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Autour des frères Okada Normandie Deauville (Salle Elie de Brignac‑Arqana) 04/20/2025 - Ludwig van Beethoven : Quatuor avec piano n° 3 en do majeur, WoO 36 n° 3
Franz Schubert : Duo pour violon et piano en fa majeur, opus 162, D. 574
Felix Mendelssohn : Lieder ohne Worte, opus 19b : 1. Andante con moto, opus 30 : 3. Adagio non troppo, opus 62 : 6. Allegretto grazioso, opus 67 : 2. Allegro leggiero & opus 102 : 5. Allegro vivace – Quatuor avec piano n° 3 en si mineur, opus 3 Trio Arnold : Shuichi Okada (violon), Manuel Vioque‑Judde (alto), Bumjun Kim (violoncelle) – Kojiro Okada (piano)
 S. Okada, K. Okada (© Stéphane Guy)
Alors que le quatrième concert du vingt-neuvième festival de Pâques de Deauville était donné par les frères Fouchenneret et leurs amis, celui du cinquième était l’occasion d’entendre, dans un programme d’œuvres aussi légères que plaisantes, les deux frères Okada et le Trio Arnold fondé en 2018 autour de l’un d’eux.
Il s’est ouvert par une œuvre plutôt méconnue de Ludwig van Beethoven (1770‑1827), le Troisième Quatuor avec piano, composé en 1785 semble‑t‑il mais publié après la mort du compositeur, en 1832. C’est une œuvre de jeunesse de quelqu’un qui a déjà du métier. Elle est alors interprétée par de jeunes artistes qui ont aussi déjà du métier. De facture très mozartienne, elle met en avant un piano assez virtuose mais, sous les doigts de Kojiro Okada (né en 1999), les difficultés, faites pour épater Vienne, sont surmontées sans peine. Les cordes peuvent paraître un peu vertes dans l’Adagio con espressione mais sont plus à l’aise dans l’Allegro final, lequel est troussé de façon à mettre tout le monde de bonne humeur.
Le Duo (1817) de Franz Schubert (1797‑1828) est aussi d’inspiration mozartienne, quoique moins nettement, et est aussi une œuvre de jeunesse et a aussi été publiée après la mort de son auteur. La forme sonate innerve cette œuvre assez longuette. Les frères Okada s’en sortent néanmoins fort bien, Kojiro s’en tirant peut‑être mieux que son frère Shuichi (né en 1995), très exposé il est vrai. Ça frétille comme une truite dans un ruisseau (Scherzo et Allegro vivace final) et l’entente fraternelle ne souffre d’aucune faille.
La seconde partie débute par un petit écart par rapport à la ligne directrice du festival, consacré en principe à la musique de chambre. Kojiro Okada propose en effet cinq Romances sans paroles de Felix Mendelssohn (1809‑1847) pêchées dans ses huit cahiers écrits entre 1830 et 1845, sur les six inscrites au programme. Le jeune pianiste, très concentré, les aborde avec goût, sans chichis, avec ce qu’il faut de rubato et survole avec finesse et légèreté le clavier. Encore un talentueux pianiste qu’il faut continuer de suivre attentivement.
Ses qualités seront confirmées dans le Troisième Quatuor avec piano (1825) du même Felix. Kojiro Okada y fait montre d’une facilité assez déconcertante et de puissance maîtrisée. C’est le cas par exemple dans le quatrième mouvement, dans lequel il n’écrase jamais les cordes. Celles‑ci ne sont pas en reste : l’Andante est absolument charmant, parfaitement lyrique. Nulle esbrouffe ici mais de magnifiques lignes mélodiques où se détache le violoncelle superbe de Bumjum Kim. Dans l’Allegro vivace final, les jeunes interprètes n’ont ni froid aux yeux ni aux doigts et ça chante admirablement. Le public qui, par ses applaudissements, avait déjà interrompu les artistes à l’issue du premier mouvement, comme après l’Allegro initial du Quatuor de Beethoven, le programme ne servant donc à rien pour suivre contrairement à ce que nous croyions, pouvait maintenant se manifester légitimement.
Prochain concert : vendredi 25 avril.
Stéphane Guy
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