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Les aventures érotiques du Comte Ory

Paris
Opéra-Comique
02/26/2003 -  et 27 février, 1er, 3, 5, 7 mars 2003
Gioachino Rossini : Le Comte Ory
Marc Laho ( Le Comte Ory), Marc Barrard (Raimbaud), Nicolas Cavallier (Le Gouverneur),
Annick Massis (La Comtesse Adèle), Isabelle Cals (Isolier), Anna Steiger (Dame Ragonde), Lys Nordet (Alice), Rodolpho Cavero (premier coryphée), Guy Vives (deuxième coryphée)
Yves Parmentier (chef des chœurs), Ensemble Orchestral de Paris, Antonino Fogliani (direction musicale)
Jérôme Savary (mise en scène), Ezio Toffolutti (décors et costumes), Alain Poisson (lumières)


On pouvait craindre le pire dans la mise en scène de Jérôme Savary. Et bien non ! Tout est assez traditionnel, pas toujours d’un goût exquis mais disons plutôt classique et coloré. Cette production avait été faîte pour Glyndebourne, alors shocking ? Nos voisins d’outre-manche n’auraient pas apprécié la gaudriole vulgaire dont le Directeur actuel de L’Opéra-Comique use et abuse trop souvent. Petit clin d’œil au festival de Glyndebourne : on voit des couples en habits, robes longues traverser la scène une coupe de champagne à la main, pour se rendre au fameux pique-nique …


Premier acte un peu longuet sans grande invention, on n’échappe pas aux arbres, moutons en carton pâte à l’horizon.
Le deuxième acte est plus consistant. On assiste au bain de ces dames, pour certaines dans le plus simple appareil, s’ébrouant dans des pauses qui se veulent lascives ! Rien de choquant, on a vu pire ! Puis vient le passage le plus classique du genre opéra-comique français, le plus désopilant : la scène de la beuverie des compagnons du Comte déguisés en bonnes sœurs. Ils font plus vrai que vrai, ivres-morts « à faire exploser l’alcootest ».
Puis évidemment Jérôme Savary ne pouvait pas alléger la scène du grand lit où le trio Comtesse Adèle, Comte Ory (déguisé en sœur Colette) et Isolier le page, s’ébattent en cherchant qui est qui. Celui qui est « pris » n’est pas celui qu’on pense !
Le casting (restons British !) était de niveau inégal. Isabelle Cals en Isolier n’a pas su rendre le côté primesautier qu’on attendait. Sa voix est impersonnelle sans grande qualité. Le Comte Ory, Marc Laho, ténor déjà entendu dans le répertoire rossinien, a un médium et un grave bien assis et sonore mais l’aigu est serré surtout lorsqu’il faut atteindre les contre-ut. Pourtant au second acte il a su passer en voix mixte du meilleur effet.
Nicolas Cavallier (remplaçant Denis Sedov) a prêté sa voix de basse au gouverneur ( rôle hélas trop court) et nous a permis d’entendre sa tessiture bien timbrée et à l’aise aussi bien dans les graves que dans les aigus.
Marc Barrard, baryton, a donné un Raimbaud désopilant dans son morceau de bravoure de la scène de l’ivresse, n’oublions pas que de nombreux passages dans cette partition sont empruntés par Rossini à son « Voyage à Reims » .
L’Ensemble orchestral de Paris dirigé par le jeune chef sicilien Antonino Fogliani, n’a pas soulevé l’enthousiasme. Quelque peu terne avec des sonorités manquant d’allant, il semblait étouffé et peut-être à l’origine de fréquents décalages avec les chœurs.


Heureusement il y a la reine de la soirée : la Comtesse Adèle, merveilleuse, belle, étincelante, malicieuse Annick Massis. Scéniquement virevoltant d’un bout à l’autre de la scène, jouant avec sa robe à traîne, ce qui ne l’empêchait pas de lever la jambe, de se tortiller dans tous les sens pour échapper à l’infâme baiser du Comte Ory et aux assauts d’Isolier. Vocalement, elle est superbe, le grave, le médium, l’aigu jamais crié, bien tenu avec une aisance à vous couper le souffle, quel talent possède ce soprano lyrique colorature ! En résumé lorsqu’elle n’est pas sur scène, on s’ennuie, elle sauve la représentation qui sans elle serait très quelconque …
Au salut final le directeur-metteur en scène s’est évidemment mis en avant et a remercié tous les protagonistes ! On se serait cru aux cérémonies des Césars, des Molières des Victoires de la Musique (qui avaient lieu le même soir au Châtelet). Il a expliqué que cette première avait dû être reportée au 26 en raison de la grève des syndicats et des intermittents du spectacle. Il a apporté une précision intéressante : l’Opéra-comique emploie 150 d’entre-deux et est le troisième du trio de tête des employeurs d’intermittents du spectacle, après l’Opéra National de Paris et Disney-Land …. Cette intervention, bien que justifiée, a coupé un peu l’enthousiasme du public et a privé Annick Massis de l’ovation supplémentaire qu’elle méritait.


A l’issue du spectacle, nous avons pu échanger quelques paroles avec Annick Massis, qui avec son sourire habituel nous a fait part de son appréhension, de la perturbation de tout le plateau de devoir chanter deux soirs de suite sans repos. Mais sa fougue, son amour et son respect du public l’emportent...
Elle raconte avec simplicité les instants très particuliers qu’elle a vécu en décembre dernier au Met pour sa Lucia di Lammermoor (c’était la première fois qu’elle chantait dans ce prestigieux théâtre). Dès son entrée en scène elle a été applaudie, ce qui lui a fait venir les larmes aux yeux et elle a dû faire un gros effort pour maîtriser son émotion et entamer son premier air. Elle avoue modestement avoir eu un triomphe.
Après la Comtesse Adèle de Rossini, on pourra la retrouver dans un rôle très différent les 2 et 4 avril prochains, à Mogador où elle sera Térésa, l’amoureuse de Benvenuto Cellini (Berlioz) en version de concert avec l’Orchestre de Paris sous la direction de Christoph Eschenbach.
Belle soirée en perspective !



E.G. Souquet

 

 

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