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Sibelius trop facile ? Paris Salle Pleyel 03/22/2000 - Serge Prokofiev : Suite scythe, opus 20
Jean Sibelius : Concerto pour violon, opus 47
Béla Bartok : Concerto pour orchestre, sz. 116 Julian Rachlin (violon)
Orchestre de Paris, Neeme Järvi (direction) L’Orchestre de Paris proposait un programme haut en couleurs et riche en horizons. Stimulés par un chef d’orchestre avec lequel ils paraissent bien s’entendre, les musiciens ont donné le meilleur d’eux-même. Déchaînés mais précis dans la Suite scythe de Prokofiev, partition où alternent cataclysmes orchestraux et sonorités extrêmement recherchées, ils étaient lyriques et dansants dans le Concerto pour orchestre de Bartok. Chacun des pupitres y tint brillamment son rôle concertant, pour composer un ensemble à la sonorité superbe.
Seul le Concerto pour violon de Sibelius fut problématique. Le violoniste Julian Rachlin a visiblement des qualités : un très beau son, une belle présence, des facilités techniques. Davantage encore : il joue avec un engagement rare, presque de l’acharnement, et paraît y trouver un plaisir intense. Il joue cependant comme si la partition de Sibelius n’avait rien à dire d’elle-même. Peut-être par crainte de son apparente facilité, Rachlin lui force la main. A aucun moment il ne laisse sa partie chanter, tout simplement, à aucun moment il ne paraît voir plus loin que les quelques notes qui suivent. A mesure qu’il avance dans le concerto, le son durcit, les faux-pas se font plus nombreux. Chaque instant est prétexte à des effets de plus en plus hasardeux, le texte est de bout en bout morcelé, souvent les césures imposées le rendent incompréhensible. Le tempo, qui varie du tout au tout sans crier gare, est parfois tellement rapide que les notes se fondent en un véritable gargouillis. De loin en loin pourtant le violoniste parvient à des instants magiques, qui laissent deviner ce qui aurait pu advenir du concerto si son interprète ne se laissait pas dépasser par son jeu, s’il parvenait à canaliser son énergie. La phrase inaugurale de la Troisième Sonate d’Ysaÿe, son bis, magistrale, donnait à penser qu’enfin le violoniste avait trouvé ses marques. A nouveau cependant le jeu dérape, se précipite, puis soudain s’immobilise pour repartir de plus belle, malgré quelques beaux instants. La partition d’Ysaÿe souffre cependant moins de ce passage à la moulinette que le Concerto de Sibelius.
Qu’est-ce qu’un chef d’orchestre qui fait bien son travail ? Järvi a bien accompagné son fantasque soliste, qu’il a suivi jusque dans ses idées les plus folles. Probablement est-ce un début de réponse.
Gaëlle Plasseraud
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