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Monolithique Paris Maison de la radio et de la musique 01/04/2025 - et 5 janvier 2025 Guillaume Connesson : Heiterkeit
Ludwig van Beethoven : Symphonie n° 9 en ré mineur, opus 125 Simone Schneider (soprano), Eve-Maud Hubeaux (contralto), Matteo Ivan Rasic (ténor), Peter Kellner (basse)
Chœur de Radio France, Lionel Sow (chef de chœur), Philharmonique de Radio France, Jaap van Zweden (direction)
J. van Zweden (© Radio France/Christophe Abramowitz)
Depuis 2018, la Neuvième Symphonie de Beethoven est au programme du Philharmonique de Radio France dans les premiers jours de janvier. Quelques années après sa prise de fonction en 2015 c’est en effet Mikko Franck, le directeur musical de l’orchestre jusqu’en juin 2025, qui instaure cette pratique inspirée des pays voisins. On se réjouit de voir en ce début d’année au pupitre Jaap van Zweden, prochain directeur musical de l’orchestre à partir de 2026, ce qui laisser à penser que cette pratique va perdurer.
En première partie de concert figure une œuvre de Guillaume Connesson, compositeur français né en 1970, donnée ce soir en création française. Intitulée Heiterkeit, (sérénité), cette courte pièce, créée par Krzysztof Urbanski à Indianapolis en 2022, utilise des poèmes de Friedrich Hölderlin. Elle trouve ce soir des interprètes précis et inspirés.
Place ensuite à la Neuvième Symphonie de Beethoven, donnée ce soir avec un effectif réduit de cordes dont témoigne la présence de six contrebasses au lieu des huit traditionnelles. La vision du chef néerlandais n’a rien de révolutionnaire, les tempi sont raisonnables et les équilibres respectés. Il sollicite beaucoup avec énergie les musiciens, qui sont très réactifs. La direction est efficace, musclée mais semble assez vite monolithique. Les quatre mouvements se ressemblent dans leur esprit – il faut dire que la conduite du chef « à la serpe » empêche tout écart. L’incroyable coda du premier mouvement déçoit. Quelques imprécisions aux cors et micro‑décalages gênent à peine le scherzo. Le mouvement lent, sans aucun doute le plus difficile à réussir, ne dégage pas de vraie émotion. De manière non surprenante, c’est le dernier mouvement qui convient le mieux à la personnalité extravertie du chef. Le passage solo dédié aux cordes graves confirme l’excellence de ces pupitres. Et la progression vers la fin de l’œuvre, parfaitement maîtrisée, impressionne plus qu’elle ne touche.
Le quatuor de chanteurs, judicieusement placé sur le côté gauche de la scène, ne montre que des qualités. Aucun ne cherche à briller plus que de raison. La basse slovaque Peter Kellner se joue de l’ambitus de sa première et délicate intervention. Le jeune ténor formé à Vienne Matteo Ivan Rasic, appelé en remplacement de Pavol Breslik, possède une belle voix plutôt sombre qui sied parfaitement à son passage soliste. La partie de l’alto belge Eve‑Maud Hubeaux est tout à fait audible, ce qui constitue déjà un exploit. Quant à la soprano allemande Simone Schneider, elle possède sans aucun doute les aigus de sa redoutable partie. Le Chœur de Radio France, toujours en progrès, est ici dans son élément. La précision, l’engagement et l’équilibre polyphonique rendent pleinement justice à la partie chorale.
Le public est conquis comme semblent l’être les musiciens, qui applaudissent avec enthousiasme leur futur directeur musical. Mais on les a sentis plus concentrés qu’heureux lors de ce qui n’était toutefois qu’une deuxième rencontre. Gageons que les programmes futurs leur permettront d’être plus en osmose. Car ce soir, cette Neuvième Symphonie d’allure monolithique, extravertie plus que concentrée, domptée plus que maîtrisée, ne nous a pas semblé posséder la tension interne et la jubilation que l’on attend de ce chef‑d’œuvre.
Gilles Lesur
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