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Deux requiems atypiques

Paris
Cité de la musique
09/26/2003 -  
Heinrich Schütz : Musikalische Exequien, opus 7
Johannes Brahms : Ein deutsches Requiem, opus 45

Carolyn Sampson, Cécile Kempenaers (sopranos), Jan Kobow, Friedemann Büttner (ténors), Sebastian Noack, Dominik Wörner (basses), Ageet Zweistra (violoncelle), Miriam Shalinsky (contrebasse), Brian Feehan (luth), Herman Stinders (orgue) [Schütz], Carolyn Sampson (soprano), Thomas Bauer (baryton) [Brahms]
Collegium vocale de Gand, Orchestre des Champs-Elysées, Philippe Herreweghe (direction)


Au cours de cette saison, la Cité de la musique permettra à trois personnalités de nous faire partager leur «Domaine privé», non seulement en se produisant elles-mêmes en concert mais en leur permettant d’inviter à cette occasion des musiciens de tous horizons. Avant le saxophoniste Wayne Shorter (17-25 janvier) et Peter Eötvös (18-28 mai), c’est Philippe Herreweghe qui inaugure cette série, en proposant, durant quatre jours, six concerts, une projection et une table ronde, autour du thème «de la déploration, du deuil et de l’adieu».


Affluence des grands soirs pour ce programme emblématique du chef flamand, qui, au fil des années, du baroque au contemporain puis à l’ère romantique, est devenu aujourd’hui l’un des rares à se consacrer avec un égal bonheur à autant d’univers différents, couvrant toute la musique occidentale du Moyen Age jusqu’à nos jours. Emblématique également de l’intelligence d’une programmation qui parvient chaque année au Festival de Saintes à faire dialoguer audacieusement les styles et les époques, en rapprochant ici deux requiems «allemands» qui vont directement puiser dans la Bible de Luther des textes illustrant davantage l’espérance du salut que la terreur de la mort.


Précédés d’une sobre communication d’un représentant des intermittents du spectacle, écoutée dans le plus grand silence et chaleureusement accueillie par le public, les Musikalische Exequien (1636) de Schütz démontrent les légendaires qualités de Herreweghe et de son ensemble: la précision du geste et la pureté des voix n’ont toutefois rien de lisse ou de terne, tant l’attention portée au texte et le feu intérieur qui animent cette interprétation font ressortir tour à tour l’âpreté des attaques et la grâce, voire la sensualité, du propos.


Chef de chœur, Brahms connaissait bien cette œuvre, dont l’influence se fait sentir, quoique sans doute plus dans l’esprit que dans la lettre, dans son Requiem allemand (1868). Herreweghe, avec une équipe, notamment les choristes, familière du répertoire ancien, est particulièrement bien placé pour souligner cette filiation. A la tête d’un effectif restreint (quarante-deux cordes, cinquante choristes) et à rebours d’une certaine tradition brahmsienne, il ne fera évidemment pas jaillir la consolation de l’opulence orchestrale ou d’une grandeur monumentale. Cela étant, loin de cette image austère qui lui est encore parfois associée, il met l’accent sur les aspérités de la partition, servies par les timbres inhabituels des instruments d’époque et par les tempi, allants sans être précipités. On pourra en revanche regretter l’écrasement de l’amplitude sonore, notamment une faible différenciation dans les nuances piano, et le manque de clarté de la fugue finale de la troisième partie, phénomènes qui peuvent cependant trouver tout ou partie de leur explication dans l’acoustique de la salle. Souvent passionnée ou tendre, cette vision toujours vivante trouve peut-être paradoxalement son aboutissement dans les moments d’apaisement qu’offrent les quatrième et septième parties. Les excellents solistes s’y intègrent avec humilité, qu’il s’agisse de Carolyn Sampson, dont la voix quasiment dépourvue de vibrato possède des aigus cristallins, ou de Thomas Bauer.



Simon Corley

 

 

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