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Eclairages sur la musique russe

Paris
Maison de Radio France
03/08/2003 -  

Alexandre Mossolov : Les fonderies d’acier
Nicolas Miaskovski : Concerto pour violoncelle, opus 66
Alexandre Scriabine : Sonate pour piano n° 4, opus 30 - Prométhée, le Poème du feu, opus 60


Tatiana Vassilieva (violoncelle), Ludmila Berlinskaïa (piano), Christophe Henry (clavier de lumières)
Philharmonie d’Iéna, Dimitri Liss (direction)


S’étant fixé comme objectifs de «marier les différentes expressions artistiques» et de «restituer les œuvres telles qu’elles furent créées, suivant la volonté du compositeur», le festival Printemps musical à Paris propose, du 8 au 14 mars, un ensemble de trois manifestations à la programmation indéniablement originale. Le premier concert, présenté par Frédéric Lodéon, était consacré à quarante ans (1903-1944) de musique russe, période relativement brève, mais capitale, au-delà même des événements historiques, tant elle se caractérise par sa formidable richesse, ce sont dont témoignaient les trois compositeurs on ne peut plus différents qui étaient successivement interprétés.


Il faut d’abord saluer la rare occasion qui était donnée d’entendre les impressionnantes Fonderies d’acier (1926) d’Alexandre Mossolov, magnifique emblème d’un courant esthétique - le constructivisme - qui aura trouvé en Union soviétique un écho non seulement chez des compositeurs aussi reconnus que Prokofiev ou Chostakovitch, mais également chez des personnalités sacrifiées de la musique soviétique, telles que Lourié et Roslavetz. Regard apparemment froid et objectif, qui pourrait sembler sans autre ambition que de décrire au moyen des timbres orchestraux, dans une sorte de mouvement perpétuel, le bruit assourdissant de l’usine, si la peine de l’élément humain - un chant d’une robuste simplicité proclamé par les huit cors (debout) - à s’imposer dans ce vacarme ne suggérait pas en même temps la protestation et la révolte.


Lorsque Nicolas Miaskovski compose son Concerto pour violoncelle (1944), l’élan idéologique et musical des années 1920 appartient bel et bien au passé, tant la partition, doit davantage, pour schématiser, à Glazounov qu’à Chostakovitch. Mais qu’importe, car dans une structure originale en deux mouvements, elle offre à un violoncelle peu virtuose (hormis une courte cadence) et accompagné par un orchestre rarement employé dans toute sa puissance, une demi-heure de lyrisme contenu, servi par la sonorité pure de Tatiana Vassilieva (premier grand prix du Concours Rostropovitch voici deux ans).


Entièrement consacrée à Scriabine, la seconde partie permettait d’abord d’entendre son étonnante Quatrième sonate (1903), dans laquelle Ludmila Berlinskaïa, directrice artistique du festival, non seulement se jouait des redoutables pièges techniques mais mettait en valeur le formidable élan parcourant ces deux mouvements, qui annoncent déjà le Poème de l’extase, alors qu’ils ont été écrits avant même la Troisième symphonie.


La pianiste était ensuite entourée de la Philharmonie d’Iéna dirigée par Dimitri Liss, dans Prométhée (1910), accomplissant, une fois n’est pas coutume, la volonté de Scriabine de voir ce Poème du feu donné avec son «clavier de lumières», à défaut du chœur (facultatif, il est vrai). Marqué par le symbolisme et le souci d’un art total unissant toutes les formes d’expression, il avait effectivement associé lumière et son dès sa Quatrième sonate (au demeurant dans la même tonalité - «bleue» - de fa dièse majeur), parlant à son propos de «vol vers l’étoile» et précisant: «l’étoile est verte et bleue». D’où l’idée de confectionner un clavier dont les touches déclencheraient non des notes, mais des lumières. Près d’un siècle plus tard, la réalisation de cette partie pourtant scrupuleusement notée dans la partition paraît toujours aussi délicate et, pour tout dire, insatisfaisante: malgré un impressionnant déploiement de projecteurs dans l’auditorium Olivier Messiaen (un compositeur qui traduisait aussi les accords en couleurs…), ceux - sans doute majoritaires - pour lesquels la synesthésie (ou, plus précisément en l’espèce, la synopsie) reste une perception à laquelle ils ne peuvent prétendre, demeurant définitivement étrangers à ces correspondance baudelairiennes, n’auront probablement vu qu’une succession d’éclairs lumineux plus ou moins rapides. Dans cette ambiance de boîte de nuit un peu fatiguée, les musiciens, notamment un premier trompettiste d’exception, donnaient une lecture vigoureuse et engagée de ce Prométhée.


Le site du festival Printemps musical à Paris:
http://www.printempsmusicalaparis.com/



Simon Corley

 

 

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