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Droit à l’essentiel München Herkulessaal 01/10/2025 - Igor Stravinsky : Symphonie de psaumes
Felix Mendelssohn Bartholdy : Symphonie n° 2 « Lobgesang », opus 52 Nikola Hillebrand (soprano), Marie Henriette Reinhold (mezzo), Tilman Lichdi (ténor)
Chor des Bayerischen Rundfunks, Martin Wright (chef de chœur), Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, Herbert Blomstedt (direction) H. Blomstedt (© Bayerischer Rundfunk/Severin Vogl)
Oui, il y a bien un lien entre la Symphonie de psaumes de Stravinsky et la Deuxième Symphonie « Chant de louanges » de Mendelssohn. Les deux œuvres se concluent sur des textes issus du Psaume 150.
Mais les similarités s’arrêtent là. Mendelssohn utilise une traduction des textes en allemand et Stravinsky en latin et non le texte original en hébreu. L’orchestre de Mendelssohn est classique tandis que Stravinsky écrit pour un ensemble dépourvu de violons, altos, clarinettes... mais augmenté de deux pianos.
Mais la principale différence est plutôt dans l’esprit avec lequel les deux compositeurs célèbrent Dieu. Stravinsky trouve dans le sublime Laudate Dominum une spiritualité où on ne l’attendrait pas nécessairement mais l’accord sur lequel le chœur chante le Dominum final n’est pas complètement résolu et n’est pas sans une certaine ambiguïté. Le contraste ne saurait être plus fort avec la positivité solaire qui se dégage dès les premières notes du Mendelssohn et une énergie qui ne diminue pas.
L’activité dont fait preuve Herbert Blomstedt à 97 ans est assez incroyable. Il a dirigé à Londres en novembre la Neuvième Symphonie de Mahler, celle de Bruckner à Berlin mi‑décembre en plus d’un concerto de Mozart ; il est à Munich pour deux soirées avec ce programme, puis sera à Prague pour remplacer Semyon Bychkov dans la Neuvième Symphonie de Schubert, à San Francisco fin janvier, à Boston en février pour un programme Schubert-Brahms puis à New York...
Certes sa gestique est moins expansive que par le passé mais les entrées sont claires et il imprime aux deux œuvres une réelle vitalité rythmique. La construction et le soin de la ligne dans le Stravinsky sont remarquables. L’élévation sur un ostinato un peu hypnotique au dernier mouvement se déroule avec beaucoup de naturel et de profondeur.
Mais ce qui frappe le plus dans cette soirée est le fait que les tempi sont non seulement justes mais surtout servent une réelle conception de la musique. La symphonie de Mendelssohn démarre avec un tempo alerte. Certains chefs privilégient un accelerando un peu théâtral (non indiqué sur la partition) voire un tempo plus ample. Blomstedt sait varier les tempi lorsque la musique le demande. Le ritardando au milieu du premier mouvement est effectué avec un beau phrasé. Mais surtout, ce que Blomstedt exprime ici est la foi et l’optimisme d’un jeune compositeur d’une trentaine d’années. Les choix musicaux servent une conception très pensée. Rien n’est fait par hasard.
Comme toujours, le Chœur de la Radio bavaroise est superlatif. La dynamique est large et la justesse, en dépit d’une exigence technique redoutable, est impeccable. Remplaçant Christina Landshamer, Nikola Hillebrand a un superbe phrasé et de très belles hautes notes. Voici un nom à retenir. Tilman Lichdi est un peu trop sage. Il pourrait apporter un peu plus de caractérisation à un texte qui est assez dramatique. L’orchestre, dans « sa » salle, est somptueux. Les tutti respirent et permettent à tant de détails de ressortir, que ce soit pour Stravinsky et Mendelssohn.
Et comme toujours, on ressent à quel point la communication entre chef et musiciens passe si bien. Voici une soirée vraiment superbe qui démarre si bien cette nouvelle année. Dommage que la seconde soirée, le lendemain, ait été annulée à la dernière minute en raison d’un « grave dysfonctionnement des installations électriques ».
Antoine Lévy-Leboyer
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