluptueuse dans “respondeo”. Elle apporte une grande sensibilité au très beau passage “tu virginum”, malgré un tempo vif. Jean-Christophe Spinosi amène magnifiquement le “alleluia” avec un decrescendo délicat qui laisse mourir peu à peu la musique pour la laisser s’épanouir dans l’éclat de l’”alleluia”. Ce passage est souvent pour la chanteuse le moyen de briller, ce que fait ici Veronica Cangemi, et il est très allégé. Ici, le chef aborde la partition avec beaucoup de sérieux et interprète l’”alleluia” en plaçant des accents sur les “a” initiaux ce qui permet d’avoir une cascade de notes plus pertinentes sur la suite de la vocalise.
Mais c’est surtout dans l’extrait “Laudate dominum” tiré des Vêpres d’un confesseur que la chanteuse apporte la luminosité de sa voix, sa douceur et sa beauté: les legato sur les ”laudate” sont somptueux, bien amenés et tenus. L’orchestre de Spinosi est alors superbe, plein de somptuosité: les violons retrouvent leurs couleurs suaves et on perçoit facilement la monté de la tension dans les premières mesures de l’accompagnement. Veronica Cangemi se montre bien plus inspirée et musicienne que dans l’Exultate: elle utilise une belle voix pleine, charmeuse.
Le très difficile “Et incarnatus est” de la Messe en ut mineur est splendide également et elle parvient à presque donner l’intégralité de la page en pleine voix. Les premières notes sont superbes grâce à des violons qui pleurent et à des vents expressifs qui se répondent avec une logique parfaite. Les vocalises de Veronica Cangemi sont précises ce qui console d’aigus parfois un peu serrés et pas toujours très justes. Elle sait donner des dynamiques différentes aux phrases tout en gardant une cohérence dans l’interprétation qui n’est jamais mièvre.
Après l’entracte, place à la Messe du Couronnement qui n’est pas forcément la meilleure oeuvre écrite par Mozart. Les solistes sont très bons à commencer par Cora Burggraaf qui défend le “Agnus dei” avec musicalité: la voix sait s’alléger pour les attaques et se rondir dans le medium qui est de toute beauté. Blandine Staskiewicz soutient parfaitement l’ensemble mais sa partie ne compte pas de solo donc il est assez difficile de l’entendre: le duo entre les deux chanteuses “Benedictus” est très joli et les deux voix vont bien ensemble. Du côté des hommes, on ne peut que louer la magnifique basse Luca Pisaroni dont les passages à Paris sont toujours chaleureusement salués. Paul Agnew a une curieuse façon de chanter dans la mesure où il hache complètement la ligne de chant et est inaudible à certains endroits.
Jean-Christophe Spinosi apporte une vive énergie au début du Credo qui prend une allure presque inquiétante tellement la rapidité provoque une tension. Il met en relief certains instruments comme l’orgue que l’on entend beaucoup dans les airs religieux. Il fait aussi un remarquable travail au niveau des contrebasses qui se montrent particulièrement expressifs pour marteler les coups du “crucifixus”. Le choeur n’appelle également que des louanges. Il est très engagé et apporte des accents poignants dans le milieu du Credo. Enfin l’Ave verum aura rarement aussi bien été servi dans la mesure où Jean-Christophe Spinosi et Joël Suhubiette réduisent au minimum la puissance de l’orchestre et du choeur, pour parvenir à la plus grande simplicité. Un grand moment!
Cà et là on reconnaît la patte du chef, la même que celle qui redonne vie aux partitions de Vivaldi: il prononce certaines attaques pour ensuite laisser la musique se développer d’elle-même. Le public réservant un accueil très enthousiasme à cette interprétation, on ne peut qu’espérer revoir cet Ensemble très bientôt dans ce répertoire. Un bien beau concert qui laisse augurer une fructueuse complicité entre Jean-Christophe Spinosi et Mozart!
A noter:
- Jean-Christophe Spinosi et Mozart se retrouveront les 8 et 9 décembre 2005 pour Die Zauberflöte en version de concert au théâtre des Champs-Elysées. Manon Ardouin
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