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Etincelant Paris Opéra Bastille 12/08/2004 - Igor Stravinski : Le Chant du rossignol
Olivier Messiaen : Chronochromie
Béla Bartok : Concerto pour orchestre, sz. 116
Orchestre de l’Opéra national de Paris, Pierre Boulez (direction)
Après Georges Prêtre (voir ici), Pierre Boulez, dans une saison 2004-2005 qui est également celle de ses quatre-vingts ans, était fêté à l’Opéra Bastille pour une soirée exclusivement symphonique. Affluence des grands jours pour l’occasion, bien entendu, au point que nombre de spectateurs se trouveront privés de programme.
Le choix des compositeurs et des œuvres était emblématique du chef français, qui a toujours eu le goût de défendre ses «classiques du XXe siècle». D’emblée, dans Le Chant du rossignol (1917) de Stravinski, sa précision légendaire fait merveille: non seulement il met en place la mécanique de façon admirable et étincelante, mais, chose plus inattendue, il met en valeur, dans les sections plus lentes, ce que l’économie du propos et le traitement des timbres peuvent avoir de webernien.
En même temps, ce poème symphonique conduisait, indépendamment de considérations purement ornithologiques, à l’univers sonore de Chronochromie (1960) de Messiaen. Entre Boulez, d’un côté, qui a enregistré la pièce voici onze ans, et l’Orchestre de l’Opéra national de Paris, de l’autre, qui connaît son Messiaen sur le bout des doigts, on se trouvait entre de bonnes mains. De fait, tous ont semblé se jouer de cette complexité quasiment provocatrice, culminant dans l’Epode pour dix-huit cordes solistes.
Boulez dit avoir sélectionné le Concerto pour orchestre (1943) de Bartok pour son aptitude à démontrer la virtuosité des musiciens. Celle-ci ne sera certes pas prise en défaut, notamment dans un Finale au tempo époustouflant, mais l’interprétation va bien au-delà: laissant place à la sauvagerie, à l’humour (Giuoco delle coppie), au mordant (Intermezzo interotto) et à l’expression (Elegia), Boulez ne fait l’impasse sur aucune des dimensions de la partition, s’autorisant même une souplesse de conduite et une sensualité qui finiront bien par tordre le cou, un jour, au cliché de la «perfection froide» que l’on associe encore trop souvent à son nom.
Simon Corley
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