Back
La mort heureuse Paris Opéra Bastille 11/02/2024 - et 5*, 7, 9, 12, 15, 17, 19, 21, 23 novembre 2024 Wolfgang Amadeus Mozart : Die Zauberflöte, K. 620 Jean Teitgen (Sarastro), Pavol Breslik (Tamino), Nicolas Cavallier (Sprecher), Niall Anderson (Erster Priester, Zweiter Geharnischter Mann), Nicholas Jones (Zweiter Priester, Erster Geharnischter Mann), Aleksandra Olczyk (Königin der Nacht), Nikola Hillebrand (Pamina), Margarita Polonskaya (Erste Dame), Marie‑Andrée Bouchard‑Lesieur (Zweite Dame), Claudia Huckle (Dritte Dame), Mikhail Timoshenko (Papageno), Ilanah Lobel‑Torres (Papagena), Mathias Vidal (Monostatos), Solistes du Chœur d’enfants Aurelius de Calw (Drei Knaben)
Chœurs de l’Opéra national de Paris, Alessandro Di Stefano (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra national de Paris, Oksana Lyniv (direction musicale)
Robert Carsen (mise en scène, lumières), Michael Levine (décors), Petra Reinhardt (costumes), Peter Van Praet (lumières), Martin Eidenberger (vidéo), Ian Burton (dramaturgie)
(© Charles Duprat/Opéra national de Paris)
Après Falstaff, Madame Butterfly, Faust et La Fille du régiment, avant The Rake’s Progress et Rigoletto, La Flûte enchantée : entre septembre et décembre, Les Brigands auront été la seule nouvelle production de l’Opéra de Paris. On savait que Robert Carsen ne renouvelait pas notre lecture du Singspiel mozartien, même si l’on y voit la Reine de la nuit et Sarastro, tel un couple parental, alliés pour veiller sur l’initiation de Tamino et de Pamina. La production, en effet, vise à réconcilier l’irréconciliable, à commencer par la vie et la mort. Les épreuves se déroulent entre des tombes, d’où surgissent parfois les corps ressuscités. A l’humanité le metteur en scène associe une nature se régénérant au gré des saisons. L’opéra se clôt ainsi sur la vision idyllique d’un paradis de verdure où tous les personnages sont vêtus de blanc – seuls l’étaient, auparavant, les deux jeunes gens. Ils s’éveillent à une nouvelle vie en une sorte de communion rédemptrice – même Monostatos, qui incarnait l’absolu de la méchanceté, finit par les rejoindre. Un spectacle très léché, avec de très belles images, tiré au cordeau. Du pur Carsen en somme, qu’on a connu plus inventif.
La distribution, assez moyenne, n’a rien de mémorable non plus. Pavol Breslik, qui nous avait séduit il y a dix ans, reste un bon Tamino, mais a perdu à la fois de sa vaillance et de sa douceur, la ligne n’ayant plus son galbe patricien. Excellent comédien, le Papageno SDF de Mikhail Timoshenko s’avère vocalement trop terne et pas assez délié. La Reine de la nuit d’Aleksandra Olczyk, si elle émet des suraigus d’une justesse absolue, si elle offre un médium charnu, savonne ses vocalises sans composer un personnage. Le trio des Dames, au premier acte, pâtit de l’instabilité de la Première, Margarita Polonskaya, et Mathias Vidal, hier Tamino très stylé à Versailles, se démène tellement en Monostatos qu’il ne chante presque plus son air. Mais Nikola Hillebrand projette la lumière de Pamina, on aimerait seulement percevoir un peu plus d’émotion à travers un « Ach ich fühl’s » impeccable. Jean Teitgen a à la fois les graves et la noblesse de Sarastro, figure tutélaire, rien moins que redoutable. Et Nicolas Cavallier, aujourd’hui bien chenu, tient encore son Récitant. Pagagena pourrait être plus piquante que Ilanah Lobel‑Torres, mais les Prêtres et Hommes armés de Niall Anderson et Nicholas Jones sont impeccables, les trois gamins parfaits.
A la tête d’un orchestre un peu routinier – magnifiques solos de flûte néanmoins – et d’un excellent chœur, Oksana Lyniv privilégie le mouvement plus que le mystère, soucieuse avant tout de raconter, plutôt carrée au premier acte. Elle s’arrondit au second, d’une légèreté toute chambriste, nue davantage les sonorités, crée quelques clairs‑obscurs.
Didier van Moere
|