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Fascinant Gergiev

Paris
Théâtre du Châtelet
12/02/2004 -  
Anatole Liadov : Le Lac enchanté, opus 62
Robert Schumann : Symphonie n° 2, opus 61
Modeste Moussorgski : Tableaux d’une exposition (orchestration Maurice Ravel)

Orchestre de Paris, Valery Gergiev (direction)


De retour dans la capitale après une tournée en Chine, l’Orchestre de Paris ne retrouvait cependant ni «sa» salle, ni son directeur musical, puisque c’est au Théâtre du Châtelet qu’il se présentait pour sa première rencontre (et pour un unique concert) avec Valery Gergiev. Etrangement, celui-ci avait élaboré un programme quasiment identique à celui qu’avait dirigé Mariss Jansons, voici un an, lors de sa venue avec la Philharmonie de Vienne (voir ici), rapprochant de façon relativement originale Schumann et Moussorgski.


Le chef russe avait néanmoins choisi de commencer par Le Lac enchanté (1909) de Liadov. Souvent galvaudé, le terme de musique «impressionniste» s’applique on ne peut mieux à cette musique, proche de Scriabine ou de Debussy, mais où la couleur prend le pas sur la mélodie, d’autant que le chef s’attache à obtenir des timbres d’une finesse et d’un velouté idylliques.


On attendait sans doute de la part d’une personnalité aussi fougueuse une interprétation plus instinctive d’une œuvre telle que la Deuxième symphonie (1846) de Schumann, qui relate le combat (provisoirement) victorieux du compositeur contre ses angoisses. Evitant, malgré un effectif de soixante cordes, la lourdeur que l’on reproche parfois à cette partition, Gergiev en donne une vision apollinienne, à la fois très construite et très travaillée, classique, équilibrée, lumineuse et sereine, assez proche de l’esprit de la Neuvième symphonie de Schubert, mais non dépourvue, en dépit de tempi modérés, d’une énergie qu’il insuffle à grands ahanements sonores. Inhabituellement retenu, le second Trio du Scherzo vient toutefois apporter un élément plus subjectif, qui remet en question la continuité du discours. L’Adagio espressivo, très alangui, tient grâce à des phrasés intenses, qui respirent amplement.


L’orchestration par Ravel des Tableaux d’une exposition (1873) de Moussorgski est décidément à l’honneur en ce mois de décembre, puisqu’elle sera à l’affiche de l’Orchestre de la Cité internationale les 9 et 10, puis de l’Orchestre philharmonique de Radio France le 22. Mais force est de constater que Gergiev et l’Orchestre de Paris ont d’ores et déjà placé la barre très haut. Avec des tableaux fortement contrastés, aux couleurs tour à tour rutilantes (La Grande porte de Kiev) ou volontairement enlaidies (Gnomus, La Cabane sur des pattes de poule), on reconnaît ici Gergiev tel qu’en lui-même, bien davantage qu’en première partie. Certains partis pris – notamment des tempi systématiquement étirés, même pour les Promenades qui font office d’intermèdes, et des silences très théâtraux (alors que les différents mouvements sont enchaînés sans interruption) – auront pu irriter, mais nul ne pourra contester le formidable travail d’orchestre qu’il accomplit, servi en cela par des musiciens hors pair: le résultat est en effet stupéfiant de précision, de clarté d’articulation et de transparence dans Tuileries, Ballet des poussins dans leurs coques ou Limoges. Le marché.


En outre, le patron du Mariinsky n’a pas son pareil pour planter un décor – dans Il Vecchio castello, tout semble dit avant même l’entrée du saxophone alto, au solo par ailleurs superbement dessiné – et oser des gestes extrêmes – ainsi, à la fin de cette même pièce, un interminable diminuendo du saxophone qui se fond très progressivement dans le silence. La main de fer ne paraît jamais se relâcher, Bydlo suivant une arche parfaitement tracée tandis que les Catacombes bénéficient d’un soin tout particulier, aucune attaque, aucun phrasé, aucun silence n’échappant au contrôle de Gergiev. Ceci ne l’empêche pas de prendre quelques libertés avec le texte, faisant par exemple intervenir par deux fois la grosse caisse à contretemps juste avant l’ultime énoncé du choral dans La Grande porte de Kiev.



Simon Corley

 

 

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