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Kazushi Ono : un Chef sur qui compter

Bruxelles
La Monnaie
09/17/2002 -  et les 20, 22, 24, 26, 28 septembre et les 2, 4 et 6 octobre 2002
Richard Strauss: Elektra
Isolde Elchlepp [17, 20, 28 septembre ; 2, 6 octobre]/ Luana DeVol* [24 septembre]/ Susan Bullock [22, 26 septembre ; 4 octobre] (Elektra), Charlotte Margiono/ Nancy Weissbach** [26, 28 septembre : 2, 6 octobre] (Chrysothemis), Ingrid Tobiasson (Klytämnestra), Albert Dohmen (Orest), Ian Caley (Ägisth), Hanna Schaer (Erste Magd), Gritt Gnauck (Zweite Magd), Ursula Hesse von den Steinen (Dritte Magd), Eva Oltivanyi (Vierte Magd), Ingrid Habermann (Fünfte Magd), Jacqueline Van Quaille (Die Aufseherin), Marc Coulon (Ein junger Diener), Carlos Krause (Ein alter Diener), Jacques Does (Der Pfleger des Orest), Michela Remor (Die Vertraute), Véronique Solhosse (Die Schleppträgerin)
Stéphane Braunschweig (mise en scène et décors), Thibault Vancraenenbroeck (costumes), Marion Hewlett (lumières), Renato Balsadonna (chef des chœurs),
Chœurs et Orchestre Symphonique de la Monnaie, Kazushi Ono (direction musicale)
* remplaçant Isolde Elchlepp souffrante
** remplaçant Charlotte Margiono souffrante
Nouvelle Production du Théâtre Royal de la Monnaie. Coproduction avec l’Opéra du Rhin (2002)

Une page importante se tourne dans l’histoire de la Monnaie avec le départ pour le Covent Garden d’Antonio Pappano et sa succession au poste de directeur musical par Kazushi Ono, venu, lui, du Badisches Staatstheater de Karlsruhe où il était en fonction depuis 1996.
Le regret d’avoir perdu Pappano alors qu’après des premières années un peu inégales il était arrivé à une indéniable maturité artistique est compensé par le résultat absolument exemplaire qu’obtient Kazushi Ono pour cette Elektra d’ouverture qui restera dans les mémoires au moins pour cette raison. Ono tire en effet de l’Orchestre Symphonique de la Monnaie (désormais l’un des meilleurs orchestres d’opéra) des sonorités superbes, des couleurs variées, des détails que l’on avait rarement aussi bien remarqués, un jeu de contrastes et de nuances d’une grande subtilité. Par ailleurs, Ono maîtrise parfaitement l’équilibre fosse/scène dans une œuvre qui n’est pas sans danger à ce niveau, tout en sachant faire sortir de ses gonds l’orchestre lorsque cela est nécessaire.
Du coup, l’aspect scénique passe, à tort, au second plan. Car la production de Stéphane Braunschweig, déjà présentée à l’Opéra du Rhin en février dernier autour de la personnalité de la grande cantatrice Luana DeVol Vol, est remarquable dans sa simplicité et sa lisibilité, même si les interprètes dont Bruxelles dispose pour le rôle titre n’ont pas le charisme de DeVol (heureux spectateurs de la représentation du 24 septembre qui ont pu l’apprécier lorsqu’elle est venue in extremis remplacer la titulaire souffrante !).
La scénographie que Braunschweig a imaginée abandonne toute référence à l’époque antique pour une illustration atemporelle, volontairement réduite à peu d’éléments, aussi bien de couleurs (oppositions de rouge, noir et blanc) que de décors ; trois espaces scéniques sont définis : l’avant-scène avec une chaise et une baignoire (lieu de l’assassinat d’Agamemnon, objet d’obsession pour Elektra), l’arrière-plan, la chambre de Chlytemnestre et entre les deux un escalier reliant les différents temps de l’action, témoin, entre autres, de la mise à mort d’Egiste.
L’intrigue est ainsi concentrée dans un monde à la fois vaste (du fait du dénuement scénique) et oppressant, c’est dire que l’esprit de l’œuvre de Strauss et Hofmannstahl est bien respecté.
On regrettera seulement l’impression d’un manque de force dans la direction d’acteurs qui semblent à certains moments ne pas aller jusqu’au bout de la violence si présente dans cet opéra. Mais le programme n’indique pas clairement si Braunschweig a assuré lui-même la reprise de sa production et l’on peut se demander si les interprètes ont bénéficié des mêmes conditions de répétitions qu’à Strasbourg.
La fin de l’œuvre pose également problème, assez confuse ; il faut lire les commentaires du metteur en scène dans le programme pour comprendre qu’il choisit de laisser un doute sur la réalité de l’accomplissement de la vengeance par Oreste, celui-ci surgissant au même endroit de la scène que lors de sa première apparition, aux cris de Chrysothemis le nommant. L’idée serait que la deuxième partie de l’action était en fait fantasmée par Elektra. Cet éclairage est-il vraiment nécessaire et pertinent ?
Là où le bas blesse le plus, c’est dans l’incarnation du rôle titre. Quel dommage que Luana DeVol n’ait pas été disponible pour cette série de représentations, mis à part celle qu’elle a sauvée. Car, se partageant l’écrasant et terrifiant rôle d’Elektra, aucune des deux cantatrices n’en a véritablement les moyens. Isolde Elchlepp, actrice chevronnée, convaincante dans son incarnation est malheureusement en difficulté vocale, escamotant carrément les aigus. A Susan Bullock, plus placide scéniquement, manque un peu de volume (malgré l’aide d’Ono qui veille à ne pas la couvrir) mais vocalement, elle s’en sort mieux, arrivant sans trop de problèmes à bout d’une partition qu’elle n’aurait cependant pas intérêt à chanter trop souvent. Le chant piano de la reconnaissance d’Oreste la trouve à son meilleur.
Charlotte Margiono, souffrante à chacune des représentations auxquelles j’ai assisté, permet à la jeune Nancy Weissbach, Chrysothemis dans la production d’origine à Strasbourg, de faire de convaincants débuts à la Monnaie : timbre solide, incarnation touchante, reste à mieux maîtriser le suraigu.
Ingrid Tobiasson est une étonnante Chlytemnestre, inhabituelle en fait tant nous sommes habitués à y entendre des cantatrices à la voix plus vieillie. Celle-ci se caractérise par une belle clarté, un grave solide et une remarquable diction.
Albert Dohmen est un Oreste de luxe, tout comme Ian Caley, pathétique Egiste mais c’est deux rôles doivent être distribués à des chanteurs de leur calibre.
Les seconds rôles sont inégaux, les Servantes pas toujours justes, le jeune Serviteur et la Surveillante assez catastrophiques à vrai dire.
Mais ces réserves, assez inhabituelles dans un théâtre comme la Monnaie il faut le reconnaître, n’entachent pas l’impact de cette production dont on retiendra en fin de compte l’exceptionnelle direction de Kazushi Ono.



Christophe Vetter

 

 

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