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Bienvenu Monsieur Martinu !

Paris
Palais Garnier
11/06/2002 -  et 9, 13, 18, 22, 25, 27 novembre 2002
Bohuslav Martinu : Juliette ou la clé des songes, version française
William Burden (Michel), Alexia Cousin (Juliette), Ivan Matiakh (Le Commissaire, Le Facteur), Laurent Naouri (L’Homme au casque, Le Marchand de souvenirs), Alain Vernhes (L’Homme à la fenêtre), Karine Deshayes (Le Petit arabe), Christian Tréguier (Le Viel arabe), Michèle Lagrange (La Chiromancienne), Martine Mahé (La Marchande de poissons), Gaële Le Roi (Deuxième monsieur), Marie-Thérèse Keller (Troisième monsieur)
Orchestre et Chœurs de l’Opéra National de Paris, Marc Albrecht (direction)
Richard Jones (mise en scène), Antony McDonald (décors et costumes)



Créé à Prague en 1938, alors sous la menace directe d’une invasion des armées hitlériennes sous prétexte d’aider les Sudètes, à partir d’une pièce donnée onze ans plus tôt dans le Paris frivole des années vingt, l’opéra Juliette ou la clé des songes illustre un dérèglement de la perception et de la logique dans un univers quotidien, un trouble profond face au monde mais exprimé avec légèreté, une impossibilité de vivre dite sans effusion dramatique, une sorte de danse au bord du précipice, de fête un peu bizarre avant un cataclysme terrible... Arrivant dans une ville dont tous les habitants ont perdu la mémoire, Michel, d’abord désarçonné, tire plus ou moins volontairement avantage de ses souvenirs (jusqu’à être nommé pour un moment le «capitaine de la ville») avant, au deuxième acte, de devenir plus «fou» que ces citadins suite à la perte de l’amour qu’il recherche, Juliette. Comme eux, mais dans la frénésie, il s’invente des souvenirs et, au troisième acte, s’avère incapable de se conformer à l’ordre du «bureau des rêves», sorte de cauchemar bureaucratique et totalitaire. Le surréalisme de Georges Neveux, l’auteur de la pièce, prend ici une tournure bien plus réelle et prémonitoire que les analyses de l’époque. Mais ce texte, sur la quête de l’amour et notre rapport aux autres, nous parle encore aujourd’hui, bien sûr, tout comme la musique de Martinu, loin de Vienne et de son école, à mi-chemin de la tension slave et de la clarté française, et inventive, toujours.


Une telle œuvre, comportant régulièrement des passages parlés, nécessite un vrai «théâtre», dont s’acquittent brillamment tous les chanteurs guidés par une mise en scène lisible sachant préserver cette atmosphère d’«inquiétante étrangeté», même si le décor, une variation sur un accordéon géant, ne saisit pas grand chose du sujet (le duo anglais avait réalisé dans ces murs la très belle soirée Le Nain et L’Enfant et les sortilèges). C’est vocalement irréprochable avec une superbe distribution française (hormis l’excellent Michel de William Burden dont l’accent américain ne gêne en rien la compréhension du texte) dominée par notre prodige vocal Alexia Cousin qui gagne en nuances et en épaisseur psychologique, l’homme aux talents multiples (à l’aise du baroque au XXe siècle) et au timbre reconnaissable entre mille Laurent Naouri, l’un des plus grands barytons actuels, Alain Vernhes, et Michèle Lagrange, impayable en chiromancienne. Pour ses débuts à l’Opéra de Paris, Marc Albrecht frappe les esprits par la qualité de sa direction, cursive, aérée, incisive. C’est, bien entendu, le spectacle à voir de ce mois de novembre pour cette œuvre qui aura attendu 1976 pour être créée en France (à Rouen) et qui fait ici son entrée, bienvenue, au répertoire.



Diffusion sur France Musique le 16 novembre à 19h30





Philippe Herlin

 

 

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