About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Victoire chinoise au Concours Messiaen

Paris
Opéra comique
11/08/2003 -  
Olivier Messiaen : Le Réveil des oiseaux - Cantéyodjayâ
Karlheinz Stockhausen : Klavierstück XI (*)
André Boucourechliev : Archipel 4 (**)

Chuan Qin (*), Feodor Amirov (*), Prodomos Symeonidis (*), Hue-Am Park (**) (piano)
Orchestre philharmonique de Radio France, Myung-Whun Chung (direction)


Quinze jours après la cinquième édition du Concours Maurice André (voir ici), la Ville de Paris organise le Concours Olivier Messiaen de piano contemporain. Michel Béroff (1967), Jean-Rodolphe Kars (1968), Catherine Collard (1969), Maria-Elena Barrientos (1970), Haakon Austbö et Pierre Réach (1971), Pierre-Laurent Aimard (1973), Markus Bellheim (2000): la liste des premiers prix démontre la haute qualité de cette compétition, consacrant des artistes qui ont ensuite fait carrière bien au-delà du «piano contemporain», mais elle raconte également l’histoire d’un concours qui, fondé autour du Festival de Royan, connut une interruption de vingt-sept ans, Messiaen, qui en présidait le jury, ayant préféré se consacrer à la composition de son opéra Saint-François d’Assise. Mais le flambeau est aujourd’hui porté mieux que jamais: Michel Béroff préside un jury dans lequel, outre Yvonne Loriod, on retrouve notamment Noel Lee, Roger Muraro, Idil Biret et Ivan Fedele, qui a composé une pièce destinée à la deuxième épreuve.


Précédée de deux phases permettant d’opérer une sélection parmi les vingt et un candidats admis (dont seulement une Française), âgés de dix-huit à trente-deux ans, la finale se déroule elle-même en deux temps: «concerto» imposé – Le Réveil des oiseaux (1953) de Messiaen, excellemment accompagné par l’Orchestre philharmonique de Radio France dirigé par Myung-Whun Chung – puis court récital comprenant une œuvre imposée de Messiaen – Cantéyodjayâ (1949) – et le choix d’une œuvre de Boucourechliev, Boulez ou Stockhausen.


Aussi bien dans le Réveil que dans le Klavierstück XI (1956) de Stockhausen, Chuan Qing (Chine, vingt-huit ans ce 12 novembre) frappe par une personnalité indéniable, mue par un refus de l’ascèse, avec non seulement une grande variété d’attaques et de sonorités (depuis le moelleux jusqu’au métallique) mais aussi un souci apporté à l’expression qui tourne parfois au décoratif ou au démonstratif. A la fois vivant et construit, son Cantéyodjayâ, très spectaculaire, évoque la virtuosité lisztienne en même temps que la sauvagerie stravinskienne. Il remporte le Grand prix de la Ville de Paris ainsi que le prix des éditions Leduc pour la meilleure interprétation d’extraits du Catalogue d’oiseaux et des Petites esquisses d’oiseaux.


Prodomos Symeonidis (Grèce, trente et un ans) s’attache, dans l’ensemble de sa prestation, à un impeccable respect du texte (extraordinaire netteté de la polyphonie dans le Réveil), sans que son objectivité et sa précision ne réfrènent en quoi que ce soit la musicalité de l’ensemble. Il livre ainsi un formidable Klavierstück XI, plus bref que celui des deux autres candidats, mais d’une maîtrise époustouflante, en faisant ressortir toute la richesse expressive comme s’il s’agissait d’un grand classique. Toujours aussi exact dans Cantéyodjayâ, il donne une véritable leçon d’interprétation, allant au plus profond de la pièce, tant dans les phrasés que dans la mise en valeur des références (Debussy, Jolivet). Il remporte le deuxième Grand prix, le prix Yvonne Loriod du «candidat le plus fidèle à l’esprit de la musique» de Messiaen, le prix des éditions Durand pour la meilleure interprétation du Réveil des oiseaux et le prix des éditions Universal pour la meilleure interprétation de Cantéyodjayâ.


Hue-Am Park (Corée, trente ans) cultive la même attitude scrupuleuse à l’égard de la partition dans le Réveil, mais donne généralement le sentiment de ne pas faire preuve d’une aussi grande capacité à communiquer un message plus original. Un rien lisse et raide dans un Cantéyodjayâ par ailleurs parfaitement mis en place et d’une remarquable clarté, il conclut par une lecture échevelée et roborative, d’une frénésie et d’une complexité à la Nancarrow, d’Archipel 4 (1970) de Boucourechliev, véritable happening à base de clusters et de déferlantes précipitées sur l’ensemble du clavier. Il remporte le troisième prix et le prix de la Fondation André Boucourechliev pour la meilleure interprétation d’Archipel 4.


Cheveux tombant jusqu’au milieu du dos, saluant familièrement le public, Feodor Amirov (Russie, vingt-deux ans) se présente comme le plus exubérant des quatre finalistes. Fantasque, son jeu l’est aussi, et même nerveux, électrique, mais d’une liberté qui fait trop souvent l’impasse sur la partition. En témoigne par exemple la superbe ignorance du silence doublement marqué d’un point d’orgue à l’issue du grand concert d’oiseaux du Réveil, alors que Messiaen souligne dans la préface: «Prière de respecter les grands silences, eux aussi authentiques.» Théâtral, son Klavierstück XI joue sur le mordant pince-sans-rire, la poésie et les grands gestes théâtraux, tandis qu’il peine à restituer la continuité de Cantéyodjayâ, fulgurant, âpre, mais parfois trop lent et globalement trop décousu. Il remporte le quatrième prix et le prix de la Fondation Olivier Messiaen pour la meilleure interprétation de l’œuvre d’Ivan Fedele composée pour le concours.


La prochaine édition se tiendra en 2007.



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com