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Vienne aux deux visages

Paris
Philharmonie
12/18/2024 -  et 19 décembre 2024
Johann Strauss fils : Die Fledermaus : Ouverture – Wiener Blut, opus 354 – Frühlingsstimmen, opus 410
Arnold Schoenberg : Pelleas und Melisande, opus 5

Sabine Devieilhe (soprano)
Orchestre de Paris, Daniel Harding (direction)


D. Harding (© Joachim Bertrand)


Ce sont des retrouvailles : parti en 2019, Daniel Harding dirige de nouveau un Orchestre de Paris visiblement ravi, dans un concert viennois où la capitale autrichienne montre un double visage, celui de Johann Strauss fils et celui d’Arnold Schoenberg – qui l’aimait beaucoup et a transcrit certaines de ses valses pour ensemble de chambre. L’Ouverture de La Chauve‑Souris, sèche et bousculée, poussant l’orchestre au fond de ses retranchements, ne montre malheureusement guère d’affinité avec le roi de la valse. L’orchestre a beau briller de tous ses feux, la musique ne respire pas, comme si le chef craignait de s’y abandonner. Le manque de souplesse et de sourire ne nuit pas moins à Sang viennois. Dans Voix du printemps, la direction ne porte pas une Sabine Devieilhe un peu acide, pas très à l’aise avec l’allemand, au médium trop modeste. Certes les notes piquées sont là, les suraigus aussi, impeccables, jusqu’au contre‑fa final, mais le chant, malgré la rapidité du tempo, garde quelque chose de crispé. Avec de tels Strauss, sans charme ni chic, Vienne n’est plus dans Vienne.


Tout change avec Pelléas et Mélisande de Schoenberg, qui ne fera pas pour autant oublier que les salles de concert parisiennes ont scandaleusement ignoré son cent‑cinquantième anniversaire. Ce poème symphonique débordant de lyrisme postromantique exacerbé, où s’assume l’héritage de Wagner et Mahler, où le chromatisme atteint ses limites sans vraiment s’en affranchir, porte la signature du premier Schoenberg, qui n’a pas encore jeté aux orties le froc de la tonalité et encore moins enfanté la série de douze sons. Daniel Harding, lui, préfère y annoncer l’avenir, sacrifiant la sensualité de la musique à la rigueur de la construction, à la clarté de la polyphonie, aux audaces d’une instrumentation anticipant parfois les dodécaphoniques Variations opus 31. On pourrait certes souhaiter davantage d’abandon dans la scène d’amour, davantage de mystère dans les souterrains du château, mais pas davantage de tension dans le drame. C’est la fatalité de la passion que la direction exalte, comme si tout tendait vers l’inéluctable dénouement – on sent le chef habitué aux fosses d’opéra. Un dénouement superbe, à partir du « Nach und nach langsamer », où la direction prend feu. Plus expressionniste que symboliste, assez éloigné de l’esprit de la pièce de Maeterlinck, le poème symphonique, pris dans des tempi assez rapides, relève ici de la course à l’abîme.



Didier van Moere

 

 

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