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Des voix d’exception dans un écrin inadapté

Gstaad
Eglise de Rougemont
01/03/2025 -  
Richard Wagner : Tannhäuser : « Dich teure Halle »
Giuseppe Verdi : Aida : « Celeste Aida » & « Ritorna vincitor »
Francesco Cilea : L’Arlesiana : « Lamento di Federico »
Edvard Grieg : Sechs Lieder, opus 48 : 5. « Zur Rosenzeit » & 6. « Ein Traum »
Giacomo Puccini : Tosca : « Recondita armonia », « Mario! Mario! Mario!... Ah, quegli occhi » &  « Vissi d’arte »
Paolo Tosti : Ideale
Frederick Loewe : My Fair Lady : « I could have danced all night »
Franz Lehár : Die lustige Witwe : « Lippen schweigen »

Lise Davidsen (soprano), Freddie De Tommaso (ténor), James Baillieu (piano)


J. Baillieu, L. Davidsen, F. De Tommaso
(© Patricia Ditzi/GNYMF 2024‑2025)



La soprano Lise Davidsen et le ténor Freddie De Tommaso ont tous les deux, dans l’absolu, une voix exceptionnelle et leur récital devait être l’un des grands moments du Festival de musique de Nouvel An de Gstaad (« Gstaad New Year Music Festival », GNYMF). La soirée a malheureusement laissé des impressions mitigées, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, le programme initialement prévu a été allégé de plusieurs airs, extraits notamment du Bal masqué de Verdi, parce que le récital ne prévoyait pas d’entracte permettant aux chanteurs de reposer leur voix. Mais la raison principale de la déception est que l’écrin intimiste qu’est la toute petite église de Rougemont n’est pas adaptée à une voix aussi puissante et sonore que celle de Lise Davidsen. Le « Dich teure Halle » qui a ouvert la soirée, lancé à pleins poumons comme au Festspielhaus de Bayreuth, a fait trembler les piliers de l’église et a été douloureux pour bien des oreilles. On s’étonne par ailleurs qu’une artiste de ce calibre n’ait pas eu le réflexe d’adapter le volume de son instrument à la salle dans laquelle elle se produit. Une église n’est pas le MET ! Surprenant aussi que, durant les répétitions, personne n’ait évoqué le problème avec les interprètes. A la veille de sa vingtième édition, l’hiver prochain, on espère que le GNYMF prendra les mesures qui s’imposent.


Abstraction faite du problème du volume sonore, le récital de Lise Davidsen et de Freddie De Tommaso a offert de superbes moments de chant. La soprano norvégienne a une voix absolument phénoménale, une voix comme on n’en trouve que tous les cent ans, au point qu’on la compare déjà à sa compatriote Kirsten Flagstad (1895‑1962) ou à la Suédoise Birgit Nilsson (1918‑2005). Projection insolente, puissance sonore incroyable, timbre de marbre, aigus atteints avec une facilité déconcertante, longueur de souffle ahurissante, sauts d’octave périlleux, avec de tels moyens, la soprano n’a pu qu’impressionner le public. Dans « Ritorna vincitor » mais surtout dans le célèbre « Vissi d’arte », elle a montré qu’elle savait aussi nuancer son chant, avec un phrasé délicat, un legato remarquable, de splendides demi‑teintes et des accents d’une sincérité émouvante, quand bien même le timbre manque quelque peu d’italianità. En outre, Lise Davidsen a offert des trésors de délicatesse dans deux mélodies de Grieg, avec de superbes pianissimi, prouvant avec brio que son talent ne se limite pas à la puissance de sa voix.


Le ténor Freddie De Tommaso possède, lui aussi, une voix magnifique, aux couleurs sombres et mordorées (il a commencé sa carrière comme baryton), une voix pleine et opulente, parfaitement homogène et bien conduite sur toute la tessiture, avec des aigus insolents et rayonnants. Si le « Celeste Aida » a commencé tout en puissance, il s’est terminé sur un splendide diminuendo. Et quand bien même le « Recondita armonia » aurait pu être plus délicat et raffiné, c’est dans l’Ideale de Tosti que le ténor s’est montré à son meilleur, séduisant et charmeur à souhait. Dans le duo extrait de Tosca (« Mario! Mario! Mario!... Ah, quegli occhi »), les deux artistes ont affiché une belle complicité. Une soirée mitigée, certes, mais qui aura tout de même permis au public de découvrir deux voix hors du commun.



Claudio Poloni

 

 

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